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09/10/1990 | FRANCE | N°90-84505

France | France, Cour de cassation, Chambre criminelle, 09 octobre 1990, 90-84505


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, en son audience publique tenue au Palais de Justice à PARIS, le neuf octobre mil neuf cent quatre vingt dix, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le rapport de Mme le conseiller référendaire GUIRIMAND , les observations de la société civile professionnelle PIWNICA et MOLINIE, avocat en la Cour, et les conclusions de M. l'avocat général GALAND ; Statuant sur les pourvois formés par :

E... Simone,

E... Madeleine,

contre l'arrêt de la chambre d'accusation de la cour d'appel de NANCY en date du 3 juillet 1990 qui les a renv

oyées devant la cour d'assises du département de MEURTHE-et-MOSELLE,

la première...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, en son audience publique tenue au Palais de Justice à PARIS, le neuf octobre mil neuf cent quatre vingt dix, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le rapport de Mme le conseiller référendaire GUIRIMAND , les observations de la société civile professionnelle PIWNICA et MOLINIE, avocat en la Cour, et les conclusions de M. l'avocat général GALAND ; Statuant sur les pourvois formés par :

E... Simone,

E... Madeleine,

contre l'arrêt de la chambre d'accusation de la cour d'appel de NANCY en date du 3 juillet 1990 qui les a renvoyées devant la cour d'assises du département de MEURTHE-et-MOSELLE,

la première, sous l'accusation d'assassinat, empoisonnement, faux en écritures authentiques, complicité de faux en écritures publiques et authentiques, faux en écritures privées et usage, vol, recel de vols, détention d'explosifs et usage de fausses d plaques d'immatriculation,

la seconde, sous l'accusation de recel de vol et de destruction de pièces de nature à faciliter la recherche de crimes et délits ; Joignant les pourvois en raison de la connexité ; Sur la recevabilité du mémoire personnel de Simone E... transmis le 1er octobre 1990 ; Attendu que le document susvisé, qui est parvenu à la Cour de Cassation hors du délai prévu par l'article 574-1 du Code de procédure pénale, est irrecevable ; Vu le mémoire personnel régulièrement produit par Simone E... ; Vu le mémoire produit par la société civile professionnelle Piwnica et Molinié au nom des deux demanderesses ; Sur le premier moyen de cassation proposé pour les demanderesses et sur le septième moyen du mémoire personnel de Simone E..., et pris de la violation des articles 197, alinéa 3 et 216 du Code de procédure pénale, de l'article 6, alinéa 1er de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, ensemble violation des droits de la défense,

"en ce que l'arrêt attaqué ne constate pas que les dispositions de l'article 197 du Code de procédure pénale ont été observées et particulièrement que préalablement à l'audience de la chambre d'accusation, l'entier dossier de l'information comportant toutes les pièces de la procédure a été mis à la disposition des conseils des inculpés ; que les dispositions de l'article 197, alinéa 3 du Code de procédure pénale étant essentielles aux droits de la défense et faisant partie intégrante du procès équitable au sens de l'article 6 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des

libertés fondamentales devant la chambre d'accusation, la cassation est encourue" ; "Sur le deuxième moyen de cassation et sur le troisième moyen de cassation, commun aux deux demanderesses, et pris, le deuxième de la violation des d articles 81, 197 et 206 du Code de procédure pénale, ensemble violation des droits de la défense, "en ce que la chambre d'accusation a omis de constater que le procès-verbal d'interrogatoire récapitulatif de Simone E... en date du 6 mars 1990 (cote D. 3465) ne figurait pas au dossier de la procédure ni en original ni copie non certifiée conforme, ni en copie non certifiée conforme, de constater en conséquence le caractère incomplet du dossier qui lui était transmis et d'en tirer toutes les conséquences légales" ; "le troisième moyen de cassation pris de la violation de l'article 81, alinéas 2 et 3 du Code de procédure pénale,

"en ce que la chambre d'accusation a omis d'annuler l'ensemble de la procédure qui lui avait été soumise ; "alors que la majorité des pièces figurent au dossier en photocopies non certifiées conformes par le greffier ; qu'elles sont dès lors dépourvues de caractère authentique et qu'il en est notamment ainsi de pièces essentielles telles que l'ordonnance de transmission de pièces, de nombreux réquisitoires supplétifs, de commissions rogatoires et de la plupart des procès-verbaux d'interrogatoire" ; Les moyens étant réunis ; Attendu qu'il résulte de l'arrêt attaqué et des pièces de la procédure que le magistrat instructeur, chargé de l'information suivie notamment contre Simone et Madeleine E..., a rendu le 8 juin 1990 une ordonnance de transmission des pièces dans les conditions prévues par l'article 181 du Code de procédure pénale ; que l'entier dossier de l'information a été transmis au procureur général pour être soumis à la chambre d'accusation ; Attendu qu'il ressort également dudit arrêt et des pièces susvisées que, conformément aux dispositions de l'article 197 du même Code, les parties ont été avisées le 11 juin 1990 que la chambre d'accusation statuerait le 19 juin suivant sur le renvoi des inculpées devant la juridiction de jugement ; qu'à l'audience, les conseils de Simone et de Madeleine E..., qui avaient déposé des mémoires, n'ont fait aucune observation sur l'état du dossier ; Attendu qu'il se déduit de ces constatations que les griefs allégués aux premier et deuxième moyens ne peuvent être accueillis ; que contrairement à ce qui est soutenu, en effet, le visa de l'article 197 du Code de procédure pénale dans les arrêts de la chambre d'accusation n'est pas prescrit à peine de nullité ;

Que, par ailleurs, s'il est vrai, comme le fait valoir le troisième moyen, que toutes les copies de pièces n'ont pas été certifiées conformes dans les conditions prescrites par l'article 81 du Code de procédure pénale, les demanderesses ne sauraient se faire un grief de cette irrégularité, dès lors que la Cour de Cassation, au vu des documents régulièrement versés aux débats, est en mesure de s'assurer de la conformité du dossier reproduit avec l'original ; Qu'en conséquence, les moyens doivent être écartés ; Sur le douzième moyen de cassation proposé pour Simone E..., et sur les premier et deuxième moyens du mémoire personnel de la demanderesse, pris de la violation des articles 5 et 6 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, de l'article 593 du Code de procédure pénale, défaut de motifs, manque de base légale, défaut de réponse à mémoire régulièrement déposé ; "en ce que l'arrêt attaqué a rejeté la demande d'annulation de la procédure pour violation des dispositions des articles 5 1 c, 5 3, 6 1 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; "aux motifs que si Simone E... se trouve effectivement détenue provisoirement depuis plus de 55 mois, la responsabilité lui en incombe en grande partie :

que pendant près d'une année, elle a pratiqué une politique de refus systématique de l'instruction et multiplié les incidents de procédure ; que souvent aussi ce n'est qu'après de nombreuses et longues investigations qu'elle a fini par reconnaître certains faits dont elle était soupçonnée ; qu'il faut souligner aussi que Simone E... était inculpée d'infractions multiples, dont deux particulièrement graves d'assassinat ; que forcément l'accumulation des faits répréhensibles qui lui sont imputés a conduit à des enquêtes longues et difficiles ; que dans ces d conditions, l'inculpée n'est pas recevable à se plaindre de la longueur d'une instruction qui a été poursuivie sans relâche et n'a subi aucun retard injustifié ; "alors que de première part, par sa seule durée plus de 55 mois la détention provisoire de Simone E... constitue une violation grave des articles 5 et 6 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; "alors que, de seconde part, aux termes des articles 6, alinéa 2 de la Convention européenne, toute personne accusée d'une infraction est présumée innocente jusqu'à ce que sa culpabilité ait été légalement établie ; qu'en droit interne l'instruction n'a pour but que de rassembler les charges qui justifient le renvoi éventuel d'un inculpé devant la juridiction de jugement et non d'établir sa culpabilité et qu'il n'est dès lors pas admissible qu'une information se poursuive au delà

du délai jugé raisonnable par la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales à seule fin d'obtenir des aveux de la personne incarcérée ; "alors que, de troisième part, dans son mémoire devant la chambre d'accusation, Simone E... faisait valoir qu'il se déduit des termes de l'article 6-3° d, de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales que les confrontations avec les témoins à charges sont un droit pour l'inculpé dès lors qu'il en fait la demande et non une simple faculté offerte au juge d'instruction ; que dès le début de l'instruction elle avait sollicité du magistrat instructeur sa confrontation notamment avec les époux A..., et MM. D... et C..., témoins à charge, entendus fin 1985 début 1986 et sur les déclarations desquels reposait la poursuite ; que cependant le magistrat instructeur avait attendu plus de deux ans après que la chambre d'accusation ait indiqué que ces confrontations devaient avoir lieu pour y procéder ; qu'en n'examinant pas ce chef péremptoire du mémoire et en se bornant à affirmer que l'information s'était poursuivie sans relâche et n'avait subi aucun retard injustifié, la chambre d'accusation n'a pas légalement justifié sa décision et a violé les articles 5 et 6 de la Convention européenne ; "alors que, enfin, dans son mémoire, Simone E... faisait également valoir que si elle avait déposé d une requête en suspicion légitime le 12 avril 1988, cet incident de procédure était précisément dû à l'attitude du magistrat instructeur qui n'avait pas, à l'époque, procédé aux confrontations sollicitées par la défense et qu'ainsi l'arrêt attaqué ne pouvait sans répondre à cet argument péremptoire se borner à affirmer que si Simone E... se trouvait détenue provisoirement depuis plus de 55 mois, la responsabilité lui en incombait en partie ayant multiplié les incidents de procédure" ; Les moyens étant réunis ; Attendu que la chambre d'accusation, après avoir exposé l'argumentation contenue dans les mémoires de Simone E... et reprise à l'occasion du pourvoi, y a répondu par les motifs partiellement reproduits aux moyens ; Attendu qu'en prononçant comme ils l'ont fait, les juges ont justifié leur décision ; que, d'une part, il résulte de l'article 81 du Code de procédure pénale que le magistrat instructeur procède, lorsqu'il l'estime nécessaire, aux actes d'information qu'il juge utiles à la manifestation de la vérité ; que, d'autre part, la durée excessive d'une procédure, au regard des dispositions des articles 5 et 6 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales n'entraîne aucune nullité, mais permet seulement à celui qui en aurait souffert d'exercer un recours à fins indemnitaires ;

Qu'ainsi les moyens ne sauraient être accueillis ; Sur le quatrième moyen et sur le cinquième moyens de cassation proposés pour les deux demanderesses, et pris, le quatrième de la violation des articles 80, D. 28, 206, 591 et 593 du Code de procédure pénale, défaut de motifs, manque de base légale,

"en ce que l'arrêt attaqué a omis de prononcer l'annulation du réquisitoire introductif en date du 9 juillet 1985 (cote D 11) et de la procédure subséquente ; "alors que les documents qui dont la base de la poursuite doivent nécessairement figurer au dossier dès l'origine et y demeurer en original ou en copie certifiée conforme à peine de nullité absolue de l'information ; que le visa dans le réquisitoire introductif des pièces qui y sont jointes équivaut à une d analyse desdites pièces et à celle des faits qu'il constate ; qu'en conséquence celles-ci déterminent par les indications qu'elles contiennent l'objet exact et l'étendue de la saisine du juge d'instruction ; qu'en l'espèce l'absence de précision dans le réquisitoire introductif concernant les pièces jointes ne permet pas de vérifier si les pièces cotées 1 à 10 figuraient au dossier dès l'origine et ont été transmises au président du tribunal en vue de la désignation du juge d'instruction ; qu'en cet état la chambre d'accusation avait l'obligation d'annuler, même d'office, le réquisitoire introductif et d'en tirer les conséquences légales" ; "et le cinquième de la violation des articles 83, D. 27 à D. 31 et 206 du Code de procédure pénale,

"en ce que l'arrêt attaqué a omis d'annuler la désignation par le premier viceprésident du tribunal de grande instance de Nancy de M. Thiel, juge d'instruction, en date du 9 juillet 1985 (cote D.12) et la procédure subséquente ; "alors que lorsqu'il existe dans un tribunal plusieurs juges d'instruction, le président du tribunal, ou en cas d'empêchement celui qui le remplace, désigne pour chaque information le juge qui en sera chargé ; que ces prescriptions sont substantielles et d'ordre public ; qu'il existe au tribunal de grande instance de Nancy plusieurs juges d'instruction ; qu'il ne résulte pas des mentions de la décision désignant M. Thiel que celles-ci se rapportent aux faits visés par le réquisitoire introductif du procureur de la République de Nancy contre X du chef de séquestration portant la même date (cote D 11) et que dès lors la chambre d'accusation avait l'obligation de constater l'absence de désignation régulière du magistrat instructeur et d'annuler d'office cette pièce et la procédure subséquente" ; K Les moyens étant réunis ; Attendu qu'il ne saurait être reproché à la chambre d'accusation

d'avoir omis d'annuler le réquisitoire introductif en date du 9 juillet 1985, et par voie de conséquence, la désignation du juge d'instruction du même jour, ainsi que la procédure subséquente ; Que le réquisitoire introductif précité est en d effet immédiatement suivi de la demande, adressée par le procureur de la République au président du tribunal de grande instance, en vue de la désignation d'un juge d'instruction pour instruire la procédure enregistrée au parquet sous le numéro 14013/85 et annexée audit réquisitoire ; Qu'il s'ensuit que les moyens doivent être rejetés ; Sur le septième moyen de cassation, et sur le huitième moyen de cassation, communs à Simone et Madeleine E..., et pris,

le septième, de la violation des articles 39, 175 et 206 du Code de procédure pénale et des principes généraux du droit,

"en ce que l'arrêt attaqué a omis d'annuler l'ordonnance de règlement du magistrat instructeur en date du 8 juin 1990 ; "alors qu'il résulte des principes généraux du droit qu'un acte de procédure doit être signé du magistrat dont il émane ; que le réquisitoire du procureur de la République tendant à la transmission à M. le procureur général du dossier de la procédure daté du 22 mai 1990 mentionne, in fine, au-dessus de la signature illisible "(c'est-à-dire "pour") le procureur de la République", qu'en l'état de ces seules mentions qui ne permettent pas de s'assurer que cette pièce a bien été signée par le procureur de la République ou l'un de ses substituts, le réquisitoire du ministère public précité est inexistant et que dès lors le juge d'instruction ne pouvait clore l'information avant l'expiration du délai prescrit par l'article 175 du Code de procédure pénale" ; le huitième, de la violation des articles 39, 82 et 206 du Code de procédure pénale et des principes généraux du droit ; "en ce que l'arrêt attaqué a omis d'annuler les réquisitoires supplétifs du 10 novembre 1985 (D 108), du 25 novembre 1985 (D 255), du 20 février (D 508), du 24 août 1986 (D 1484) et du 15 février 1990 (D 3446) et les pièces qui en sont la conséquence ; "alors qu'il résulte des principes généraux du droit qu'un acte de procédure doit être signé du magistrat dont il émane ; que les réquisitoires d supplétifs susvisés mentionnent tous, in fine "(c'est-à-dire "pour") le procureur de la "République" au-dessus de la signature illisible ; qu'en cet état les réquisitoires étaient inexistants dès lors qu'il est impossible de savoir s'ils émanent du procureur de la République ou de l'un de ses substituts ; que le juge d'instruction ne pouvait entreprendre des investigations sur les faits nouveaux découverts pendant le cours de l'information et procéder au vu de ces réquisitoires supplétifs à des inculpations et qu'en cet état la chambre d'accusation avait l'obligation d'annuler même d'office les réquisitoires supplétifs inexistants et de tirer les conséquences légales de cette annulation" ; Les moyens étant réunis ;

Attendu que, contrairement à ce qui est soutenu, la chambre d'accusation n'avait pas à annuler les réquisitoires visés au moyen, ni la procédure subséquente ; que les pièces en cause sont présumées avoir été signées par le procureur de la République du tribunal de grande instance de Nancy ou l'un de ses substituts, qui représentent de façon indivisible le ministère public auprès de cette juridiction ; Attendu, dès lors, que les moyens ne peuvent être admis ; Sur le sixième moyen de cassation, propre à Simone E..., et pris de la violation des articles 106, 107, 121 et 206 du Code de procédure pénale ; "en ce que l'arrêt attaqué a omis d'annuler le procès-verbal d'interrogatoire de Simone E... en date du 29 avril 1986 (D 808), le procès-verbal de confrontation du 28 novembre 1988 (D 2960) de Simone E... avec le témoin Marie Y..., épouse A..., et le procès-verbal d'interrogatoire de Simone E... en date du 20 octobre 1989 (cote D 3302), "alors, d'une part, qu'il ressort de la procédure soumis à l'examen de la Cour de Cassation que le procès-verbal du 29 avril 1986 ne porte pas en sa page 5- la signature du magistrat instructeur, qu'il est dès lors nul en la forme en sorte que la chambre d'accusation aurait dû, même d'office, constater la nullité dudit procès-verbal ; "alors, d'autre part qu'il en est de même du procès-verbal de confrontation du 28 novembre 1988 qui ne comporte pas au bas de la page 5 la signature du d greffier ; "alors, enfin, qu'il en est de même du procès-verbal d'interrogatoire du 20 octobre 1989 qui ne ne comporte pas en page 3, c'est-àdire en dernière page, la signature du greffier" ; Attendu qu'il résulte des pièces originales du dossier, régulièrement versées aux débats, que contrairement à ce qui est soutenu, les procès-verbaux des 29 avril 1986 (D 808) et 28 novembre 1988 (D 2960) comportent bien, en leur page cinq, respectivement, la signature du magistrat instructeur et du greffier ; Attendu, par ailleurs, que, s'il est vrai que le procès-verbal du 20 octobre 1989 (D 3302), établi à l'occasion de la présentation de scellés à Simone E..., a été signé au bas de chacune de ses pages par l'inculpée et par le juge d'instruction mais n'est pas revêtu en son troisième feuillet seulement- de la signature du greffier, alors que celui-ci a certifié conforme la copie de cette pièce, l'inobservation partielle de la formalité exigée par l'article 106 du Code de procédure pénale n'a pas eu pour effet en l'espèce de porter atteinte aux intérêts de la demanderesse et ne saurait donner lieu à censure ; Qu'ainsi, le moyen doit être écarté ; Sur le neuvième moyen de cassation, proposé pour les demanderesses,

et sur le troisième moyen de cassation du mémoire personnel de Simone E..., pris de la violation de l'article 151 du Code de procédure pénale, de l'article 593 du même Code, défautde motifs, manque de base légale ; "en ce que l'arrêt attaqué a refusé de prononcer la nullité des commissions rogatoires confiées par le magistrat instructeur à M. le commissaire central de Nancy entre le 9 juillet 1985 et le 26 octobre 1987 ; "aux motifs qu'il est constant que les commissions rogatoires contestées ont été effectuées par un officier de police judiciaire légalement apte à recevoir les délégations données par le magistrat instructeur et qu'il importe peu que le chef de service désigné par le magistrat instructeur pour exécuter ces prescriptions, n'ait pas lui-même la qualité d'officier de police judiciaire ; "alors qu'il se déduit des termes de d l'article 151 du Code de procédure pénale, que le juge d'instruction ne peut requérir par commission rogatoire que des juges de son tribunal, des juges d'instruction et des officiers de police judiciaire de la commission rogatoire un ensemble de questions d'ordre technique qui conféraient à la mission confiée au service de police le caractère d'une expertise, la chambre d'accusation aurait dû constater que le juge d'instruction n'ayant pas motivé le choix des experts en dehors de la liste nationale ou de la liste des cours d'appel, sa décision ordonnant une expertise était nulle ainsi que les opérations qui en sont la conséquence" ; Attendu que le 24 décembre 1985, le juge d'instruction, qui était alors saisi, en ce qui concerne Simone E..., des seuls faits d'homicides volontaires, de vol, d'usage de fausses plaques d'immatriculation, et de détention d'explosifs, a donné commission rogatoire au commissaire divisionnaire, chef du service régional de police judiciaire de Nancy, aux fins de reproduire par photographies des documents placés sous main de justice, et de procéder, dans le cadre de cette mesure de police technique, à toute constatation pouvant révéler d'éventuelles falsifications ou altérations ; Attendu que ce service de police a effectué, outre des photographies des documents saisis, des examens comparatifs d'écritures portant sur une demande de dispense de publication de bans, pour laquelle Simone E... n'a pas été renvoyée devant la juridiction de jugement, ainsi que sur des testaments rédigés par Marcel Z... les 17 janvier 1979 et 10 mai 1980, qui ont ensuite été soumis à expertise ; K Attendu, que dans ces conditions, la demanderesse ne saurait se faire un grief de l'irrégularité invoquée, et qu'il n'y a pas lieu d'accueillir le moyen ; Sur le onzième moyen de cassation, commun aux deux demanderesses et pris de la violation des articles 81 et 151 du Code de procédure pénale, de l'article 8 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, des articles 206 et 593 du Code de procédure pénale, ensemble violation des droits de la défense ;

"en ce que l'arrêt attaqué a refusé de prononcer l'annulation des commissions rogatoires des 11 et 16 juillet 1985 plaçant sous écoute téléphonique d les lignes des abonnées Simone et Madeleine E... à Nancy (D 763 et D. 172) et la commission rogatoire du 11 septembre 1985 plaçant sous écoute la ligne téléphonique de Madeleine E... à Cannes (D 140) ainsi que les actes qui en sont la conséquence et s'est en outre fondé sur des écoutes téléphoniques irrégulières pour justifier le renvoi de Simone E... et de Madeleine E... devant la cour d'assises" ; Attendu que pour refuser de prononcer l'annulation des écoutes téléphoniques effectuées sur les lignes dont Simone et Madeleine E... étaient attributaires, la chambre d'accusation énonce que ces écoutes ont été pratiquées, sur les ordres du juge d'instruction et sous son contrôle, en vue d'élucider les conditions de la disparition de Bernard B... ; que les juges ajoutent qu'elles ont été obtenues sans artifice ni stratagème, que les conversations utiles à l'information ont fait l'objet d'une transcription sur procèsverbaux, et que les bandes magnétiques ont été placées sous scellés ; que la chambre d'accusation observe enfin que toutes mesures utiles ont été prises pour permettre une discussion contradictoire à leur sujet ; Attendu qu'en l'état de ces motifs qui établissent qu'il a été satisfait en l'espèce aux exigences de l'article 8 2 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, la chambre d'accusation a justifié sa décision ; D'où il suit que le moyen doit être écarté ; Sur le quatrième moyen du mémoire personnel de Simone E..., pris de la violation de l'article 97 alinéa 4 du Code de procédure pénale ; Attendu que devant la chambre d'accusation, Simone E... a prétendu que les expertises effectuées sur des dossiers médicaux saisis concernant Bernard B... étaient nulles, aux motifs, d'une part, que les documents en cause n'avaient pas été présentés à l'inculpée, conformément aux prescriptions de l'article 97 alinéa 4 du Code de procédure pénale, et que, d'autre part, le magistrat instructeur avait refusé de communiquer ces dossiers à la défense ; Attendu que la chambre d'accusation a écarté à juste titre cette argumentation ; qu'en effet, lorsque des dossiers médicaux devant donner lieu à d expertise ont été placés sous scellés, le non-accomplissement des formalités prescrites par l'article 97 alinéa 4 du Code de procédure pénale ne saurait entraîner de nullité, dès lors qu'il est loisible à l'inculpé, après notification des conclusions du rapport d'expertise, de présenter toutes observations utiles ou de solliciter tout complément d'expertise qu'il estime nécessaire ; Que tel ayant été le cas en l'espèce, il n'est nullement établi

qu'il ait été porté atteinte aux intérêts de la demanderesse, et il n'y avait lieu de prononcer la nullité des expertises critiquées ; Sur le cinquième moyen du mémoire personnel de Simone E..., pris de la violation de l'article 105 du Code de procédure pénale ; Attendu que c'est à bon droit que la chambre d'accusation a écarté l'argumentation de Simone E... qui soutenait que le ministère public ayant pris, le 25 novembre 1985, un réquisitoire supplétif contre personne non dénommée à raison du crime d'homicide volontaire commis sur la personne de Marcel Z..., le magistrat instructeur, sur le fondement de cet acte et de réquisitions du 2 juin 1987 aux fins de requalification, l'avait inculpée à cette date du chef d'assassinat, en méconnaissance des dispositions de l'article 105 du Code de procédure pénale ; Qu'il résulte en effet des pièces de la procédure qu'au cours de la période susvisée, le magistrat instructeur n'a pas, dans le dessein de faire échec aux droits de la défense, procédé à des auditions de la demanderesse sur le crime en cause, dans des conditions prohibées par le texte précité ; Qu'ainsi le moyen ne peut être admis ; Sur le sixième moyen de cassation du mémoire personnel de Simone E..., pris d'une atteinte aux droits de la défense, s'agissant de l'inculpation de détention irrégulière d'explosifs ; Attendu que la chambre d'accusation a relevé que Simone E... s'était spontanément expliquée sur l'inculpation de détention irrégulière d'explosifs, le 10 novembre 1985, lors de sa première comparution devant le juge d'instruction ; Qu'il s'ensuit que le moyen n'est pas d fondé ; Sur le treizième moyen de cassation pris de la violation de l'article 295 du Code pénal, de l'article 593 du Code de procédure pénale, défaut de motifs, manque de base légale ; "en ce que l'arrêt attaqué a renvoyé Simone E... devant la cour d'assises sous l'accusation d'homicide volontaire commis avec préméditation sur la personne de Bernard B... ; "alors que l'arrêt qui s'est borné à faire état de la disparition inexpliquée de Bernard B... et des soupçons de l'entourage de Simone E..., sans constater que celleci ait commis un acte donnant la mort, n'a pas légalement caractérisé le crime visé à l'article 295 du Code pénal et n'a pas dès lors justifié sa décision de renvoyer Simone E... devant la cour d'assises ; Sur le quatorzième moyen de cassation pris de la violation de l'article 60, alinéa 1er du Code pénal, des articles 591 et 593 du Code de procédure pénale, défaut de motifs, manque de base légale ; "en ce que l'arrêt attaqué a renvoyé Simone E... devant la cour

d'assises sous l'accusation de complicité par instructions, d'apposition de fausse signature sur un acte de mariage ; "alors que, d'une part, la complicité par instructions n'est légalement caractérisée qu'autant que des conseils précis ou de véritables directives ont été donnés et ont abouté à la commission de l'infraction et que l'arrêt qui n'a pas constaté que Simone E... ait donnné la moindre instruction pour commettre le faux incriminé, n'a pas légalement justifié sa décision de la renvoyer devant la cour d'assises ; "alors que, d'autre part, en omettant de rechercher si la personne qui avait reçu les instructions prétendues était elle-même auteur ou complice de celle qui avait commis l'infraction principale, la chambre d'accusation n'a pas caractérisé en tous ses éléments, la complicité prévue par l'article 60 du Code pénal ; Sur le quinzième moyen de cassation pris de la violation des articles 60 alinéa 1er, 145 et suivants du Code pénal, des articles 591 et 593 du Code de d procédure pénale, défaut de motifs, manque de base légale ; "en ce que l'arrêt attaqué a renvoyé Simone E... devant la cour d'assises sous l'accusation de complicité par instructions, d'apposition de fausse signature sur un acte notarié ; "alors que, d'une part, la complicité par instructions n'est légalement caractérisée qu'autant que des conseils précis ou de véritables directives ont été donnés et ont abouti à la commission de l'infraction et que l'arrêt qui n'a pas constaté que Simone E... ait donné la moindre instruction pour commettre le faux incriminé, n'a pas légalement justifié sa décision de la renvoyer devant la cour d'assises ; "alors que, d'autre part, en omettant de rechercher si la personne qui avait reçu les instructions prétendues était elle-même auteur ou complice de celle qui avait commis l'infraction principale, la chambre d'accusation n'a pas caractérisé en tous ses éléments la complicité prévue par l'article 60 du Code pénale" ; Sur le seizième moyen de cassation pris de la violation de l'article 147 du Code pénal et de l'article 593 du Code de procédure pénale, défaut de motifs, manque de base légale ; "en ce que l'arrêt attaqué a renvoyé Simone E... devant la cour d'assises sous l'accusation d'avoir commis un faux en écriture authentique en altérant dans un acte notarié les faits que cet acte avait pour objet de constater, à savoir sa qualité de légataire universelle des biens de Marcel Z... résultant d'un testament olographe du 10 mai 1980 qu'elle savait revêtu d'une signature contrefaite du testateur ; "alors que l'arrêt qui n'a pas constaté qu'au moment où l'acte de notoriété litigieux a été établi, Simone E... avait connaissance de ce que la signature de Marcel Z... sur le testament était contrefaite, n'a pas légalement caractérisé à son encontre

l'altération de qualité que l'acte de notoriété avait pour objet ou de constater" ; Sur le dix-septième moyen de cassation pris de la violation de l'article 301 du Code pénal, de l'article 593 du Code de procédure pénale, défaut de d motifs, manque de base légale ; "en ce que l'arrêt attaqué a renvoyé Simone E... devant la cour d'assises sous l'accusation d'avoir volontairement attenté à la vie de Marcel Z... par l'effet de substances qui pouvaient donner la mort plus ou moins promptement ; "alors qu'il ne résulte d'aucune des énonciations de l'arrêt que Simone E... ait attenté à la vie de Marcel Z..., ni que cet attentat ait été perpétré par l'effet de substances pouvant donner la mort, ni que Simone E... ait eu l'intention de donner la mort à Marcel Z... en sorte que la mise en accusation de Simone E... pour empoisonnement n'est pas légalement justifiée et que la cassation est encourue" ; Les moyens étant réunis ; Attendu qu'il résulte de l'arrêt attaqué, qui a énuméré et analysé les charges pesant sur Simone E..., que celle-ci, en 1980, après avoir acquis des produits digitaliques au moyen d'une ordonnance médicale falsifiée, aurait volontairement attenté à la vie de Marcel Z... en lui administrant des substances pouvant donner la mort, puis, en 1985, aurait attiré à son domicile et, aurait, par arme à feu, tué Bernard B... dont le corps mutilé, découpé à l'aide d'une meuleuse électrique, aurait été retrouvé dans la Marne ; Attendu qu'il ressort également des énonciations de l'arrêt que, pour s'approprier la fortune de Marcel Z..., Simone E..., aurait, en 1980, donné des instructions à un tiers non identifié afin de contrefaire la signature du susnommé dans un acte de mariage et dans un acte de vente immobilière ; Attendu, enfin, que Simone E... aurait, en 1980, commis un faux en écritures authentiques en altérant dans un acte de notoriété dressé par Me Breton, notaire, les faits que cet acte avait pour objet de constater, à savoir la qualité de légataire universelle des biens de Marcel Z... qui lui était attribuée par un testament olographe qu'elle savait revêtu d'une signature contrefaite du testateur ; Attendu que les chambres d'accusation, en statuant sur les charges de culpabilité, apprécient souverainement, au point de vue des faits, tous les éléments constitutifs des crimes et que la Cour de d Cassation n'a d'autre pouvoir que de vérifier si la qualification qu'elles ont données à ces faits justifie le renvoi devant la cour d'assises ; Attendu que les agissements relevés dans l'arrêt attaqué, à les supposer établis, réunissent à la charge de Simone E... tous les éléments constitutifs des crimes d'assassinat, d'empoisonnement, de faux en écritures authentiques, de complicité de faux en écritures publiques et authentiques ;

Qu'en cet état, la mise en accusation de la demanderesse des chefs ci-dessus spécifiés est légalement justifiée ; D'où il suit que les moyens doivent être rejetés ; Et attendu que la chambre d'accusation était compétente, qu'il en est de même de la cour d'assises devant laquelle les demanderesses ont été renvoyées ; que la procédure est régulière et que les faits, objet principal de l'accusation, sont qualifiés crimes par la loi ; REJETTE les pourvois ; Condamne les demanderesses aux dépens ; Ainsi jugé et prononcé par la Cour de Cassation, chambre criminelle, en son audience publique, les jour, mois et an que dessus ; Où étaient présents :

M. Le Gunehec président, Mme Guirimand conseiller rapporteur, MM. Berthiau, Zambeaux, Dardel, Dumont, Fontaine, Milleville, Alphand, Culié conseillers de la chambre, M. Galand avocat général, Mme Ely greffier de chambre ; En foi de quoi le présent arrêt a été signé par le président, le rapporteur et le greffier de chambre ;


Synthèse
Formation : Chambre criminelle
Numéro d'arrêt : 90-84505
Date de la décision : 09/10/1990
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Criminelle

Analyses

(sur le 12e moyen proposé par S - W - ) CONVENTION EUROPEENNE DES DROITS DE L'HOMME - Article 5 et 6 - Durée excessive d'une procédure - Effet - Nullité (non).

(sur le 12e moyen proposé par S - W - ) INSTRUCTION - Pièces - Procès verbal non signé par le greffier - Intérêts du demandeur - Absence d'atteinte.


Références :

Code de procédure pénale 106

Décision attaquée : Cour d'appel de Nancy, 03 juillet 1990


Publications
Proposition de citation : Cass. Crim., 09 oct. 1990, pourvoi n°90-84505


Composition du Tribunal
Président : Président : M. Le GUNEHEC

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:1990:90.84505
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