Sur le premier moyen, pris en ses deux branches :
Attendu, selon les énonciations des juges du fond, que l'APCAPLIS (Association de prévoyance des commerçants, artisans, professions libérales, industriels et leurs salariés) et l'APEP (Association pour la prévoyance dans l'enseignement privé) ont conclu avec la compagnie d'assurances Via un contrat d'assurance de groupe garantissant aux membres de ces associations, qui adhéreraient individuellement au système proposé, un régime de prévoyance ; que la compagnie d'assurances Via a fait gérer ce système par une société de courtage d'assurances, la societé Sofraco ;
Attendu que, par suite du défaut de paiement régulier par certains adhérents de leurs cotisations aux deux associations précitées, comme par suite de difficultés qui se sont élevées entre la compagnie Via et le courtier gestionnaire du système, la compagnie Via s'est estimée privée d'une partie des cotisations qui lui étaient dues ; que cette compagnie a alors avisé ces deux associations et tous les adhérents qu'elle procédait à une compensation entre ce qu'elle estimait lui être dû et ce qu'elle devait elle-même, et qu'elle suspendait donc toutes prestations aux adhérents pendant le temps nécessaire pour se rembourser ; que les associations ont assigné la compagie Via pour faire juger qu'elle ne pouvait opérer cette compensation ; que l'arrêt confirmatif attaqué (Rennes, 18 mars 1987) a accueilli leur demande ;
Attendu que la compagnie Via fait grief à cet arrêt d'avoir déclaré recevable l'action des deux associations, alors que, dans l'assurance de groupe, le souscripteur, qui n'est jamais l'assuré, n'aurait aucune qualité pour réclamer l'exécution des prestations promises par l'assureur, et alors, aussi, que le litige aurait eu pour objet le versement des prestations dues aux adhérents souscripteurs et non le paiement des primes dues à l'assureur, et que la cour d'appel aurait donc méconnu les termes du litige ;
Mais attendu, d'une part, que le stipulant d'une stipulation pour autrui a qualité pour exiger l'application du contrat dont il est le souscripteur ; que, d'autre part, le litige né de la prétention de l'assureur de faire jouer la compensation entre les sommes que, selon elle, lui devaient les associations et ce qu'il devait lui-même aux adhérents a été résolu dans les termes mêmes où il avait été soumis aux juges ; que le moyen, qui n'est pas fondé en sa première branche, manque en fait dans sa seconde ;
Et sur le second moyen :
Attendu qu'il est en outre reproché à la cour d'appel d'avoir statué comme elle a fait, alors, d'abord, que, dans une assurance pour le compte de qui il appartiendra, comme dans une stipulation pour autrui, les exceptions que l'assureur peut opposer au souscripteur sont également opposables au bénéficiaire ; alors, aussi, que lorsque deux dettes sont connexes, le juge ne peut écarter la compensation, motif pris de ce que l'une d'entre elles ne réunirait pas les conditions de liquidité et d'exigibilité ; alors, encore, que l'arrêt se serait contredit en énonçant à la fois que les souscripteurs étaient débiteurs d'arriérés de primes dont le quantum n'avait pu être déterminé et que la créance de l'assureur n'était pas certaine ; alors, également, que l'assureur aurait fait valoir dans des conclusions laissées sans réponse que ses cocontractants n'avaient jamais contesté ni le principe ni même le montant de leur dette, et alors, enfin, que la cour d'appel n'aurait pu énoncer que celui-ci aurait renoncé à exiger des souscripteurs le paiement de leurs arriérés de prime, sans constater l'existence d'actes manifestant sans équivoque la volonté de renoncer ;
Mais attendu que l'adhésion au contrat d'assurance de groupe, bien que conséquence d'une stipulation pour autrui, n'en crée pas moins un lien contractuel direct entre l'adhérent et l'assureur ; qu'il n'en est pas différemment lorsque ce contrat charge le souscripteur de l'encaissement des primes pour le compte de l'assureur ; que, du fait de ce lien, chaque adhérent a droit, lorsqu'il a payé sa prime, aux prestations prévues au contrat ; que s'il est possible à l'assureur d'opposer individuellement à un adhérent déterminé son absence de paiement, il ne saurait compenser indistinctement sa dette envers certains par sa créance envers d'autres ; qu'en constatant qu'il n'y avait pas identité de créancier et de débiteur, même si les associations avaient, dans leurs rapports avec l'assureur, reçu mandat de prélever les primes, et que la compagnie d'assurances n'était pas, dans ces conditions, en droit d'opposer la compensation dans les conditions où elle l'a fait, la cour d'appel a, indépendamment de tout autre motif, justifié sa décision ; que le moyen ne peut donc être accueilli en aucune de ses branches ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi