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10/01/1991 | FRANCE | N°88-43598

France | France, Cour de cassation, Chambre sociale, 10 janvier 1991, 88-43598


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE,

a rendu l'arrêt suivant :

Sur les pourvois formés par la société anonyme Cominak, dont le siège social est ... à Vélizy-Villacoublay (Yvelines),

en cassation de trois arrêts rendus le 17 mai 1988 par la cour d'appel de Versailles (11e chambre sociale), au profit de :

1°/ M. Jean Y..., demeurant ... à Mont-Bouvillers (Meurthe-et-Moselle),

2°/ M. Patrick B..., demeurant ... (Doubs),

3°/ M. Claude C..., demeurant ... à Thionville (Moselle),

défendeurs à la cassation ; LA COUR, en l'audience publ

ique du 27 novembre 1990, où étaient présents :

M. Cochard, président, M. Saintoyant, conseiller rappor...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE,

a rendu l'arrêt suivant :

Sur les pourvois formés par la société anonyme Cominak, dont le siège social est ... à Vélizy-Villacoublay (Yvelines),

en cassation de trois arrêts rendus le 17 mai 1988 par la cour d'appel de Versailles (11e chambre sociale), au profit de :

1°/ M. Jean Y..., demeurant ... à Mont-Bouvillers (Meurthe-et-Moselle),

2°/ M. Patrick B..., demeurant ... (Doubs),

3°/ M. Claude C..., demeurant ... à Thionville (Moselle),

défendeurs à la cassation ; LA COUR, en l'audience publique du 27 novembre 1990, où étaient présents :

M. Cochard, président, M. Saintoyant, conseiller rapporteur, MM. Guermann, Vigroux, Combes, Ferrieu, Monboisse, conseillers, M. Z..., Mme A..., M. X..., Mlle Sant, conseillers référendaires, M. Picca, avocat général, Mme Collet, greffier de chambre ; Sur le rapport de M. le conseiller Saintoyant, les observations de la SCP Masse-Dessen, Georges et Thouvenin, avocat de la société Cominak, de Me Ancel, avocat de MM. Y..., B... et C..., les conclusions de M. Picca, avocat général, et après en avoir délibéré conformément à la loi ; ! - Vu la connexité, joint les pourvois n°s H 88-43.598 à J 88-43.600 ; Attendu, selon les arrêts attaqués (Versailles, 17 mai 1988), que, le 25 février 1986, la société Cominak a porté plainte pour vol et tentative de vol d'un pneumatique et complicité de tentative de vol contre MM. C..., Y... et B..., salariés à son service et employés, selon un contrat de travail régi par le droit nigérien, sur une mine uranifère à Akouta ; que, suivant un procès-verbal de conciliation intervenu entre les parties le 27 février 1987, devant le consul de France à Arlit, la société s'est engagée à ne pas "poursuivre" sa plainte, les salariés s'engageant, "en échange de l'abandon de poursuites judiciaires", à ne pas contester la sanction prise par leur employeur, "à savoir licenciement pour faute lourde, et à ne pas porter l'affaire devant une autre juridiction" ; que la société les ayant licenciés pour faute lourde le 28 février 1986, ils ont saisi la juridiction prud'homale pour obtenir le paiement de rappels et de congés payés, de salaires et des indemnités de rupture et de licenciement sans cause réelle et sérieuse ;

Sur le premier moyen, pris en ses trois branches :

Attendu que la société fait grief à l'arrêt d'avoir rejeté la fin de non-recevoir de transaction qu'elle avait soulevée, alors, selon le moyen, que, d'une part, après avoir rappelé les allégations des

salariés, sans en examiner le bien-fondé, la cour d'appel s'est seulement référée "aux éléments de la cause et aux circonstances particulières de l'espèce", sans préciser les faits précis qui auraient altéré le consentement du salarié ; qu'en statuant ainsi, la cour d'appel a entaché sa décision d'un défaut de motifs, en violation de l'article 455 du nouveau Code de procédure civile ; alors, surtout, que l'emploi d'une voie de droit ne peut être considéré comme une violence au sens des articles 1112 et suivants du Code civil que s'il a été le moyen de se procurer un avantage abusif ; qu'en l'espèce, il n'était pas contesté que la société s'était engagée à abandonner toute poursuite judiciaire à l'encontre des salariés, ceux-ci s'engageant, en contrepartie, à ne pas contester le bien-fondé de leur licenciement ; que, par suite, en estimant que la société avait commis un abus de pouvoir, sans préciser en quoi elle aurait, par le biais de cette transaction, obtenu un avantage abusif, la cour d'appel n'a pas caractérisé la prétendue contrainte, privant ainsi sa décision de base légale au regard des articles 1112 et suivants du Code civil ; alors, enfin que la société avait souligné que c'étaient les salariés eux-mêmes qui avaient été à l'origine de la transaction litigieuse, puisque c'était à leur demande que le consul de France avait entrepris une démarche auprès d'elle dans ce sens ; qu'en s'abstenant de répondre à ce moyen, qui excluait toute volonté de la société d'abuser de son pouvoir pour se procurer un avantage illégitime, la cour d'appel a entaché sa décision d'un défaut de motifs, violant ainsi l'article 455 du nouveau Code de procédure civile ; Mais attendu que, d'une part, par motifs propres et adoptés, la cour d'appel a retenu que les salariés expatriés n'avaient la possibilité de rentrer en France qu'en acceptant les prétentions de la société et qu'ainsi la menace du maintien de sa plainte était de nature à altérer la liberté de leur consentement, que, d'autre part, ayant relevé que, compte tenu d'un usage de prêt de matériel existant dans l'entreprise, les faits invoqués par l'employeur dans sa plainte ne pouvaient constituer un vol, la cour d'appel a fait ressortir que l'avantage résultant pour l'employeur de la renonciation des salariés au paiement des indemnités de rupture était injustifié ; que, répondant aux conclusions prétendument délaissées, elle a pu en déduire que, nonobstant l'intervention à l'acte du consul de France, l'employeur avait commis un abus de pouvoir ; que le moyen, qui manque en fait en ses première et troisième branches, n'est pas fondé en la deuxième ; Sur le second moyen :

Attendu que la société reproche encore à l'arrêt de l'avoir condamnée à verser aux salariés des indemnités de licenciement et de préavis, des dommages-intérêts pour licenciement abusif, des indemnités de congés payés et un solde de salaire, alors, selon le moyen, que, d'une part, il résulte des termes des articles 39, alinéa 2, du Code du travail nigérien et 29 de la convention collective applicable, que la faute lourde est assimilable à la faute grave en droit français, dès lors qu'elle emporte, tout comme elle, la privation du préavis ; qu'il résulte des constatations de la cour d'appel que MM. C..., B... et Y... ont, de concert, sorti frauduleusement de l'usine, sans le bon de sortie qu'ils savaient obligatoire, un pneumatique qu'ils ont utilisé à des fins personnelles ; qu'en constatant, cependant, que la faute ainsi constatée ne constituait pas une faute lourde, ce qui rendait le licenciement abusif, la cour d'appel n'a pas tiré les conséquences légales qui résultaient de ses constatations au regard des textes susvisés ; alors, surtout, que, dans ses conclusions, sur ce point délaissées en violation de l'article 455 du nouveau Code de procédure civile, la société avait fait valoir que s'il est effectivement de pratique courante pour les salariés d'emprunter du matériel appartenant à la société, ce n'est qu'à la condition d'en avoir obtenu l'autorisation, laquelle se matérialise par un bon de sortie, le non-respect de cette règle entraînant systématiquement des poursuites pénales ; Mais attendu qu'après avoir énoncé que la loi nigérienne laisse l'appréciation de la faute lourde à la juridiction compétente, la cour d'appel a retenu que, compte tenu de l'isolement dans lequel se trouvaient les salariés, ils avaient coutume d'emprunter le matériel à la société, à la seule condition que celui-ci soit restitué, et que, ne doutant pas qu'en raison de leur qualification et de leur rémunération élevée, ses camarades ne manqueraient pas de respecter cette obligation, s'agissant de

l'emprunt d'un pneumatique, le responsable au service atelier avait commis une simple négligence en n'établissant pas un bon de sortie ; que, répondant ainsi aux conclusions prétendument délaissées, elle a estimé que les faits reprochés aux salariés ne constituaient pas une faute lourde, que le moyen ne peut être accueilli en aucune de ses branches ; PAR CES MOTIFS :

REJETTE les pourvois ;


Synthèse
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 88-43598
Date de la décision : 10/01/1991
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Sociale

Analyses

(Sur le 2e moyen) CONTRAT DE TRAVAIL, RUPTURE - Licenciement - Cause - Faute du salarié - Faute grave - Simple négligence (non) - Constatations suffisantes.


Références :

Nouveau code de procédure civile 455

Décision attaquée : Cour d'appel de Versailles, 17 mai 1988


Publications
Proposition de citation : Cass. Soc., 10 jan. 1991, pourvoi n°88-43598


Composition du Tribunal
Président : Président : M. COCHARD

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:1991:88.43598
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