AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, en son audience publique tenue au Palais de Justice à PARIS, le dix février mil neuf cent quatre vingt douze, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le rapport de M. le conseiller référendaire de X... de MASSIAC, les observations de la société civile professionnelle BORE et XAVIER et de Me FOUSSARD, avocats en la Cour, et les conclusions de M. l'avocat général AMIEL ;
Statuant sur le pourvoi formé par :
Y... Patrick,
contre l'arrêt de la cour d'appel d'ORLEANS, chambre correctionnelle, en date du 10 décembre 1990 qui, pour fraudes fiscales, l'a condamné à 18 mois d'emprisonnement avec sursis et a prononcé sur les demandes de l'Administration, partie civile ;
Vu les mémoires en demande et en défense ;
Sur le moyen unique de cassation pris de la d violation des articles 1741, 1743 du Code général des impôts, de la loi des 16-24 août 1790 et 593 du Code de procédure pénale ;
"en ce que l'arrêt attaqué a déclaré Me Y... coupable de soustraction frauduleuse à l'établissement et au paiement de l'impôt sur le revenu et à la TVA et d'avoir sciemment omis de passer ou faire passer des écritures ou passé ou fait passer des écritures inexactes ou fictives dans les documents tenant lieu de comptabilité et l'a en conséquence condamné à une peine de dix-huit mois d'emprisonnement avec sursis ;
"aux motifs que la comptabilité du prévenu a été a juste raison considérée comme non probante par l'administration fiscale en raison de nombreuses omissions de recettes par chèques, d'erreurs commises concernant le montant des chèques encaissés ainsi que l'imputation comptable effectuée, la discordance figurant sur les relevés bancaires et ceux inscrits au journal général et la déduction de revenus non déductibles ; que le contrôle fiscal a révélé que Y... avait déclaré des déficits annuels alors que les exercices étaient bénéficiaires ; que le pourcentage de cette dissimulation est évalué par l'administration fiscale à 96 % ; que le caractère intentionnel des infractions constatées résulte de l'importance, de la réitération des dissimulations des recettes découvertes, de la connaissance qu'avait le prévenu des insuffisances de sa comptabilité et du dépôt habituellement tardif de ses déclarations fiscales ;
"alors que le juge répressif qui ne peut fonder l'existence de dissimulations volontaires de sommes sujettes à l'impôt et l'omission volontaire d'écritures dans les livres de la comptabilité sur les seules estimations que l'administration fiscale est amenée à faire selon ses propres procédures, doit préciser les éléments de preuve sur lesquels il fonde sa conviction ; qu'en se bornant à déclarer en l'espèce que l'administration fiscale avait considéré que la comptabilité du demandeur n'était pas probante et qu'elle avait évalué à 96 % la dissimulation des bénéfices, la cour d'appel a privé sa décision de base légale ;
"alors que le demandeur avait fait valoir dans ses conclusions d'appel que les erreurs qu'il reconnaissait avoir commises dans ses déclarations fiscales et dans la tenue de sa comptabilité résultaient d du traitement informatique de son ordinateur ; qu'en
se bornant à déclarer que le prévenu avait eu connaissance des insuffisances de sa comptabilité, la cour d'appel n'a pas caractérisé l'élément intentionnel des infractions reprochées au demandeur ; qu'en s'abstenant de rechercher dans quelle mesure le disfonctionnement de l'ordinateur litigieux n'avait pas induit en erreur le demandeur, la cour d'appel a privé sa décision de base légale" ;
Attendu que les énonciations de l'arrêt attaqué, partiellement reproduites au moyen, mettent la Cour de Cassation en mesure de s'assurer que la cour d'appel a caractérisé en tous ses éléments constitutifs, tant matériel qu'intentionnel les délits de fraudes fiscales reprochés ; que le moyen qui, sous couvert d'insuffisance de motifs et de défaut de réponse à conclusion remet en cause l'appréciation souveraine des juges des faits et circonstances de la cause, ne peut qu'être écarté ;
Et attendu que l'arrêt est régulier en la forme ;
REJETTE le pourvoi ;
Condamne le demandeur aux dépens ;
Ainsi jugé et prononcé par la Cour de Cassation, chambre criminelle, en son audience publique, les jour, mois et an que dessus ;
Où étaient présents : M. Tacchella conseiller doyen, faisant fonctions de président en remplacement du président empêché, M. de Mordant de Massiac conseiller rapporteur, MM. Souppe, Gondre, Hébrard, Hecquard, Culié, Pinsseau conseillers de la chambre, M. Bayet, Mmes Batut, Ferrari, M. Echappé conseillers référendaires, M. Amiel avocat général, Mme Gautier greffier de chambre ;
En foi de quoi le présent arrêt a été signé par le président, le rapporteur et le greffier de chambre ;