LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, en son audience publique tenue au Palais de Justice à PARIS, le six septembre mil neuf cent quatre vingt neuf, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le rapport de M. le conseiller DIEMER, les observations de la société civile professionnelle PIWNICA et MOLINIE, avocat en la Cour, et les conclusions de M. l'avocat général ROBERT ;
Statuant sur les pourvois formés par :
X... Alain
contre l'arrêt de la cour d'assises de la VIENNE en date du 24 novembre 1988 qui, pour vols avec port d'arme, tentative de ce même crime et délits connexes de coups ou violences volontaires avec arme, l'a condamné à la réclusion criminelle à perpétuité ;
Y... Louis, gérant de tutelle de X...,
contre l'arrêt du 29 novembre 1988 par lequel la Cour a prononcé sur les intérêts civils ;
Vu la connexité, joignant les pourvois ;
Sur le pourvoi de Y... es qualité ;
Attendu qu'aucun moyen n'est produit à l'appui du pourvoi ;
Sur le pourvoi de X... ;
Sur le premier moyen de cassation, pris de la violation des articles 379 et 384 du Code pénal, 349 et 356 du Code de procédure pénale, manque de base légale ; " en ce que les questions 13, 19 et 37 sont ainsi rédigées :
" l'accusé Alain X... est-il coupable d'avoir... frauduleusement soustrait les sommes de... francs, au préjudice de..., de... francs, au préjudice de...,... au préjudice de... " ; " alors que la Cour et le jury ne pouvaient être interrogés par une question unique se rapportant à des actes distincts commis au préjudice de victimes distinctes ; que les questions 13, 19 et 37 sont donc nulles comme entachées de complexité prohibée " ;
Attendu que la 13ème question a été posée en ces termes :
" l'accusé Alain X... est-il coupable d'avoir à Montluçon le 1er août 1980, frauduleusement soustrait les sommes de 39 450 francs au préjudice de la société générale, de 3 500 francs au préjudice de Nicole Z..., née A..., de 1 500 francs au préjudice de la société Logibat ? " ;
Attendu qu'il appert tant du libellé de cette question que des énonciations de l'arrêt de renvoi que si trois soustractions frauduleuses ont été réunies dans une question unique, ces soustractions ont été commises par l'accusé dans le même lieu et au même moment ;
Attendu qu'il en est de même des questions 19 et 37 relatives à des vols commis, les premiers à Montluçon le 12 février 1981 dans une agence de la société générale, les seconds le 26 août 1981 à la Roche-Posay dans une agence du Crédit agricole ;
Attendu que contrairement aux allégations du moyen, les questions critiquées ne sont pas entachées du vice de complexité ;
Qu'en effet lorsque au cours d'une même action plusieurs vols ont été commis au préjudice de personnes différentes dans un même lieu et au même moment, il suffit qu'une seule question soit posée à la Cour et au jury ;
D'où il suit que le moyen ne peut être accueilli ;
Sur le deuxième moyen de cassation, pris de la violation de l'article 309 du Code pénal, 349 du Code pénal, 349 du Code de procédure pénale, 8 de la déclaration des droits de l'homme et du citoyen, 2 du Code civil, ensemble violation du principe de non rétroactivité, manque de base légale ;
" en ce que les questions 5, 23, 25, 31, 60, 80, 82, 84, 86, 88, 90, 102, 104, 119 et 121 sont ainsi libellés :
" l'accusé Alain X... est-il coupable d'avoir à..., le..., volontairement porté des coups ou commis des violences ou voies de fait sur la personne de... " ; " alors que dans sa rédaction antérieure à la loi n° 83-466 du 10 juin 1983, l'article 309 du Code pénal ne punissait les violences ou voies de fait, quelles que soient les circonstances aggravantes, que si elles avaient entraîné une incapacité totale supérieure à 8 jours ; que faute pour les questions susvisées d'avoir mentionné si les victimes avaient subi une incapacité supérieure à 8 jours, l'arrêt attaqué s'avère privé de base légale " ;
Sur le troisième moyen de cassation, pris de la violation des articles 309 du Code pénal, 349 et 356 du Code de procédure pénale ; " en ce que les questions 45, 52, 55, 64, 67, 70, 75, 97, 108, 111 et 114 sont ainsi rédigées :
" l'accusé Alain X... est-il coupable d'avoir à..., le..., volontairement porté des coups ou commis des violences ou voies de fait sur la personne de... " et, les questions 46, 53, 56, 65, 68, 71, 76, 98, 109, 112 et 115 sont ainsi rédigées :
" les coups, violences ou voies de fait spécifiés à la question précédente ont-ils entraîné une maladie ou une incapacité totale de travail personnel pendant plus de 8 jours " ; " alors que la Cour et le jury doivent à peine de nullité être interrogés sur toutes les circonstances constitutives de l'infraction ; qu'ainsi, une question distincte ne pouvait être posée sur, d'une part la commission de violences et de voies de faits et, d'autre part, l'incapacité subie par la victime, l'incapacité de plus de 8 jours constituant un des éléments constitutifs de l'infraction de coups ou violences " ;
Lesdits moyens étant réunis ;
Attendu que la peine prononcée trouve son support légal dans les réponses affirmatives de la Cour et du jury aux questions régulièrement posées déclarant X... coupable de 27 vols avec port d'arme et d'une tentative de ce même crime ;
Qu'il n'y a pas lieu dès lors d'examiner la régularité des questions énumérées aux moyens et relatives à des délits connexes de coups ou violences volontaires passibles de peines correctionnelles ;
Qu'ainsi les moyens réunis doivent être écartés ;
Sur le quatrième moyen de cassation, pris de la violation de l'article 362 du Code de procédure pénale, manque de base légale ; " en ce que le procès-verbal des débats mentionne que la Cour et le jury condamnent à la majorité Alain X... à la peine de réclusion criminelle à perpétuité ; " alors que les décisions sur l'application de la peine se forment à la majorité absolue des votants ; que la mention du procès-verbal selon laquelle la peine a été prononcée à la majorité, ne met pas la Cour de Cassation en mesure de s'assurer que la majorité absolue, requise par le texte susvisé, a été atteinte " ;
Attendu que la feuille de questions porte mention de la décision prise par la Cour et le jury ; que cette mention est suivie de la signature du président et de celle du premier juré ;
Qu'ainsi il a été satisfait à toutes les prescriptions de l'article 364 du Code de procédure pénale, lequel n'exige pas qu'il soit en outre indiqué dans quelles conditions a été obtenue la majorité prescrite par l'article 362 du même Code en ce qui concerne la détermination de la peine ;
Que dès lors le moyen n'est pas fondé ;
Et attendu que la procédure est régulière ;
REJETTE les pourvois
Condamne les demandeurs aux dépens ;
Ainsi jugé et prononcé par la Cour de Cassation, chambre criminelle, en son audience publique, les jour, mois et an que dessus ;
Où étaient présents :
MM. Le Gunehec président, Diémer conseiller rapporteur, Zambeaux, Malibert, Guth, Milleville, Guilloux conseillers de la chambre, Pelletier conseiller référendaire, M. Robert avocat général, Mme Ferré greffier de chambre ;
En foi de quoi le présent arrêt a été signé par le président, le rapporteur et le greffier de chambre.