LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, en son audience publique tenue au Palais de Justice à PARIS, le huit avril mil neuf cent quatre vingt onze, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le rapport de M. le conseiller HEBRARD , les observations de Me ODENT, de Me FOUSSARD et de Me PARMENTIER, avocats en la Cour, et les conclusions de M. l'avocat général PERFETTI ; Statuant sur le pourvoi formé par :
MARCHAND Maurice,
contre l'arrêt de la cour d'appel de BORDEAUX, chambre correctionnelle, en date du 30 novembre 1988 qui, pour fraude en matière de produits et mise en vente de vins sous une appellation d'origine inexacte, l'a condamné à un an d'emprisonnement avec sursis et 10 000 francs d'amende, a ordonné la publication de la décision et prononcé sur les réparations civiles, et qui, pour trois infractions en matière de contributions indirectes, a d prononcé sur les demandes de l'administration des Impôts, partie poursuivante ; Vu les mémoires produits en demande et en défense ; I. Sur l'action publique ; Attendu que Maurice B... est décédé le 9 mars 1989 ; Qu'il s'ensuit que l'action publique exercée des chefs de fraude sur des produits et de mise en vente de vins sous une appellation d'origine inexacte est éteinte ; II. Sur les actions civiles exercées par l'Institut national des appellations d'origine et par la Ligue des viticulteurs de la Gironde ; Attendu que nonobstant le décès du prévenu au cours de l'instance, la Cour de Cassation demeure compétente pour statuer sur les actions civiles qui ont été exercées contre lui ; Attendu qu'aucun moyen tendant à remettre en cause les réparations allouées aux parties civiles n'est produit à l'appui du pourvoi ; III. Sur l'action de l'administration des Impôts, partie poursuivante ; Attendu qu'en raison du décès du demandeur, l'action de l'administration des Impôts exercée en matière de contributions indirectes est éteinte, mais seulement en ce qui concerne les trois amendes fiscales de 1 000 francs chacune qui ont été prononcées contre lui des chefs de fausse déclaration de récolte, d'exercice de l'activité de marchand de vins en gros et de mise en circulation de vins sous couvert de titres de mouvement inapplicables ; Vu le mémoire produit au nom de Huguette C..., veuve B..., de
Bruno et d'Olivier B..., héritiers du demandeur, lesquels ont repris l'instance ; Sur le moyen unique de cassation pris de la violation des articles 485, 591 et 593 du Code de procédure pénale, défaut et contradiction de motifs ; "en ce que l'arrêt attaqué a condamné Marchand d à payer une pénalité proportionnelle de 598 000 francs et la somme de 350 000 francs à titre de confiscation pour la fausse déclaration de récolte 1986, une pénalité proportionnelle de 495 francs et la somme de 50 000 francs à titre de confiscation pour exercice du commerce de gros des vins sans déclaration, une pénalité proportionnelle de 3 558,72 francs et une somme de 200 000 francs à titre de confiscation pour avoir laissé enlever et mis en circulation du vin sous couvert de titres de circulation inapplicables ; "aux motif que le prévenu n'ayant jamais été condamné, il convient de lui faire application des circonstances atténuantes conformément à l'article 1800 du Code général des impôts, les condamnations seront en conséquence, fixées à la moitié de la somme servant de base au calcul de la pénalité proportionnelle, le montant de cette valeur étant fixé à 598 000 francs, on aboutit à 598 000 :
2 = 299 000 francs ; "alors que lorsque le montant d'une condamnation à des dommagesintérêts est évalué dans le dispositif d'une décision à un chiffre différent de celui auquel cette évaluation a été faite dans les motifs de la même décision, il y a entre ces motifs et le dispositif une contradiction qui équivaut à un défaut de motifs de nature à entraîner la cassation" ; Vu lesdits articles, ensemble l'article 1800 du Code général des impôts ; Attendu que, selon l'article 1800 du Code général des impôts, en matière de contributions indirectes et par application de l'article 463 du Code pénal, si les circonstances paraissent atténuantes, les tribunaux sont autorisés à modérer le montant des condamnations pécuniaires ; Attendu qu'après avoir déclaré Maurice B... coupable, notamment, de fausse déclaration de récolte, dit qu'il y avait en la cause des circonstances atténuantes et que, par voie de conséquence, les pénalités proportionnelles édictées par l'article 1794 3° du Code général des impôts seraient ramenées à la moitié des sommes servant de base à leur calcul, l'arrêt attaqué, qui a évalué à 598 000 francs le montant des marchandises de fraude, a condamné le prévenu au paiement de cette somme ; Mais attendu qu'en prononçant ainsi, et alors que la pénalité ainsi réduite de moitié était de d 299 000 francs, la cour d'appel a méconnu les textes ci-dessus rappelés ;
Qu'il s'ensuit que la cassation est encourue de ce chef ; Par ces motifs,
Déclare éteinte l'action publique ; REJETTE le pourvoi au regard des actions civiles exercées par l'INAO et la Ligue des viticulteurs de la Gironde ; DECLARE l'action de l'administration des Impôts éteinte en ce qui concerne les trois amendes fiscales de 1 000 francs chacune prononcées contre le demandeur ; CASSE et ANNULE sans renvoi l'arrêt de la cour d'appel de Bordeaux en date du 30 novembre 1988, mais seulement en celles de ses dispositions par lesquelles il a été prononcé contre Marchand, du chef de fausse déclaration de récolte, une pénalité proportionnelle de 598 000 francs ; Et vu l'article L. 131-5 du Code de l'organisation judiciaire ; Attendu que les faits, tels qu'ils ont été souverainement constatés et appréciés par les juges du fond permettent à la Cour de Cassation d'appliquer la règle de droit appropriée ; Fixe à 299 000 francs la pénalité proportionnelle afférant au délit fiscal de fausse déclaration de récolte retenu contre Marchand ; ORDONNE l'impression du présent arrêt, sa transcription sur les registres du greffe de la cour d'appel de Bordeaux, sa mention en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement annulé ; Ainsi jugé et prononcé par la Cour de Cassation, chambre criminelle, en son audience publique, les jour, mois et an que dessus ; Où étaient présents :
M. Tacchella conseiller le plus ancien faisant fonctions de président en remplacement du président empêché, M. Hébrard conseiller rapporteur, MM. D..., Z..., A..., Y... d conseillers de la chambre, MM. X..., de Mordant de Massiac conseillers référendaires, M. Perfetti avocat général, Mme Gautier greffier de chambre ; En foi de quoi le présent arrêt a été signé par le président, le rapporteur et le greffier de chambre ;