LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE,
a rendu l'arrêt suivant :
Sur le pourvoi formé par M. Daniel Z..., demeurant ..., Les Roches de Condrieu (Isère),
en cassation d'un jugement rendu le 2 mars 1989 par le conseil de prud'hommes de Vienne (Section activités diverses), au profit de Mme Maryse X..., née Y..., demeurant La Sparterie, Les Roches de Condrieu (Isère),
défenderesse à la cassation ; LA COUR, composée selon l'article L. 131-6, alinéa 2, du Code de l'organisation judiciaire, en l'audience publique du 18 décembre 1991, où étaient présents :
M. Cochard, président, M. Benhamou, conseiller rapporteur, M. Lecante, conseiller, M. Bonnet, conseiller référendaire, M. Chauvy, avocat général, M. Richard, greffier de chambre ; Sur le rapport de M. le conseiller Benhamou, les observations de Me Jacoupy, avocat de Mme X..., les conclusions de M. Chauvy, avocat général, et après en avoir délibéré conformément à la loi ; Sur les deux premiers moyens réunis :
Attendu que, prétendant avoir été engagée en janvier 1988 en qualité de secrétaire à mi-temps par M. Z... et avoir démissionné le 27 septembre 1988 au motif que ce dernier n'avait pas répondu à sa lettre recommandée du 20 septembre par laquelle elle lui réclamait ses fiches de paie, le salaire du mois d'août et les congés payés, Mme X... a saisi la juridiction prud'homale d'une demande tendant à voir M. Z... condamné, d'une part, à lui payer diverses sommes à titre de salaires d'août et septembre 1988 et d'indemnité de congés payés et, d'autre part, à lui remettre, sous astreinte, un certificat de travail portant sur la période du 1er janvier au 30 septembre 1988 et des fiches de paie des mois de janvier à septembre 1988 ; Attendu que M. Z... fait grief au jugement attaqué d'avoir fait intégralement droit aux demandes de Mme X... sans que, d'une part, il ait pu présenter ses conclusions écrites sur le fond, le président ayant, à l'audience, informé les parties qu'aucune note ne serait admise, et sans que, d'autre part, le conseil de prud'hommes se fût prononcé sur la demande verbale par laquelle il l'avait prié d'ordonner, avant-dire droit sur le fond, la remise au greffe, aux fins de vérification, des originaux des pièces versées aux débats par Mme X..., qu'il avait déclarées être fausses ; que, dès lors, en statuant comme il l'a fait, le conseil de prud'hommes a violé l'article 6 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ainsi que les articles 14, 15 et 16 du nouveau Code de procédure civile ; Mais attendu, d'une part, que le conseil de prud'hommes n'a fait qu'user du pouvoir qu'il tient de l'article 134 du nouveau Code de procédure civile en rejetant les pièces du défendeur qui n'avaient
pas été communiquées dans les délais à la partie adverse et en décidant en conséquence d'entendre celui-ci en ses conclusions orales, dès lors que la procédure est orale en matière prud'homale ; Attendu, d'autre part, que le conseil de prud'hommes n'était pas tenu d'ordonner la mesure d'instruction sollicitée par M. Z... dès lors qu'il ne l'estimait pas utile à la manifestation de la vérité ; d'où il suit que les moyens ne sont pas fondés ; Sur les troisième, quatrième, cinquième, septième, huitième et neuvième moyens réunis :
Attendu que, sous le couvert de griefs non fondés de défaut et de contradiction de motifs, de manque de base légale et de violation des articles 7 du nouveau Code de procédure civile et L. 121-1 du Code du travail, les moyens ne tendent qu'à remettre en discussion les éléments de preuve dont la valeur et la portée ont été souverainement appréciés par les juges du fond et qui ont permis à ceux-ci de retenir, d'une part, que Mme X... avait travaillé sous la subordination de M. Z... et avait été liée à celui-ci par un contrat de travail du 1er janvier au 30 septembre 1988 et, d'autre part, qu'il était dû à l'intéressée ses salaires d'août et septembre 1988 ainsi que son indemnité de congés payés ; Mais sur le sixième moyen :
Vu les articles 5 de la loi du 5 juillet 1972 et 503 du nouveau Code de procédure civile ; Attendu que le premier de ces textes dispose que les tribunaux peuvent ordonner une astreinte pour assurer l'exécution de leurs décisions ; qu'aux termes du second texte, les jugements ne peuvent être exécutés contre ceux auxquels ils sont opposés qu'après leur avoir été notifiés ; qu'il en résulte que l'astreinte ne peut commencer à courir qu'à compter du jour où la décision qui l'ordonne a été notifiée à la partie contre laquelle elle est prononcée ; Que, dès lors, en condamnant M. Z... à remettre à Mme X... un certificat de travail et des fiches de paie, sous une astreinte commençant à courir le jour du prononcé du jugement, le conseil de prud'hommes a violé les textes susvisés ; Et attendu qu'il y a lieu, conformément à l'article 627, alinéa 2, du nouveau Code de procédure civile, de mettre fin au litige en appliquant la règle de droit appropriée ; PAR CES MOTIFS :
d CASSE ET ANNULE, mais seulement du chef de l'astreinte, le jugement rendu le 2 mars 1989, entre les parties, par le conseil de prud'hommes de Vienne ;
Dit n'y avoir lieu à renvoi ; Fixe à la date de notification du jugement du 2 mars 1989 à M. Z... le point de départ de l'astreinte ordonnée par ledit jugement ; Laisse à chaque partie la charge respective de ses propres dépens ; Ordonne qu'à la diligence de M. le procureur général près la Cour de Cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit sur les registres du conseil de prud'hommes de Vienne, en marge ou à la suite du jugement partiellement annulé ; Ainsi fait et jugé par la Cour de Cassation, Chambre sociale, et prononcé par M. le président en son audience publique du douze février mil neuf cent quatre vingt douze.