AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
LA COUR DE CASSATION, TROISIEME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le pourvoi formé par
1°) la commune de Villarembert le Y... (Savoie), prise en la personne de son maire en exercice,
2°) M. Germain C..., demeurant à Villarembert (Savoie),
en cassation d'un arrêt rendu le 21 novembre 1989 par la cour d'appel de Chambéry (1e section), au profit de :
1°) la SMABTP, compagnie d'assurances dont le siège est ...,
2°) M. Z..., successeur de Me A..., décédé, agissant en qualité de syndic de la liquidation des biens de la société Icare, dont le siège social était ..., demeurant ... (6ème),
3°) M. Jean-Claude X..., architecte, demeurant ... (16ème),
4°) le bureau d'études Uteba, dont le siège est ... (Val-de-Marne),
défendeurs à la cassation ;
La demanderesse invoque, à l'appui de son pourvoi, le moyen unique de cassation annexé au présent arrêt ;
LA COUR, en l'audience publique du 14 novembre 1991, où étaient présents : M. Senselme, président, M. Beauvois, conseiller rapporteur, MM. Vaissette, Valdès, Peyre, Darbon, Mlle Fossereau, M. Chemin, M. Boscheron, conseillers, M. Chollet, M. Chapron, M. Pronier, conseillers référendaires, M. Mourier, avocat général, Mme Pacanowski, greffier de chambre ;
Sur le rapport de M. le conseiller Beauvois, les observations de Me Guinard, avocat de la commune de Villarembert le Y... et de M. B..., de Me Choucroy, avocat de la SMABTP, de Me Copper-Royer, avocat de M. Z... ès qualités, les conclusions de M. Mourier, avocat général, et après en avoir délibéré conformément à la loi ;
Sur le moyen unique :
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Chambéry, 21 novembre 1989), que la commune de Villarembert et M. B..., agissant en qualité de co-propriétaires d'un immeuble, ont, en février 1984, assigné en réparation de désordres ayant fait, lors de la réception du 15 décembre 1979, l'objet de réserves non levées par la suite, les administrateurs au règlement judiciaire de la société Icare, qui avait réalisé l'étanchéité, et son assureur, la société mutuelle d'assurance du bâtiment et des travaux publics (SMABTP), ainsi que le bureau d'études UTEBA, chargé d'une mission de maîtrise d'oeuvre ;
Attendu que la commune de Villarembert et M. B... font grief à l'arrêt de les avoir déboutés de leur action, alors, selon le moyen, "1) que le juge tranche le litige conformément aux règles de droit qui lui sont applicables et doit donner ou restituer leur exacte qualification aux faits et actes litigieux sans s'arrêter à la dénomination que les parties auraient proposée ; qu'après avoir constaté que les désordres affectant l'étanchéité de l'immeuble provenaient d'une faute de conception du bureau d'études UTEBA et de fautes d'exécution de l'entreprise ICARE, la cour d'appel, pour débouter les maîtres de l'ouvrage de leur action en réparation des
désordres, a énoncé que seule l'action en responsabilité contractuelle était possible, l'action en garantie instituée par les articles 1792 et 2270 du Code civil étant prescrite (sic) ; qu'en rejetant ainsi la demande des maîtres de l'ouvrage, sans se prononcer sur la responsabilité contractuelle des constructeurs, qu'elle déclarait applicable, la cour d'appel a violé l'article 12, alinéas 1 et 2, du nouveau Code de procédure civile ; 2) que dans leurs conclusions (signifiées le 14 décembre 1987), les maîtres de l'ouvrage se prévalaient tout à la fois de la recevabilité de leur action sur le fondement de la garantie décennale, d'une part, et des fautes de conception et d'exécution commises par les sociétés UTEBA et ICARE, à l'origine du dommage, d'autre part, de sorte que leur action était fondée, non seulement sur les articles 1792 et 2270 du Code civil, mais également sur la responsabilité de droit commun des constructeurs ; qu'en rejetant la demande des maîtres de l'ouvrage au motif que leur action était uniquement fondée sur la présomption de responsabilité édictée par les articles 1792 et 2270 du Code civil, la cour d'appel a dénaturé ces conclusions et violé l'article 1134 du Code civil" ;
Mais attendu qu'ayant souverainement retenu, par une interprétation nécessaire, exclusive de dénaturation, des conclusions ambiguës, que l'action de la commune de Villarembert et de M. B... était fondée uniquement sur la présomption de responsabilité édictée par les articles 1792 et 2270 du Code civil, la cour d'appel n'était pas tenue de rechercher d'office les dispositions légales de nature à justifier la demande ;
D'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi ;
Condamne la commune de Villarembert le Y... et M. B..., envers les défendeurs, aux dépens et aux frais d'exécution du présent arrêt ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de Cassation, Troisième chambre civile, et prononcé par M. le président en son audience publique du onze décembre mil neuf cent quatre vingt onze.