LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE,
a rendu l'arrêt suivant :
Sur le pourvoi formé par la société Tradom, société à responsabilité limitée dont le siège est ... (Puy-de-Dôme),
en cassation d'un arrêt rendu le 3 octobre 1988 par la cour d'appel de Riom (4e chambre sociale), au profit de Mme Catherine X..., demeurant ... (Puy-de-Dôme),
défenderesse à la cassation ; LA COUR, en l'audience publique du 1er avril 1992, où étaient présents :
M. Cochard, président, M. Monboisse, conseiller rapporteur, MM. D..., G..., I..., J..., B..., F... Ride, MM. Carmet, Merlin, conseillers, M. Y..., Mme Z..., Mlle H..., MM. C..., A...
E... de Janvry, conseillers référendaires, M. de Caigny, avocat général, Mme Collet, greffier de chambre ; Sur le rapport de M. le conseiller Monboisse, les observations de Me Foussard, avocat de la société Tradom, de Me Hennuyer, avocat de Mme X..., les conclusions de M. de Caigny, avocat général, et après en avoir délibéré conformément à la loi ; ! Sur le premier moyen :
Attendu que, selon l'arrêt attaqué (Riom, 3 octobre 1988) et la procédure, Mme X... a été engagée le 20 septembre 1978 en qualité de chauffeur-routier par la société Tradom ; que, le 6 décembre 1983, elle a dû interrompre son travail pour cause de maladie ; qu'après le 28 janvier 1984, elle n'a plus adressé à son employeur d'avis de prolongation ; que, le 21 novembre 1986, elle a avisé la société Tradom qu'elle pouvait reprendre son travail le 6 décembre 1986, tout en l'informant que, se trouvant en invalidité et classée dans la catégorie 1, elle ne pouvait travailler que quatre heures par jour ; que, le 29 novembre 1986, la société lui a répondu qu'elle l'avait considérée comme démissionnaire depuis le 28 janvier 1984 ; que Mme X... a saisi la juridiction prud'homale aux fins de condamnation de son employeur au paiement de différentes indemnités de rupture ; que la société Tradom a soutenu que Mme X... avait pour le moins commis une faute grave en ne prévenant pas son employeur de son état ; Attendu qu'il est fait grief à l'arrêt attaqué d'avoir condamné la société Tradom à payer à Mme X... des sommes à titre d'indemnités de rupture et à remettre sous astreinte, un certificat de travail, alors que, selon le moyen, d'une part, à supposer même que Mme X... ait été employée au service de la société Tradom jusqu'au 21 avril 1984,
voire jusqu'à l'expiration du délai de six mois à compter de l'arrêt de travail, le fait pour Mme X... de demeurer plus deux ans sans reprendre le travail ni donner la moindre nouvelle à son employeur montrait qu'elle avait entendu rompre les relations de travail ; que, faute de s'être expliquée sur ce point, la cour d'appel n'a pas donné de base légale à sa décision au regard des articles L. 122-14, L. 122-5, L. 122-8 et L. 122-9 du Code du travail ; Mais attendu que la cour d'appel ayant énoncé à bon droit que la démission ne se présume pas et que la société était mal venue d'exciper du défaut d'envoi de certificats de prolongation de maladie pour en déduire une démission, a pu décider que la rupture s'analysait en un licenciement ; Sur le second moyen :
Attendu que la société Tradom reproche encore à l'arrêt attaqué de l'avoir condamnée à payer à Mme X... des sommes à titre d'indemnités de rupture et de dommages-intérêts, alors que, selon le moyen, d'une part, à supposer la rupture imputable à l'employeur, le licenciement qui s'ensuivait n'était pas nécessairement dépourvu de cause réelle et sérieuse ; que, faute de s'être expliquée sur les causes de la rupture, la cour d'appel n'a pas donné de base légale à sa décision au regard des articles L. 122-14-3, L. 122-14-4 et L. 122-14-6 du Code du travail ; alors que, d'autre part, la cour d'appel ne pouvait s'abstenir de rechercher si la rupture, à la supposer imputable à l'employeur, n'avait pas pour origine une faute grave commise par la salariée ; d'où il suit que l'arrêt attaqué manque de base légale au regard des articles L. 122-8 et L. 122-9 du Code du travail ; Mais attendu que la cour d'appel a fait ressortir que l'employeur était au courant de la maladie de la salariée pendant son absence et que la rupture était intervenue pour un motif fallacieux ; qu'elle a pu décider que la salariée n'avait pas commis de faute grave et n'a fait qu'user, en l'état de ses constatations, des pouvoirs qu'elle tient de l'article L. 122-14-3 du Code de travail ; que le moyen n'est pas fondé ; PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi ; Condamne la société Tradom, envers le trésorier payeur général, aux dépens et aux frais d'exécution du présent arrêt ; Ainsi fait et jugé par la Cour de Cassation, Chambre sociale, et prononcé par M. le président en son audience publique du treize mai mil neuf cent quatre vingt douze.