AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
LA COUR DE CASSATION, DEUXIEME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le pourvoi formé par Mme Suzanne X..., née Y...,
en cassation d'un arrêt rendu le 21 septembre 1990 par la cour d'appel de Colmar (2e chambre), au profit de M. Bruno X..., défendeur à la cassation ;
La demanderesse invoque, à l'appui de son pourvoi, le moyen unique de cassation annexé au présent arrêt ;
LA COUR, composée selon l'article L. 131-6, alinéa 2, du Code de l'organisation judiciaire, en l'audience du 18 mars 1992, où étaient présents : M. Dutheillet-Lamonthézie, président, M. Bonnet, conseiller référendaire rapporteur, M. Chabrand, conseiller, M. Monnet, avocat général, Mme Rouquet, greffier de chambre ;
Sur le rapport de M. le conseiller référendaire Bonnet, les observations de Me Garaud, avocat de Mme X..., de la SCP Guiguet, Bachellier et Potier de la Varde, avocat de M. X..., les conclusions de M. Monnet, avocat général, et après en avoir délibéré conformément à la loi ;
Sur le moyen unique, pris en ses deux branches :
Attendu qu'il est fait grief à l'arrêt confirmatif attaqué d'avoir débouté Mme X... de sa demande en divorce, et accueilli la demande reconventionnelle aux mêmes fins en prononçant le divorce à ses torts ; alors que, d'une part, l'existence d'une séparation de fait des époux, même imputable à la faute de l'un d'eux, ne confère pas aux époux, encore dans les liens du mariage, une immunité privant de leurs effets normaux les offenses dont ils peuvent se rendre coupables l'un envers l'autre ; d'où il suit qu'en se bornant à retenir, pour débouter la femme de sa demande en divorce, que la liaison du mari et le non-paiement de la pension alimentaire mise à sa charge par l'ordonnance de non-conciliation étaient intervenus à une époque où la séparation des époux était déjà consommée depuis plusieurs mois, la cour d'appel aurait violé l'article 242 du Code civil ; et alors que, d'autre part, en violation de l'article 242 du Code civil, la cour d'appel, si elle a bien examiné le grief tiré d'une liaison du mari, n'aurait pas examiné celui tiré de ce que, six mois après le départ de son épouse, il avait installé sa concubine au domicile conjugal ;
Mais attendu que l'arrêt, par motifs propres et adoptés, énonce que l'épouse n'établit pas que la liaison du mari est intervenue dans le processus de la mésentente et de la rupture, et que les difficultés de paiement de la pension alimentaire survenues de nombreux mois après l'abandon du domicile conjugal ne peuvent être considérées comme étant à l'origine de la mésentente des époux et de leur rupture ;
Que par ces énonciations, la cour d'appel a souverainement estimé que les faits allégués par l'épouse à l'encontre du mari n'étaient pas de nature à justifier le prononcé du divorce aux torts de celui-ci, en examinant tous les griefs invoqués par Mme X... ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi ;
Condamne Mme X..., envers M. X..., aux dépens et aux frais
d'exécution du présent arrêt ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de Cassation, Deuxième chambre civile, et prononcé par M. le président en son audience publique du treize avril mil neuf cent quatre vingt douze.