LA COUR DE CASSATION, TROISIEME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le pourvoi formé par :
1°/ la compagnie d'assurances Union des assurances de Paris (UAP), dont le siège est ... (1er),
2°/ la société Lambda services, dont le siège est ... (Hauts-de-Seine),
en cassation d'un arrêt rendu le 8 mars 1989 par la cour d'appel de Paris (7e chambre A), au profit :
1°/ de la compagnie New Hampshire insurance company, actuellement dénommée UNAT, dont le siège est Tour American international, cédex 46 à Paris-la Défense (Hauts-de-Seine),
2°/ de la société Manpower France dont le siège est ... (17e),
3°/ de la compagnie La Concorde, dont le siège est ... (19e),
4°/ de M. Urbain Y..., demeurant ... (Nord),
5°/ de M. Guy X..., demeurant ... (Nord)
défendeurs à la cassation ; Les demanderesses invoquent, à l'appui de leur pourvoi, le moyen unique de cassation annexé au présent arrêt ; LA COUR, en l'audience publique du 19 février 1992, où étaient présents :
M. Senselme, président, Mlle Fossereau, conseiller rapporteur, MM. Vaissette, Valdès, Peyre, Beauvois, Deville, Darbon, Chemin, Boscheron, conseillers, MM. Chollet, Chapron, Pronier, conseillers référendaires, M. Marcelli, avocat général, Mme Pacanowski, greffier de chambre ; Sur le rapport de Mlle le conseiller Fossereau, les observations de la SCP Célice et Blancpain, avocat de la compagnie d'assurances UAP et de la société Lambda services, de Me Vuitton, avocat de la compagnie UNAT, de la SCP Le Bret et Laugier, avocat de la société Manpower France et de la compagnie La Concorde, de Me Boulloche, avocat de M. Y..., de Me Odent, avocat de M. X..., les conclusions de M. Marcelli, avocat général, et après en avoir délibéré conformément à la loi ; Sur le moyen unique :
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Paris, 8 mars 1989), qu'un immeuble appartenant à la société Manpower, assurée par la compagnie La Concorde, et donné à bail à la société Technicon, assurée par la compagnie UNAT, ancienne compagnie New Hampshire, a été détruit par un incendie de cause indéterminée ; que, par arrêt, devenu irrévocable, de la cour d'appel de Versailles du 23 mai 1986, la société Technicon a été condamnée, en application
de l'article 1733 du Code civil, à réparer le préjudice subi par la bailleresse ; que la compagnie UNAT, subrogée dans les droits de son assurée, a recherché la responsabilité de la société Manpower et de son assureur, ainsi que celle de la société de surveillance Lambda services, assurée auprès de l'UAP, liée par contrat avec la société Technicon ; Attendu que l'UAP et la société Lambda services font grief à l'arrêt du 8 mars 1989 de retenir que l'aggravation du sinistre est due à une faute contractuelle de la société Lambda services et de condamner celle-ci, in solidum avec la société Manpower et les assureurs, à verser des dommages-intérêts à la compagnie UNAT, alors, selon le moyen, "1°) qu'en déclarant que la société Lambda services devait réparation des dommages au titre d'une exécution prétendument défectueuse du contrat de télésurveillance, signé avec la société Technicon, sans rechercher, ainsi que l'y invitaient pourtant la société Lambda services et l'UAP, si le risque "incendie" n'était pas exclu du champ de la surveillance assurée par la société Lambda services, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 1134 du Code civil ; 2°) que le contrat de télésurveillance signé par la société Technicon ne mentionnait nullement l'existence d'une "alarme incendie" et ne comportait pas l'installation de détecteur de fumée, de sorte que, non informée de la nature du sinistre, la société Lambda services n'avait pas à prévenir les pompiers, comme le prévoyait seulement la proposition de contrat afférente à ce risque, et n'avait pas non plus à tenir un délai particulier en cas de simple intrusion ; qu'en refusant de s'expliquer sur la nature de la prestation promise, comme le lui demandaient les conclusions, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles 1134 et 1147 du Code civil ; 3°) que pour être considéré comme "causal", l'événement ou l'acte envisagé doit avoir contribué à provoquer ou, au moins, à aggraver le dommage ; que la société Lambda services, qui a reçu, aux termes mêmes de l'arrêt, une alarme correspondant à un cas d'intrusion, n'avait pas à prévenir les pompiers, ni même à intervenir en dehors d'un cas d'intrusion ; qu'ainsi, les conditions de l'intervention de l'agent de la société Lambda services sont sans relation directe avec le développement de l'incendie, en sorte qu'en statuant comme elle l'a fait, la cour d'appel a violé l'article 1151 du Code civil" ; Mais attendu qu'ayant relevé, d'une part, que le contrat de surveillance liant la société Technicon à la société Lambda services faisait obligation à celle-ci, dès qu'elle recevait un signal "d'alarme intrusion", d'alerter immédiatement ses agents et, après vérification du caractère réel de l'alarme, d'avertir les autorités compétentes, d'autre part, que "l'alarme intrusion", mise en marche au cours de l'incendie, avait été enregistrée à 15 heures 41 à la station de la société de surveillance et que ce n'était qu'à 16 heures 55-17 heures que son
agent, tenu de se rendre immédiatement sur les lieux, y était arrivé, les pompiers ayant entre-temps été prévenus par un voisin, la cour d'appel, qui a pu en déduire que l'intervention tardive du préposé de la société Lambda services constituait une faute contractuelle ayant directement concouru à la propagation et à l'aggravation de l'incendie, qui aurait pu être combattu plus tôt si la société de surveillance avait normalement exécuté ses obligations contractuelles, a, sans avoir à rechercher si le "risque incendie" était ou non exclu du champ de la surveillance, légalement justifié sa décision quant à la condamnation de la société Lambda services et de son assureur ; PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi ;