LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, en son audience publique tenue au Palais de Justice à PARIS, le vingtdeux janvier mil neuf cent quatre vingt douze, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le rapport de M. le conseiller référendaire NIVOSE, les observations de la société civile professionnelle WAQUET, FARGE et HAZAN, avocat en la Cour, et les conclusions de M. l'avocat général LIBOUBAN ; Statuant sur le pourvoi formé par :
Z... Bruno, K
contre l'arrêt de la cour d'assises du CHER, en date du 28 novembre 1990 qui, pour coups ou violences volontaires avec arme ayant entrainé une incapacité totale de travail personnel pendant plus de 8 jours, l'a condamné à 42 mois d'emprisonnement ; Vu le mémoire produit ; Sur le moyen unique de cassation pris de la violation de l'article 348 du Code de procédure pénale, d ensemble violation des droits de la défense et de l'article 6-3 a de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; "en ce que les questions posées à la Cour et au jury n'ont pas été lues par le président ; "alors que les questions doivent être lues lorsqu'elles ne sont pas posées dans les termes de l'arrêt de renvoi ; que Z... était renvoyé du chef de coups et blessures volontaires ayant entraîné la mort sans intention de la donner ; qu'il a été posé à la Cour et au jury la question (n° 10) qui n'a pas été lue et à laquelle il a été répondu affirmativement de savoir si Z... avait porté des coups et blessures ayant entraîné une incapacité du travail supérieure à huit jours, ce qui constituait une infraction différente de celle pour laquelle Z... avait été renvoyé ; que l'absence de lecture de cette question, dont l'accusé et son conseil ont ainsi ignoré qu'elle serait posée, a empêché tout débat contradictoire à propos de l'infraction dont Z... a été déclaré coupable, et a porté atteinte aux droits de la défense" ; Vu lesdits articles ; Attendu qu'il résulte de l'article 348 du Code de procédure pénale que la lecture des questions auxquelles la Cour et le jury auront à répondre est obligatoire, à moins que lesdites questions n'aient été posées dans les termes de l'arrêt de renvoi ou que l'accusé ou son défenseur aient renoncé à cette lecture ; Attendu, en l'espèce, que Bruno Z... a été renvoyé devant la cour d'assises pour y répondre du crime de coups ou violences volontaires
ayant entraîné la mort sans intention de la donner, avec l'aide ou sous la menace d'une arme ; Que, sur cette accusation, le président de la cour d'assises a posé quatre questions, demandant successivement, la première, si l'accusé était coupable d'avoir volontairement porté des coups ou commis des violences ou voies de fait sur la victime, la deuxième si ces coups ou violences volontaires avaient occasionné la mort de celle-ci, la troisième si ces coups ou violences volontaires avaient entrainé pour la victime une incapacité totale de travail personnel pendant plus de 8 jours, la quatrième, si les coups portés ou les d blessures faites spécifiés à la question précédente avaient été commis à l'aide ou sous la menace d'une arme ; Attendu que le procès-verbal des débats qui ne contient aucune mention relative à la position d'une question spéciale portant sur la durée de l'incapacité totale de travail personnel résultant des violences qualifiées à la question n° 1, se borne à constater que les questions posées étant conformes à l'arrêt de renvoi, il n'en serait pas donné lecture ; Mais attendu qu'en procédant ainsi, le président qui a modifié la substance de l'accusation telle qu'elle résultait de l'arrêt de renvoi a méconnu les dispositions légales et conventionnelles susvisées ; D'où il suit que la cassation est encourue ; Par ces motifs,
CASSE ET ANNULE l'arrêt de la cour d'assises du Cher, en date du 28 novembre 1990, en ses seules dispositions concernant Bruno Z..., toutes autres dispositions étant expréssement maintenues, et pour qu'il soit jugé à nouveau conformément à la loi, dans les termes de l'arrêt de renvoi ; RENVOIE la cause et les parties devant la cour d'assises de la Haute-Vienne, à ce désignée par délibération spéciale prise en chambre du conseil ; ORDONNE l'impression du présent arrêt, sa transcription sur les registres du greffe de la cour d'assises du Cher, sa mention en marge ou à la suite de l'arrêt annulé ; Ainsi jugé et prononcé par la Cour de Cassation, chambre criminelle, en son audience publique, les jour, mois et an que dessus ; Où étaient présents :
M. Le Gunehec président, M. Nivôse conseiller rapporteur, MM. Diémer, Malibert, Guth, Guilloux, Massé, Fabre, Pinsseau, Jorda conseillers de la chambre, Mmes X..., Y..., M. Echappé conseillers référendaires, M. Libouban avocat général, Mme Gautier greffier de chambre ;