LA COUR DE CASSATION, PREMIERE CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le pourvoi formé par M. Jean-Philippe X...,
en cassation d'un arrêt rendu le 28 février 1989 par la cour d'appel de Chambéry, au profit :
1°) de Mme Josette, Christiane, Denise Y..., agissant tant en son nom personnel qu'en qualité d'administratrice légale sous contrôle judiciaire de son enfant mineur Jean-Christophe X..., et autres, défenderesses à la cassation ;
Le demandeur invoque, à l'appui de son pourvoi, les deux moyens de cassation annexés au présent arrêt ;
LA COUR, composée selon l'article L. 131-6, alinéa 2, du Code de l'organisation judiciaire, en l'audience publique du 19 novembre 1991, où étaient présents :
M. Massip, conseiller doyen faisant fonctions de président, M. Bernard de Saint-Affrique, conseiller rapporteur, M. Grégoire, conseiller, Mme Flipo, avocat général, Mlle Ydrac, greffier de chambre ;
Sur le rapport de M. le conseiller Bernard de Saint-Affrique, les observations de la SCP Lesourd et Baudin, avocat de M. X..., les conclusions de Mme Flipo, avocat général, et après en avoir délibéré conformément à la loi ;
Donne défaut contre Mme Josette Y... agissant tant en son nom personnel qu'en qualité d'administratrice légale des biens de Jean-Christophe X..., son fils mineur, Mlle Chrystel X..., et Mme E... ;
Sur le premier moyen :
Vu l'article 808 du nouveau Code de procédure civile ;
Attendu que Jean-Michel X... est décédé le 13 janvier 1987 après le prononcé de son divorce avec Mme Y... par jugement du 25 septembre 1986 ;
qu'il a laissé pour lui succéder, son fils Philippe, né d'un premier mariage, ainsi que deux enfants, issus de son union avec Mme Y..., et institués par lui légataires universels suivant testament olographe du 26 décembre 1973 ;
que par actes des 1er avril et 7 mai 1987 M. Philippe X... a introduit une action pour qu'il soit statué sur la validité et, le
cas échéant, sur la révocation d'une donation, faite par son père à Mme Y..., par acte notarié du 14 mars 1980 et acceptée par celle-ci le 5 mai 1987, avec option, selon l'arrêt attaqué, pour l'usufruit de l'intégralité des biens composant la succession ;
que concomitamment deux instances en référé ont opposé M. Philippe X... et Mme Y..., sur le prélèvement immédiat par cette dernière de tous les revenus successoraux ;
que par un arrêt du 15 février 1988, la cour d'appel de Chambéry a admis qu'en raison de la libéralité entre époux dont bénéficiait Mme Y..., celle-ci pourrait percevoir du notaire désigné pour liquider la succession de Jean-Michel X..., l'intégralité des revenus des biens la composant ;
que cette décision a été cassée par un arrêt du 19 décembre 1989, pour avoir prescrit, en référé, une mesure se heurtant à une contestation sérieuse, sur la validité de la donation entre époux dont Mme Y... était bénéficiaire ;
qu'à l'occasion d'une troisième instance en référé ayant opposé les parties à la cause, Mme X... a, de nouveau, demandé que lui soit remise, l'intégralité des revenus successoraux ;
que la cour d'appel, se prévalant de son précédent arrêt du 15 février 1988 a accueilli cette demande, en retenant que l'intéressée était en droit de bénéficier de la donation contestée, qui lui avait été faite le 14 mars 1980, jusqu'à ce qu'intervienne une décision de justice, ayant force de chose jugée, qui remette en cause cette libéralité ;
Attendu qu'en se déterminant ainsi, sans rechercher si la mesure sollicitée ne se heurtait pas à une contestation sérieuse, la cour d'appel, statuant en matière de référé, n'a pas donné de base légale à sa décision ;
Et attendu que la cassation à intervenir de ce chef rend inopérant le second moyen ;
PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur le second moyen :
CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il a dit que les sommes qui seront mises par le notaire à la disposition de Mme Y... pourront porter sur la totalité des revenus de la succession de Jean-Michel X..., l'arrêt rendu le 28 février 1989, entre les parties, par la cour d'appel de Chambéry ;
remet, en conséquence, quant à ce, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Grenoble ;
Condamne les défendeurs, envers M. X..., aux dépens liquidés à la somme de neuf cent quatre vingt un francs quatre vingt dix sept centimes et aux frais d'exécution du présent arrêt ;
Ordonne qu'à la diligence de M. le procureur général près la Cour de Cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit sur les
registres de la cour d'appel de Chambéry, en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement annulé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de Cassation, Première chambre civile, et prononcé par M. le président en son audience publique du sept janvier mil neuf cent quatre vingt douze.