AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, FINANCIERE ET ECONOMIQUE, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le pourvoi formé par M. Bruno X..., demeurant à Mantes la Jolie (Yvelines), ...,
en cassation d'un arrêt rendu le 14 mars 1990 par la cour d'appel de Paris (3e chambre A), au profit de M. Serge Y..., demeurant à Paris (5e), ..., ès qualités de syndic de la liquidation des biens de la société X...,
défendeur à la cassation ;
Le demandeur invoque, à l'appui de son pourvoi, le moyen unique de cassation annexé au présent arrêt ;
LA COUR, composée selon l'article L. 131-6, alinéa 2, du Code de l'organisation judiciaire, en l'audience publique du 21 janvier 1992, où étaient présents : M. Bézard, président, M. Rémery, conseiller référendaire rapporteur, M. Hatoux, conseiller, M. Curti, avocat général, Mme Arnoux, greffier de chambre ;
Sur le rapport de M. le conseiller référendaire Rémery, les observations de la SCP Rouvière, Lepitre et Boutet, avocat de M. X..., de Me Blanc, avocat de M. Y... les conclusions de M. Curti, avocat général, et après en avoir délibéré conformément à la loi ;
Sur le moyen unique, pris en ses deux branches :
Attendu qu'il est fait grief à l'arrêt attaqué (Paris, 14 mars 1990) d'avoir prononcé à l'encontre de M. Bruno X..., président du conseil d'administration de la société anonyme Entreprise X... en liquidation des biens, l'interdiction de diriger, gérer, administrer ou contrôler toute personne morale, alors, selon le pourvoi, d'une part, que l'arrêt ne tire pas les conséquences légales de ses propres constatations ; que l'essor progressif de l'entreprise de M. Bruno X... de 1947 à 1985 n'ayant jamais été accompagné de défaillance financière, de faute de gestion ou de manquement personnel, et l'arrêt constatant lui-même que les difficultés rencontrées étaient liées à la défaillance d'un client et au ralentissement de l'activité du bâtiment, il ne pouvait être déduit de la seule existence du passif l'incompétence de M. X... ; que l'arrêt viole par là-même l'article 108 de la loi du 13 juillet 1967, et alors, d'autre part, que l'arrêt ne pouvait s'abstenir de répondre aux conclusions de M. X... faisant valoir que ses difficultés étaient dues, non seulement à la défaillance d'un client important, mais à l'interruption injustifiée des crédits consentis par sa Banque, la Société Générale, là se trouvant la véritable raison du passif puisqu'antérieurement jamais les engagements de la société n'avaient dépassé un mois de chiffre d'affaires violant l'article 455 du nouveau Code de procédure civile ;
Mais attendu que l'arrêt constate que dès 1971 M. Bruno X... a entrepris au delà de ses possibilités et a rencontré déjà en 1978 des difficultés sérieuses avec les banques liées au developpement excessif de son chiffre d'affaires ; qu'il relève que l'insuffisance de fonds propres et l'absence de trésorerie n'ont pas permis à l'entreprise très fragile de faire face aux difficultés rencontrées et qu'au contraire loin d'observer le comportement prudent que
celles-ci imposaient M. X... a intensifié et diversifié ses activités sans disposer des ressources correspondantes et en ayant perdu son crédit personnel ; qu'en l'état de ces constatations et
appréciations qui répondent aux conclusions invoquées, la cour d'appel n'a fait qu'user de son pouvoir souverain d'appréciation en retenant que ce dirigeant social avait fait preuve d'une incompétence manifeste ; d'où il suit que la cour d'appel a légalement justifié sa décision ; que le moyen n'est fondé en aucune de ses branches ;
PAR CES MOTIFS ;
REJETTE le pourvoi ;
! Condamne M. X..., envers M. Y..., aux dépens et aux frais d'exécution du présent arrêt ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de Cassation, Chambre commerciale, financière et économique, et prononcé par M. le président en son audience publique du trois mars mil neuf cent quatre vingt douze.