AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, en son audience publique tenue au Palais de Justice, à PARIS, le huit janvier mil neuf cent quatre vingt douze, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le rapport de M. le conseiller DIEMER, les observations de Me JACOUPY, avocat en la Cour, et les conclusions de M. l'avocat général GALAND ;
Statuant sur les pourvois formés par :
X... Ludger,
contre 1°/ l'arrêt de la cour d'assises de la HAUTE-GARONNE en date du 6 décembre 1990 qui, pour viols commis en état de récidive légale et délit connexe de violation de domicile, l'a condamné à 15 ans de réclusion criminelle,
2°/ l'arrêt incident rendu au cours des débats,
3°/ l'arrêt du même jour par lequel la cour a prononcé sur les intérêts civils ;
d Joignant les pourvois en raison de la connexité ;
Vu le mémoire personnel et le mémoire ampliatif produits ;
Sur le premier moyen de cassation proposé par X... pris de la violation de la loi 85-699 du 11 juillet 1985 tendant à la constitution d'archives auditionnelles de la justice, pour "omission de décision, manque de base légale, défaut de motif, refus de décider" ;
Attendu que Ludger X... reproche au premier président de la cour d'appel de Toulouse de n'avoir pas répondu à sa demande d'enregistrement audiovisuel de l'audience au cours de laquelle il devait être jugé ;
Attendu que le contentieux de l'enregistrement d'une audience, réglementé par les articles 1 à 7 du décret n° 86-74 du 15 janvier 1986, est sans incidence sur la validité de la procédure pénale ;
Que, dès lors, le moyen est irrecevable ;
Sur le deuxième moyen de cassation proposé par X..., pris de la violation des articles 305-1, 315, 316, 593 alinéa 2 et 646 du Code de procédure pénale, refus de statuer sur des conclusions, manque de base légale, défaut de motifs ;
Attendu que l'accusé soutient que dès le jury de jugement constitué, il aurait déposé sur le bureau de la Cour des conclusions soulevant des exceptions tirées de "faux incidents" mais que le président les lui aurait restituées sans que la cour se prononçât sur leur bien-fondé ;
Attendu que le procès-verbal des débats régulièrement dressé et signé du président et du greffier et qui fait foi jusqu'à inscription de faux, ne contient aucune mention qui soit relative à un tel incident dont l'existence aurait dû être constatée d'office ou à la demande de la défense s'il s'était effectivement produit ;
Qu'il constate au contraire que le 6 décembre 1990, à la fin de l'instruction à l'audience, X... a déposé des conclusions auxquelles la Cour a b répondu par un arrêt incident qui fait l'objet des 5°, 6°, 7° et 8° moyens du demandeur ;
Que, dès lors, les faits prétendus qui tendent à établir une violation des droits de la défense, demeurent à l'état de simples allégations ;
D'où il suit que le moyen ne peut être recevable ;
Sur le troisième moyen de cassation proposé par X... pris de la violation de l'article 341 du Code de procédure pénale et de l'arrêt de cassation du 22 novembre 1956 D. 1957-89, refus de présentation de pièces sous-main de justice, manque de base légale, défaut de motifs, refus d'ouverture de scellé fermé provisoire ;
Attendu que le moyen, en ce qu'il fait état de prétendues irrégularités de la procédure d'instruction est irrecevable en application de l'article 594 du Code de procédure pénale ; qu'en ce qu'il reproche au président de la cour d'assises avoir refusé à l'accusé la présentation de documents placés sous-main de justice, il n'est pas fondé, le procès-verbal des débats constatant sans observation des parties que "les pièces à conviction ont été présentées chaque fois que cela a paru nécessaire" ;
Qu'ainsi le moyen doit être écarté ;
Sur le quatrième moyen de cassation proposé par X..., pris de la violation des articles 547 alinéa 2 et 370 du Code de procédure pénale, déclaration abusive, constatation et appréciation illégales, manque de base légale, défaut de motifs ;
Attendu que X... fait valoir qu'après la clôture des débats le président aurait résumé les moyens de sa défense en annonçant à son conseil que "l'arrêt incident sera examiné en même temps que le pourvoi contre l'arrêt de jugement" manifestant ainsi son opinion sur sa culpabilité alors qu'il plaidait l'acquittement ;
Attendu que faute de constatation au procès-verbal, d'office ou à la demande de la défense, le fait prétendu demeure à l'état de simple allégation ;
Qu'en conséquence le moyen doit être rejeté ;
d Sur les cinquième, sixième, septième et huitième moyens de cassation proposés par X... et pris de la violation des articles 145, 146, 148, 160, 173, 254 et 255 du Code pénal, 305-1, 315, 316, 600 et 646 du Code de procédure pénale, méconnaissance des textes, manque de base légale, défaut de motifs, méconnaissance du rattachement à l'instance principale de la nature, du caractère des pièces arguées de faux et portant le cinquième moyen sur deux certificats médicaux concernant Dominique Y..., le sixième sur les procès-verbaux de gendarmerie D 1, D 4, D 5, le septième sur le procès-verbal de synthèse de la gendarmerie D 4, le huitième sur plusieurs clichés du dossier photographique D 3 ;
Et sur le moyen unique de cassation proposé par l'avocat en la Cour et pris de la violation des articles 591, 593 et 646 du Code de procédure pénale ;
"en ce que la Cour a rejeté les conclusions de l'accusé tendant à faire déclarer fausses plusieurs pièces de la procédure pénale, et a ordonné qu'il serait passé outre aux débats ;
"aux motifs qu'il apparaît "à la lumière des débats, après audition d'un expert, des témoins acquis aux débats et de la partie civile et au vu des résultats de l'instruction orale à laquelle il a été procédé, que les faits sur lesquels reposent les faux allégués ne sont pas de nature à exercer une influence sur la solution du procès" ;
"alors qu'en s'abstenant de préciser quels étaient "les faits sur lesquels reposent les faux allégués", et partant en ne mettant pas la Cour de Cassation en mesure de s'assurer qu'ils étaient étrangers aux crimes reprochés à l'accusé et ne pouvaient donc exercer une
influence sur l'issue de la procédure pénale, la Cour n'a pas donné de base légale à sa décision" ;
Les moyens étant réunis ;
Attendu que le procès-verbal des débats constate qu'à la fin de l'instruction à l'audience, X... a déposé sur le bureau de la Cour quatre jeux de conclusions dans lesquelles il argue de faux deux certificats médicaux, trois procès-verbaux de gendarmerie, le rapport de synthèse de l'enquête préliminaire ainsi que plusieurs clichés du dossier photographique ; d
Attendu que la Cour, après audition des parties et l'accusé ayant eu la parole en dernier, a par arrêt incident inséré au procès-verbal, rejeté lesdites conclusions tendant à faire déclarer fausses les pièces critiquées ;
Qu'au soutien de sa décision, après avoir relevé que l'accusé ne sollicite qu'un sursis à statuer sur le renvoi de l'affaire alors qu'il n'apparaît pas qu'il ait formalisé une quelconque inscription de faux, elle énonce les motifs exactement reproduits dans le moyen ;
Attendu que par cette appréciation souveraine la Cour a justifié sa décision ;
Que les moyens s'avèrent ainsi sans fondement ;
Et attendu qu'aucun moyen n'est produit contre l'arrêt civil, que la procédure est régulière et que la peine a été légalement appliquée aux faits déclarés constants par la Cour et le jury ;
REJETTE les pourvois ;
Condamne le demandeur aux dépens ;
Ainsi jugé et prononcé par la Cour de Cassation, chambre criminelle, en son audience publique, les jour, mois et an que dessus ;
Où étaient présents : M. Le Gunehec président, M. Diémer conseiller rapporteur, MM. Malibert, Guilloux, Massé, Fabre, Pinsseau, Jorda conseillers de la chambre, M. Nivôse conseiller référendaire, M. Galand avocat général, Mme Ely greffier de chambre ;