LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, en son audience publique tenue au Palais de Justice, à PARIS, le douze février mil neuf cent quatre vingt douze, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le rapport de M. le conseiller référendaire NIVOSE, les observations de la société civile professionnelle MASSE-DESSEN, GEORGES et THOUVENIN, avocat en la Cour, et les conclusions de M. l'avocat général AMIEL ;
Statuant sur le pourvoi formé par :
X... Jean-Pierre, K
contre l'arrêt de la cour d'assises de la GIRONDE, en date du 28 juin 1991, qui, pour viol aggravé, l'a condamné à 14 ans de réclusion criminelle, a ordonné la confusion de cette peine avec celle de 7 ans prononcée le 21 mars 1991 par cette même cour d'assises ainsi que la confiscation de l'arme saisie ;
Vu le mémoire produit ;
b
Sur le moyen unique de cassation pris de la violation des articles 313 et 593 du Code de procédure pénale, 56 du Code pénal, 6 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, ensemble violation des droits de la défense ;
"en ce qu'il résulte des énonciations du procès-verbal des débats qu'au cours de l'instruction à l'audience, le ministère public a versé aux débats des photocopies de procès-verbaux d'interrogatoire et le réquisitoire définitif extraits d'une procédure d'information suivie contre l'accusé du chef de viol commis sous la menace d'une arme, faits pour lesquels il a été jugé le 21 mars 1991 par la cour d'assises de la Gironde qui l'a condamné définitivement à la peine de sept années de réclusion criminelle ;
"alors que si les pièces d'une autre procédure peuvent, dans certaines limites et sous certaines conditions, être produites par le ministère public au cours des débats, la communication aux jurés des procès-verbaux et réquisitoire définitif d'une autre procédure, pour laquelle l'accusé a été définitivement condamné pour des faits identiques à ceux reprochés, est formellement prohibée lorsque l'accusé n'est pas en état de récidive selon les termes de l'article 56 du Code pénal ;
qu'en procédant ainsi, le ministère public a donc porté atteinte à l'objectivité des débats en présentant l'accusé aux jurés comme un récidiviste de sorte que les droits de la défense ont été méconnus" ; Attendu que le procès-verbal des débats mentionne qu'après la lecture de l'arrêt de renvoi le ministère public a produit aux débats diverses pièces extraites d'une procédure d'information suivie contre l'accusé du chef de viol aggravé, fait pour lequel l'intéressé a été condamné par la cour d'assises de la Gironde le 21 mars 1991 à la peine de sept ans de réclusion criminelle, devenue définitive ;
Que le même procès-verbal constate que l'ensemble de ces documents a été communiqué au conseil de la partie civile et à la défense qui n'a pas réclamé de délai et que le président a ensuite interrogé l'accusé et a reçu ses explications ;
Attendu qu'en cet état il n'en résulte aucune violation des textes visés au moyen ;
b Qu'en effet la parole du ministère public à l'audience est libre ; qu'il est indépendant dans l'exercice de ses fonctions ;
qu'il a le droit de dire tout ce qu'il croit convenable au bien de la justice, comme de produire tous les documents et de donner toutes les explications qui lui paraissent utiles, sauf le droit des parties en cause d'examiner les pièces produites et de combattre les arguments présentés par le ministère public ;
qu'ainsi c'est à tort que le moyen soutient qu'il a été porté atteinte aux droits de la défense ;
Que dès lors le moyen doit être écarté ;
Et attendu que la procédure est régulière et que la peine a été légalement appliquée aux faits déclarés constants par la Cour et le jury ;
REJETTE le pourvoi ;
Condamne le demandeur aux dépens ;
Ainsi jugé et prononcé par la Cour de Cassation, chambre criminelle, en son audience publique, les jour, mois et an que dessus ;
Où étaient présents :
M. Diémer conseiller le plus ancien faisant fonctions de président en remplacement du président empêché, M. Nivôse conseiller rapporteur, MM. Malibert, Guth, Guilloux, Massé, Fabre, Pinsseau, Jorda conseillers de la chambre, Mmes Batut, Ferrari, M. Echappé conseillers référendaires, M. Amiel avocat général, Mme Mazard greffier de chambre ;