AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE,
a rendu l'arrêt suivant :
Sur le pourvoi formé par la société SOTRAMA, société anonyme, dont le siège est ... (Meurthe-et-Moselle), agissant en la personne de ses représentants légaux en exercice demeurant audit siège,
en cassation d'un arrêt rendu le 3 février 1987 par la cour d'appel de Nancy (chambre sociale), au profit de M. Paul X..., demeurant ... (Meurthe-et-Moselle),
défendeur à la cassation ;
LA COUR, composée selon l'article L. 131-6, alinéa 2, du Code de l'organisation judiciaire, en l'audience publique du 28 février 1990, où étaient
présents : M. Cochard, président, M. Guermann, conseiller rapporteur, M. Combes, conseiller, Mlle Y..., M. Laurent-Atthalin, conseillers référendaires, M. Franck, avocat général, Mme Ferré, greffier de chambre ;
Sur le rapport de M. le conseiller Guermann, les observations de Me Boulloche, avocat de la société Sotrama et de la SCP Urtin-Petit, Rousseau et Van-Troeyen, avocat de M. X..., les conclusions de M. Franck, avocat général, et après en avoir délibéré conformément à la loi ;
Sur le moyen unique :
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Nancy, 3 février 1987) que M. X..., embauché le 21 décembre 1978 par la société Sotrama en qualité de chauffeur-routier, a été licencié sans préavis le 16 octobre 1985 ;
Attendu que la société fait grief à l'arrêt confirmatif de l'avoir condamnée à payer à son ancien salarié des dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, alors, selon le pourvoi, d'une part, que la cause réelle et sérieuse d'un licenciement peut exister, en l'absence de faute grave, d'élément intentionnel et malgré le caractère isolé du grief fait au salarié ; qu'en ne recherchant pas, comme elle y était invitée par les conclusions de l'employeur, si l'accident survenu le 20 janvier 1984, et qui avait occasionné une perte de 250 000 francs pour destruction du tracteur, plus 15 892 francs pour frais de dépannage, survenu après accident du 20 juin 1983, à l'occasion duquel l'attention du conducteur avait été attirée sur le fait qu'il devait éviter de boire des boissons alcoolisées, ne constituait pas une cause réelle et sérieuse de licenciement, même si le premier accident n'avait pas donné lieu à un avertissement écrit, la cour d'appel n'a pas donné de base légale à sa décision au regard des articles L. 122-14-3 du Code du travail et 455 du nouveau Code de procédure civile ; et alors, d'autre part, que le motif tiré par les premiers juges, de ce que le licenciement n'avait été prononcé par l'employeur qu'après la reprise du travail par le salarié le 9 octobre 1985, plus de deux mois après l'accident qui lui était reproché au cours duquel il avait été blessé, n'était pas de nature à établir le
caractère abusif du licenciement ou son absence de cause réelle et sérieuse, le salarié s'étant trouvé en période de suspension de son contrat de travail ; qu'ainsi, par ce motif du jugement confirmé,
l'arrêt
attaqué manque de base légale au regard de l'article L. 122-32 du Code du travail ;
Mais attendu qu'appréciant les éléments de la cause, les juges du fond ont retenu, en ce qui concerne l'accident de janvier 1984, qu'aucune faute de conduite n'était établie à l'encontre du salarié ; qu'en l'état de ces seules constatations, par une décision motivée, la cour d'appel a décidé, dans l'exercice du pouvoir qu'elle tient de l'article L. 122-14-3 du Code du travail que le licenciement de l'intéressé ne procédait pas d'une cause réelle et sérieuse ;
Que le moyen, qui ne peut être accueilli en sa première branche, est inopérant en la seconde ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi ;
! -d! Condamne la société Sotrama, envers le comptable direct du Trésor, aux dépens et aux frais d'exécution du présent arrêt ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de Cassation, Chambre sociale, et prononcé par M. le président en son audience publique du quatre avril mil neuf cent quatre vingt dix.