AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE,
a rendu l'arrêt suivant :
Sur le pourvoi formé par M. Robert Z..., demeurant 21, lotissement Seguinie à Tresses (Gironde),
en cassation d'un arrêt rendu le 13 avril 1989 par la cour d'appel de Bordeaux (chambre sociale), au profit de la société Daribois menuiserie charpente, dont le siège est à Genisiat (Gironde), Brannes,
défenderesse à la cassation ;
LA COUR, composée selon l'article L. 131-6, alinéa 2, du Code de l'organisation judiciaire, en l'audience publique du 18 décembre 1991, où étaient présents : M. Cochard, président, M. Benhamou, conseiller rapporteur, M. Lecante, conseiller, M. Bonnet, conseiller référendaire, M. Chauvy, avocat général, M. Richard, greffier de chambre ;
Sur le rapport de M. le conseiller Benhamou, les observations de Me Guinard, avocat de M. Z..., de Me Choucroy, avocat de la société Daribois menuiserie charpente, les conclusions de M. Chauvy, avocat général, et après en avoir délibéré conformément à la loi ;
! Sur le moyen unique :
Attendu que, selon l'arrêt attaqué (Bordeaux, 13 avril 1989), M. Z... est entré au service de la société X... frères à compter du 3 mars 1980, en qualité de charpentier OHQ ; qu'à partir du 1er janvier 1985, son contrat de travail s'est poursuivi avec la société Daribois, qui avait remplacé la société X... frères ; que, le 28 mars 1985, le directeur de l'entreprise, M. X..., a convoqué son personnel pour une réunion extraordinaire, au cours de laquelle il devait être débattu de la fixation des congés et de problèmes concernant le fonctionnement de l'entreprise ; qu'au cours de la réunion s'est produite une vive discussion entre M. X... et M. Z... ; que, le 29 mars, M. X... a convoqué M. Z... à l'entretien préalable à son éventuel licenciement ; que le salarié n'ayant pas répondu à cette convocation, l'employeur lui a adressé le 4 avril une nouvelle convocation avec mise à pied ; que, par lettre du 10 avril 1985, la société Daribois a notifié à M. Z... son licenciement pour faute grave ;
Attendu que M. Z... fait grief à l'arrêt d'avoir, infirmant de ce chef la décision des premiers juges, dit que son licenciement reposait sur une cause réelle et sérieuse, alors, selon le pourvoi, qu'en déclarant le licenciement fondé au motif que, lors d'une réunion du personnel de chantier destinée à aborder les questions concernant le fonctionnement de l'entreprise, M. Z... avait critiqué la nomination d'un chef d'équipe et refusé de se taire, sans rechercher si l'objet d'une telle réunion n'était pas précisément de permettre une discussion libre, la cour d'appel, qui a constaté au surplus que l'attitude de M. Z... ne perturbait pas la bonne marche de l'entreprise, a privé sa décision de base légale au regard de l'article L. 122-14-4 du Code du travail ; et alors, en outre, qu'en constatant, d'une part, que l'attitude et les discussions de M. Z... ne caractérisaient pas le grief d'entrave à la bonne marche de l'entreprise, et en relevant, d'autre part, que la contestation par M. Z... de la nomination d'un chef d'équipe et son refus de se taire lors d'une réunion au cours de laquelle il
avait été frappé par son employeur, avaient suscité une mésentente ne permettant pas la poursuite des relations contractuelles, la cour d'appel a statué par des motifs contradictoires et violé l'article 455 du nouveau Code de procédure civile ;
Mais attendu, en premier lieu, que la cour d'appel ne s'est pas contredite en écartant, comme non caractérisé, le grief "d'entrave à la bonne marche de l'entreprise" fait au salarié et en retenant par contre les deux autres griefs invoqués par l'employeur au soutien de la mesure de licenciement intervenue ;
Attendu, en second lieu, que la cour d'appel a relevé qu'il ressortait du procès-verbal de l'enquête de gendarmerie diligentée à la suite de l'incident du 28 mars 1985 que, lors de la réunion du 28 mars, M. Z... avait, d'une part, contesté la nomination de M. Y... en qualité de chef d'équipe et avait, d'autre part, passé outre à l'ordre donné par son employeur de se taire en continuant à discuter dans un climat d'énervement total ; qu'en l'état de ces énonciations, les juges d'appel n'ont fait qu'user du pouvoir qu'ils tiennent de l'article L 122-14-3 du Code du travail, en décidant que le licenciement procédait d'une cause réelle et sérieuse ;
D'où il suit que le moyen n'est fondé en aucune de ses branches ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi ;
Condamne M. Robert Z..., envers la société Daribois menuiserie charpente, aux dépens et aux frais d'exécution du présent arrêt ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de Cassation, Chambre sociale, et prononcé par M. le président en son audience publique du douze février mil neuf cent quatre vingt douze.