LA COUR DE CASSATION, TROISIEME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le pourvoi formé par :
1°) Mme Fanny E... épouse C..., demeurant ... (16ème),
2°) Mme Jacqueline C... épouse F..., demeurant ... (16ème),
en cassation d'un arrêt rendu le 28 novembre 1989 par la cour d'appel de Paris (19ème chambre A), au profit de Mme Danièle H..., demeurant ... (3ème),
défenderesse à la cassation ; Les demanderesses invoquent, à l'appui de leur pourvoi, les deux moyens de cassation annexés au présent arrêt ; LA COUR, en l'audience publique du 18 mars 1992, où étaient présents :
M. Senselme, président, M. Chollet, conseiller référendaire rapporteur, MM. I..., K..., Y..., X..., B..., J..., A..., G...
D..., MM. Aydalot, Boscheron, conseillers, Mme Z..., M. Pronier, conseillers référendaires, M. Vernette, avocat général, Mme Pacanowski, greffier de chambre ; Sur le rapport de M. le conseiller référendaire Chollet, les observations de la SCP Waquet, Farge et Hazan, avocat des consorts C..., de Me Choucroy, avocat de Mme H..., les conclusions de M. Vernette, avocat général, et après en avoir délibéré conformément à la loi ; Sur le premier moyen :
Attendu que les consorts C..., propriétaires d'un local donné en location à Mme H..., font grief à l'arrêt attaqué (Paris, 28 novembre 1989) de les débouter de leur demande en résiliation du bail, alors, selon le moyen, "1°) que le bail stipule que les lieux loués ont une destination unique, qui est l'exercice de la profession de bijouterie-sertisseur-fabricant, ce qui exclut toute autre destination commerciale et, a fortiori, tout usage d'habitation ; qu'ainsi, la cour d'appel a dénaturé le contrat de bail du 18 juin 1953, en violation de l'article 1134 du Code civil ; 2°) que la destination du bail ne résulte pas de la description des locaux, mais de la volonté clairement exprimée par la convention des parties ; que la cour d'appel, qui a constaté que le bail était à destination commerciale pour l'exercice de la professsion de bijoutier-sertisseur-fabricant, n'a pas tiré les conséquences légales de ses constatations et a ainsi violé l'article 1134 du Code civil ; 3°) que la cour d'appel, qui a relevé que le preneur utilisait une partie des locaux pour son habitation personnelle, ce
qui constitue un manquement aux stipulations contractuelles, tout en refusant de prononcer la résiliation du bail, n'a pas tiré de ses
propres constatations les conséquences légales qui s'en évinçaient nécessairement au regard de l'article 1184 du Code civil" ; Mais attendu qu'ayant, par une interprétation nécessaire, exclusive de dénaturation, des clauses ambiguës du bail, souverainement retenu que celui-ci n'interdisait pas l'utilisation à usage d'habitation d'une partie des locaux, la cour d'appel a pu écarter le manquement invoqué, de ce chef, à l'encontre du preneur ; D'où il suit que le moyen n'est pas fondé ; Sur le second moyen ; Attendu que les consorts C... font grief à l'arrêt de déclarer nul le commandement, visant la clause résolutoire du bail, qu'ils avaient fait délivrer à la locataire le 17 septembre 1985, alors, selon le moyen," 1°) qu'en soulevant d'office le moyen tiré de la nullité du commandement de payer pour n'avoir pas été précédé d'une mise en demeure ou de la présentation d'un avis d'échéance, sans avoir, au préalable, invité les parties à s'expliquer contradictoirement, la cour d'appel a violé l'article 16 du nouveau Code de procédure civile ; 2°) qu'une mise en demeure préalable au commandement de payer adressé au locataire n'est pas exigée pour que joue la clause résolutoire insérée au contrat de bail ; qu'ainsi, la cour d'appel a violé l'article 25 du décret du 30 septembre 1953 et l'article 1134 du Code civil" ; Mais attendu que Mme H... ayant soutenu que les bailleresses, s'étant abstenues de présenter et de remettre des quittances, ne devaient s'en prendre qu'à elles-mêmes pour le retard invoqué quant au règlement des sommes visées au commandement, la cour d'appel a, sans violer le principe de la contradiction, légalement
justifié sa décision en retenant exactement qu'en l'absence de stipulation contraire, le loyer est payable au domicile de la locataire et en relevant que celle-ci n'avait pas été en mesure d'acquitter normalement ses loyers à la suite de la carence des bailleresses, qui ne justifiaient pas avoir présenté, préalablement au commandement, la quittance de loyer ou un avis d'échéance ; PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi ;