AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, FINANCIERE ET ECONOMIQUE, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le pourvoi formé par la société anonyme Elf France, dont le siège est ... (Hauts-de-Seine),
en cassation d'un arrêt rendu le 29 novembre 1988 par la cour d'appel de Bordeaux (2ème chambre), au profit :
1°/ M. Y... Maurice, demeurant "Le Peuch", Saint-Bonnet Avalouze à Laguenne (Corrèze),
2°/ Mme Y... Monique, née Saure, demeurant ... (Gironde),
défendeurs à la cassation ;
La demanderesse invoque à l'appui de son pourvoi, les deux moyens de cassation annexés au présent arrêt :
LA COUR, composée selon l'article L. 131-6, alinéa 2, du Code de l'organisation judiciaire, en l'audience publique du 7 janvier 1992, où étaient présents : M. Bézard, président, Mme Clavery, conseiller rapporteur, M. Hatoux, conseiller, M. Jéol, avocat général, Mme Arnoux, greffier de chambre ;
Sur le rapport de Mme le conseiller Clavery, les observations de la SCP Delaporte et Briard, avocat de la société Elf France, de Me Jacoupy, avocat des époux Y..., les conclusions de M. Jéol, avocat général, et après en avoir délibéré conformément à la loi ;
Sur le premier moyen, pris en sa première branche :
Vu l'article 1134 du Code civil ;
Attendu, selon l'arrêt infirmatif attaqué que par actes sous seing privé du 23 février 1978, la société anonyme Elf (la société) a consenti aux époux Y..., un prêt et s'est également portée caution solidaire des autres prêts qui leur ont été consentis, qu'après cession de leur fonds de commerce à Mme X..., les vendeurs se sont engagés par avenant du 9 décembre 1983 à rester tenus des dettes de l'acquéreur aussi bien du remboursement des prêts que des débits comptables, tant que l'affectation hypothécaire de deux biens immobiliers par Mme X... n'aurait pas été acquise ; qu'en vertu de cette stipulation contractuelle la société a demandé aux époux Y... le remboursement des sommes qu'elle a dû payer pour le compte de l'acquéreur défaillant, les garanties consenties par Mme X... n'ayant jamais été constituées ;
Attendu que pour débouter la société de cette demande, la cour d'appel, après avoir constaté l'existence de la stipulation contractuelle du 9 décembre 1983, retient que cette société n'a justifié d'aucune diligence pour faire inscrire sa créance hypothécaire même après l'obtention de la créance subrogative, qu'elle disposait par ailleurs d'un
nantissement sur le fonds de commerce, que les époux Y... ne sauraient être tenus pour responsables de la mauvaise gestion de Mme X... et de la carence de
la société, qu'appliquer cette clause dès lors que les vendeurs n'avaient aucune possibilité de la faire respecter équivaudrait à leur faire payer deux fois le solde du prêt, puisque son montant a déjà été déduit du prix de vente du fonds ;
Attendu qu'en refusant l'application de l'avenant du
9 décembre 1983, dont les termes étaient clairs et précis, la cour d'appel a violé le texte susvisé ;
PAR CES MOTIFS, et sans qu'il soit besoin de statuer sur les autres griefs du pourvoi :
CASSE ET ANNULE, dans toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 29 novembre 1988, entre les parties, par la cour d'appel de Bordeaux ; remet, en conséquence, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Toulouse ;
Condamne les époux Y..., envers la société Elf France, aux dépens et aux frais d'exécution du présent arrêt ;
Ordonne qu'à la diligence de M. le procureur général près la Cour de Cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit sur les registres de la cour d'appel de Bordeaux, en marge ou à la suite de l'arrêt annulé ;