LA COUR DE CASSATION, TROISIEME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le pourvoi formé par :
1°) M. Polo XX...,
2°) Mme Polo XX...,
demeurant tous deux le Chalve C, rue Curie à Miramas (Bouches-du-Rhône),
en cassation d'un arrêt rendu le 19 octobre 1989 par la cour d'appel d'Aix-en-Provence (4e chambre, section A), au profit de :
1°) M. Roger Y...,
2°) Mme Antoinette Y..., son épouse, née Manovelli,
3°) M. XW...
X...,
4°) Mme Anne-Marie B...,
5°) M. Jean-Louis C...,
6°) M. T...,
7°) M. René, Guy V...
8°) Mme Suzanne O...,
9°) Mme Gladys R..., épouse N...
K...,
10°) M. Serge A...,
11°) M. René M...,
12°) M. Mario K...,
demeurant tous Le Chalve, rue Curie à Miramas (Bouches-du-Rhône),
défendeurs à la cassation ; Les demandeurs invoquent, à l'appui de leur pourvoi, trois moyens de cassation annexés au présent arrêt ; LA COUR, en l'audience publique du 21 janvier 1992, où étaient présents :
M. Senselme, président, M. Chevreau, conseiller rapporteur, MM. S..., D..., XY..., H..., Z..., G..., F..., Q...
L..., P...
J..., M. Chemin, conseillers, Mme E..., M. Chapron, conseillers référendaires, M. Sodini, avocat général, Mlle Jacomy, greffier de chambre ; Sur le rapport de M. le conseiller Chevreau, les observations de Me Roger, avocat des époux U...
XX..., de Me Blondel, avocat des époux Y... et K..., de M. X..., Mme B..., MM. C..., I..., V..., A..., M..., de Mme O... les conclusions de M. Sodini, avocat général, et après en avoir délibéré conformément à la loi ; Sur le premier moyen :
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Aix-en-Provence 19 octobre 1989), que les époux U...
XX..., propriétaires d'un appartement dans l'immeuble en copropriété dénommé "résidence le Chalve", y ayant ouvert un cabinet dentaire, douze
autres copropriétaires les ont assignés pour faire cesser cette activité comme étant prohibée par le réglement de copropriété ;
qu'en appel, le syndicat des copropriétaires s'est joint à cette demande ; Attendu que les époux U...
XX... font grief à l'arrêt de déclarer l'intervention du syndicat recevable, alors, selon le moyen, 1°) que l'intervenant volontaire en appel ne peut soutenir un litige nouveau, n'ayant pas subi l'épreuve du premier degré de juridiction ; que la cour d'appel ne pouvait sans violer cette règle et les articles 329 et suivants du nouveau Code de procédure civile, et 15 de la loi du 10 juillet 1965, déclarer que les copropriétaires étaient fondés à poursuivre la réparation de leur préjudice personnel résultant, selon elle, de l'atteinte à la jouissance des parties communes de l'immeuble, indépendamment de l'action collective présentement exercée, et pour la première fois en appel, par le syndicat, bien qu'aucune action de ce type n'ait été exercée par ledit syndicat en première instance et ne pouvait, dès lors, être exercée, par lui, pour la première fois en appel ; 2°) qu'en déclarant que le syndicat des copropriétaires, qui s'était borné à se joindre "à l'action engagée par les copropriétaires aux mêmes fins", avait entendu exercer l'action collective au sens de la loi régissant la copropriété, la cour d'appel a dénaturé les termes du litige et violé les articles 4 et 5 du nouveau Code de procédure civile ; 3°) qu'il appartient au syndic de faire la preuve des formalités lui incombant légalement ; qu'en énonçant que les époux U...
XX... n'établissaient pas que l'autorisation donnée au syndic d'ester en justice n'était pas régulière, la cour d'appel a renversé la charge de la preuve ; 4°) que les actions collectives tendant à faire assurer le respect du réglement de copropriété ne peuvent être exercées que par le syndicat ; qu'en décidant que cette action pouvait être exercée par les copropriétaires, la cour d'appel a violé l'article 15 de la loi du 10 juillet 1965 ; Mais attendu que le syndicat des copropriétaires ayant seulement déclaré joindre son action à celle des copropriétaires agissant individuellement, la cour d'appel, qui n'était pas tenue
de surseoir à statuer, a, sans modifier l'objet du litige, ni inverser la charge de la preuve, légalement justifié sa décision en retenant exactement que le changement apporté à la destination de l'appartement des époux Polo XX... portant atteinte à la jouissance des parties communes de l'immeuble, causait aux autres copropriétaires un préjudice personnel dont ils étaient fondés à poursuivre la réparation ; Sur les deuxième et troisième moyens, réunis :
Attendu que les époux U...
XX... font grief à l'arrêt d'ordonner la réaffectation de leur appartement à un usage d'habitation, alors, selon le moyen, 1°) que la contradiction entre les motifs d'une décision et son dispositif équivaut à une absence de motifs ; qu'en énonçant, dans les motifs de sa décision, que suivant l'acte
notarié du réglement de copropriété du ler juillet 1977, l'exercice de professions libérales était autorisé dans les appartements et, dans son dispositif, que suivant ce même acte, l'appartement des époux Polo XX... ne pouvait être utilisé à usage de cabinet de chirurgien-dentiste, la cour d'appel a violé l'article 455 du nouveau Code de procédure civile ; 2°) qu'il résulte de l'article 1319 du Code civil que l'acte authentique fait foi jusqu'à inscription de faux ; qu'il ne peut être prouvé contre et outre son contenu, conformément à l'article 1341 du même code ; qu'en faisant prévaloir les dispositions d'un acte sous seing privé, dont les mentions et la régularité étaient contestées, sur celles d'un acte authentique, la cour d'appel a violé les textes précités ; 3°) que la preuve de l'existence d'un mandat incombe à celui qui s'en prévaut ; qu'en reprochant à M. Polo XX... de ne pas apporter la preuve qu'il n'avait pas donné à son prétendu mandataire mandat de le représenter, la cour d'appel a violé les articles 1985 et 1315 du Code civil ; 4°) qu'il appartenait au syndic de faire la preuve des formalités lui incombant légalement ; qu'en énonçant que M. Polo XX... ne prouvait pas qu'il n'avait pas été régulièrement convoqué à l'assemblée générale litigieuse, la cour d'appel a violé les articles 1315 du Code civil et 42 de la loi du 10 juillet 1965 ; 5°)
qu'en application de l'article 8 de la loi du 10 juillet 1965, l'assemblée des copropriétaires ne pouvait apporter aux droits des copropriétaires que des restrictions justifiées par la destination de l'immeuble, ses caractères ou sa situation ; que la cour d'appel ne pouvait autoriser l'assemblée des copropriétaires à modifier le réglement de copropriété et interdire dorénavant l'exercice d'une activité professionnelle à titre libéral, sans préciser si cette modification était justifiée par un changement de la destination de l'immeuble, de ses caractères ou de sa situation et portait atteinte aux droits des autres copropriétaires, l'exercice d'activités commerciales étant, au surplus, autorisé, sans priver sa décision de base légale au regard de ce texte ; Mais attendu que la cour d'appel qui, sans se contredire, ni inverser la charge de la preuve, a retenu que les associés de la société civile "le Chalve" avaient décidé, lors d'une assemblée générale du 16 septembre 1977, antérieure à l'application du statut de la copropriété à l'immeuble, de modifier le réglement de copropriété pour stipuler que les appartements seraient exclusivement consacrés à l'habitation, cette résolution ayant été adoptée à l'unanimité, dont la voix de M. Polo XX... représenté par un mandataire, et relevé que, bien que cette délibération n'ait pas été intégrée au réglement par le notaire à qui elle avait, pourtant, été adressée à cette fin, M. Polo XX... ne saurait en invoquer tardivement la nullité, alors qu'il ne contestait pas avoir acquiescé
à toutes les autres décisions prises
par cette assemblée, qu'il n'avait pas argué de faux la feuille de présence attestant sa représentation par un mandataire et qu'il ne justifiait d'aucune mise en cause du représentant légal de la société, a par ces seuls motifs, légalement justifié sa décision ; PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi ;