LA COUR DE CASSATION, TROISIEME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :
Sur les pourvois n°s H/8870.163 et G/88-70.164 formés par :
1°/ Monsieur Ali A..., demeurant à Metz (Moselle), ...,
2°/ Monsieur Tahar A..., demeurant à Montigny-les-Metz (Moselle), ...,
en cassation d'un arrêt rendu le 27 janvier 1988 par la cour d'appel de Metz (chambre des expropriations), au profit de la société anonyme d'économie mixte de rénovations et d'aménagement urbain de Montigny-les-Metz (Moselle), (SAMIRAM),
défenderesse à la cassation ; Les demandeurs invoquent à l'appui de leur pourvoi, trois moyens identiques de cassation annexés au présent arrêt ; LA COUR, en l'audience publique du 8 novembre 1989, où étaient présents :
M. Senselme, président, M. Deville, rapporteur, MM. B..., X..., Didier, Cathala, Capoulade, Darbon, Mme Z..., M. Aydalot, conseillers, Mme Y..., M. Chapron, conseillers référendaires, M. Vernette, avocat général, Mlle Bodey, greffier de chambre ; Sur le rapport de M. le conseiller Deville, les observations de la SCP Lyon-Caen, Fabiani et Liard, avocat de MM. Ali A... et Tahar A..., de Me Roger, avocat de la société anonyme d'économie mixte de rénovations et d'aménagement urbain de Montigny-les-Metz, les conclusions de M. Vernette, avocat général, et après en avoir délibéré conformément à la loi ; J E E J
Joint les pourvois n° H/88-70.163 et n° G/88-70.164 ; Sur le premier moyen :
Vu l'article R. 13-46 du Code de l'expropriation ; Attendu qu'il ne peut être prévu d'indemnité de remploi si les biens étaient notoirement destinés à la vente, ou mis en vente par le propriétaire exproprié au cours de la période de six mois ayant précédé la déclaration d'utilité publique ; Attendu que pour refuser aux consorts A... l'attribution d'une indemnité de remploi à la suite de l'expropriation d'un immeuble et d'un fonds de commerce leur appartenant prononcée par ordonnance du 6 janvier 1986 au profit de la société anonyme d'économie mixte de rénovation et d'aménagement urbain de Montigny les Metz, l'arrêt attaqué (Metz, 27 janvier 1988) retient que les expropriés doivent être indemnisés dans le cadre d'une cessation d'activité et ne peuvent prétendre qu'à l'indemnisation de leur immeuble et de leur
fonds de commerce, à l'exclusion des indemnités accessoires ; Qu'en statuant ainsi alors que la cessation d'activité des expropriés n'exclut pas l'attribution d'une indemnité de remploi, la cour d'appel a violé le texte susvisé ; Sur le deuxième moyen :
Vu l'article L. 13-13 du Code de l'expropriation ; Attendu que les indemnités allouées doivent couvrir l'intégralité du préjudice matériel direct et certain causé par l'expropriation ; Attendu que pour refuser aux consorts A... l'attribution d'une indemnité pour perte de bénéfices, l'arrêt retient que les expropriés ne peuvent prétendre, en l'absence de transfert de leur activité, qu'à l'indemnisation de leur immeuble et de leur fonds de commerce à l'exclusion des indemnités accessoires ; Qu'en statuant ainsi, alors que la privation de tout revenu pendant le temps nécessaire pour acquérir un autre fonds, constitue un préjudice directement lié à l'expropriation, la cour d'appel a violé le texte susvisé ; Sur le troisième moyen :
Vu l'article 455 du nouveau Code de procédure civile ; Attendu que pour rejeter la demande des consorts A... tendant au remboursement des indemnités de licenciement payées à leur personnel à la suite de la cessation de leur exploitation, l'arrêt se borne à affirmer qu'ils ne justifient ni de ce licenciement ni du paiement des indemnités et charges sociales ; Qu'en statuant ainsi, sans répondre aux conclusions faisant valoir que leur demande était justifiée par les documents établis par le comptable agréé de leur entreprise, la cour d'appel n'a pas satisfait aux exigences du texte susvisé ; PAR CES MOTIFS :
CASSE ET ANNULE, dans toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 27 janvier 1988, entre les parties, par la cour d'appel de Metz (chambre des expropriations) ; remet, en conséquence, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Colmar (chambre des expropriations) ; Condamne la société SAMIRAM, envers MM. Ali A... et Tahar A..., aux dépens et aux frais d'exécution du présent arrêt ; Ordonne qu'à la diligence de M. le procureur général près la Cour de Cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit sur les registres de la cour d'appel de Metz, en marge ou à la suite de l'arrêt annulé ; Ainsi fait et jugé par la Cour de Cassation, Troisième chambre
civile, et prononcé par M. le président en son audience publique du six décembre mil neuf cent quatre vingt neuf.