AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
LA COUR DE CASSATION, PREMIERE CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le pourvoi formé par M. Michel, Théophile, Jean B..., demeurant "Le Cadran Solaire", chemin d'Aubray, à Villecresnes (Val-deMarne),
en cassation d'un arrêt rendu le 28 octobre 1988 par la cour d'appel de Paris (25ème chambre section B), au profit :
1°) de la société civile de moyens "Radiologie Médicale", dont le siège est ..., à Brie-Comte-Robert (Seine-et-Marne),
2°) de M. Claude, Gérard X..., demeurant ..., à Sucy-en-Brie (Val-de-Marne),
3°) de Mme Elisabeth, Marie Z... de Saint-Cyr, demeurant ... (15ème),
4°) de M. Jean-Philippe A..., demeurant ..., à Champigny-sur-Marne,
5°) de M. Jean-François Y..., demeurant ... (Seine-et-Marne),
défendeurs à la cassation ;
Le demandeur invoque, à l'appui de son pourvoi, le moyen unique de cassation annexé au présent arrêt ;
LA COUR, composée selon l'article L. 131-6, alinéa 2, du Code de l'organisation judiciaire, en l'audience publique du 19 novembre 1991, où étaient présents : M. Massip, conseiller doyen faisant fonctions de président, M. Grégoire, conseiller rapporteur, M. Bernard de Saint-Affrique, conseiller, Mme Flipo, avocat général, Mlle Ydrac, greffier de chambre ;
Sur le rapport de M. le conseiller Grégoire, les observations de Me Ravanel, avocat de M. B..., de la SCP Piwnica et Molinié, avocat de la société civile de moyens "Radiologie Médicale" et de MM. X..., Z... de Saint-Cyr, A... et Y..., les conclusions de Mme Flipo, avocat général, et après en avoir délibéré conformément à la loi ;
Sur le moyen unique, pris en ses deux branches :
Attendu, selon les énonciations des juges du fond, qu'en janvier 1984, les docteurs en médecine Claude X..., Elizabeth Z... de Saint-Cyr, Jean-Claude A... et Michel B... ont constitué entre eux une société civile de moyens dite "Radiologie Médicale" (la société) ; que l'article 15 des statuts, inséré au titre IV traitant de la "gérance de la société", stipulait que, lorsque les assemblées générales étaient appelées à délibérer sur la modification des statuts, l'évaluation des parts sociales, la cession des parts sociales et l'agrément de nouveaux associés, les résolutions devaient réunir, pour être adoptées, les trois quart des avis ; que l'article 24 de ces statuts, inséré au titre VII traitant de la "Cession de parts", stipulait que l'admission de nouveaux membres dans la société était
soumise à l'agrément de tous les associés par un vote émis à l'unanimité ; que la question de l'admission d'un nouvel associé, le docteur Jean François Y..., ayant été posée par les associés X..., Cornette de Saint-Cyr et A... ceux-ci ont le 17 mai 1984, mis en demeure M. B..., qui était alors gérant de la société, de convoquer l'assemblée générale annuelle afin de
délibérer sur la nomination du gérant pour l'exercice 1984, sur la modification de l'article 24 des statuts "entaché d'une erreur matérielle" lors de la rédaction d'origine de ces textes, de telle sorte que l'admission d'un nouveau membre de la société puisse être obtenue conformément aux dispositions de l'article 15, c'est-à-dire par un vote à la majorité des trois quarts des voix, et sur l'agrément du docteur Y... comme nouvel associé ; que M. B..., qui, au cours de l'assemblée générale du 28 juin 1984, s'était opposé à l'admission d'un cinquième associé, a établi un procès-verbal constatant que les quatrième et cinquième résolutions relatives à la modification de l'article 24 des statuts et à l'agrément de M. Y..., n'étaient pas adoptées, faute d'un vote unanime des associés ; que M. X..., nommé comme nouveau gérant pour une durée de un an, au cours de cette assemblée, a établi, de la réunion de celle-ci un autre procès-verbal constatant que les quatrième et cinquième résolutions étaient adoptées "par trois voix, pour, une voix contre", de même que la résolution concernant les cessions de parts faites au profit de M. Y... et la nouvelle répartition des parts sociales en résultant ; que M. B... a assigné la société, ses trois co-associés et M. Y... aux fins de déclarer irrégulier l'agrément de ce dernier faute d'avoir été obtenu à l'unanimité des votes et de prononcer la nullité de la cession de parts consentie à M. Y... par M. X..., Mme Z... de Saint-Cyr et M. A... ;
Attendu que M. B... reproche à l'arrêt infirmatif attaqué (Paris, 28 octobre 1988) de l'avoir débouté de ses demandes, alors, selon le moyen, d'une part, que la convocation de l'assemblée générale du 28 juin 1986 n'avait été faite qu'en vertu d'une mise
en demeure que ses trois co-associés lui avaient adressée le 17 mai 1984, que c'est cette mise en demeure qui fixait l'ordre du jour et qu'en affirmant qu'avec ses associés, il était d'accord pour mettre en cause l'erreur matérielle affectant prétendument l'article 24 des statuts, la cour d'appel a dénaturé cette mise en demeure ; et alors, d'autre part, que les juges du second degré ne pouvaient résoudre la contradiction entre les articles 24 et 15 des statuts sans l'apprécier au regard, en premier lieu, de celle existant entre cet article 15 et de nombreux autres articles des statuts stipulant, la nécessité de l'unanimité des votants, et, en second lieu, de l'intuitu personae qui présidait aux rapports entre les associés et ne pouvait permettre que l'un d'eux fût à la merci des trois autres ;
Mais attendu que c'est par une interprétation souveraine et hors de toute dénaturation que la cour d'appel a estimé que lors de la réunion de l'assemblée générale du 28 juin 1984 à la commune intention des quatre associés avait été de mettre les dispositions de l'article 24 en conformité avec celle de l'article 15, c'est-à-dire de substituer la règle de l'unanimité celle de la majorité des trois quarts des voix pour l'admission d'un nouvel associé ;
Attendu, ensuite que c'est également par une interprétation des articles 15 et 24, rendue nécessaire par l'ambiguïté résultant de la contradiction de leurs énonciations, que la cour d'appel a souverainement décidé que, dès lors que les associés étaient convenus de l'existence d'une erreur matérielle affectant
l'article 24, celui-ci avait été régulièrement modifié à la majorité des trois quarts des voix, peu important les énonciations des autres articles des statuts prévoyant un vote à l'unanimité ; qu'elle a ainsi légalement justifié sa décison ;
D'où il suit que le moyen n'est fondé en aucune de ses deux branches ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi ;
! Condamne M. B..., envers les défendeurs, aux dépens et aux frais d'exécution du présent arrêt ;