LA COUR DE CASSATION, PREMIERE CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le pourvoi formé par Mme Danièle B., divorcée K., en cassation d'un arrêt rendu le 10 décembre 1986 par la cour d'appel de Grenoble (1ère chambre), au profit de M. Claude K., défendeur à la cassation.
La demanderesse invoque à l'appui de son pourvoi, les deux moyens de cassation annexés au présent arrêt :
LA COUR, composée selon l'article L. 131-6, alinéa 2, du Code de l'organisation judiciaire, en l'audience publique du 9 mai 1989, où étaient présents :
M. Jouhaud, conseiller doyen faisant fonctions de président ; M. Camille Bernard, rapporteur ; M. Massip, conseiller ; M. Dontenwille, avocat général ; Mlle Ydrac, greffier de chambre
Sur le rapport de M. le conseiller Camille Bernard, les observations de Me Choucroy, avocat de Mme B., de la SCP Boré et Xavier, avocat de M. Claude K., les conclusions de M. Dontenwille, avocat général, et après en avoir délibéré conformément à la loi ; Attendu, selon les énonciations des juges du fond, que, par arrêt du 10 mars 1982, la cour d'appel de Grenoble a prononcé le divorce des époux K.-B., contractuellement séparés de biens ; que M. K. a, le 2 décembre 1982, assigné son ex-épouse pour, notamment, faire constater la révocation, par acte authentique du 5 octobre 1982, d'un don manuel fait à celle-ci au moyen d'un chèque de 120 000 francs, tiré le 30 janvier 1977, ayant servi à l'acquisition d'un appartement le lendemain 1er février 1977 pour le prix de 90 000 francs, et faire juger que la restitution des deniers donnés doit être égale à la valeur actuelle de l'immeuble ; Sur le premier moyen, pris en ses deux branches :
Attendu que Mme B. fait grief à l'arrêt attaqué (Grenoble, 10 décembre 1986) d'avoir prononcé la révocation du don manuel de 120 000 francs, constaté que l'épouse avait acquis un appartement avec une partie de cette somme, et dit que M. K. est en droit de prétendre, pour une partie du don manuel, à la valeur de l'appartement, alors, d'une part, que l'époux qui prétend révoquer une donation faite à son conjoint doit prouver que les fonds prétendument donnés provenaient exclusivement de son patrimoine personnel ; que, n'ayant pas constaté que le mari avait justifié d'une origine personnelle des fonds et que l'épouse était privée de tous biens personnels, la juridiction du second degré aurait privé sa décision de base légale ; alors, d'autre part, que si le prix d'acquisition a été payé pour partie seulement avec des deniers propres à l'autre conjoint, l'achat ne peut être considéré comme une donation dans son ensemble ; qu'il résulterait des motifs de l'arrêt attaqué qu'une partie au moins des deniers ayant servi à l'acquisition de l'immeuble provenait de fonds personnels à l'épouse, de sorte que cette décision serait encore privée de base légale ; Mais attendu que la cour d'appel constate que l'appartement a été acquis au moyen d'un chèque d'un montant de 120 000 francs - supérieur au prix d'acquisition augmenté des frais -, tiré sur le compte personnel du mari dont la situation matérielle était "confortable" ; que la femme ne participait pas aux activités professionnelles de son époux et que son compte bancaire n'avait enregistré que des opérations limitées à de faibles sommes ; que les deux biens propres antérieurement vendus par Mme B., "dans la mesure où son mari en serait comptable", n'étaient pas d'une valeur permettant de représenter la somme de 120 000 francs ; Que ces constatations et énonciations suffisent à justifier légalement la décision et que, la cour d'appel n'ayant pas dit qu'une partie des deniers provenait de fonds personnels à l'épouse, le moyen ne peut être accueilli en aucune de ses deux branches ; Sur le second moyen :
Attendu que Mme B. reproche encore à la cour d'appel d'avoir, pour estimer que la remise de la somme de 120 000 francs répondait non pas à un objectif fiscal mais à une intention libérale, énoncé que le mari n'avait pas demandé à son épouse de lui accorder un bail au début de l'année 1977, mais avait attendu que la procédure de divorce (introduite le 29 mars 1979) soit en cours, alors qu'il résulte de l'acte original produit, dont les termes auraient été méconnus, que le bail avait été consenti à compter du 1er juin 1977 ;
Mais attendu que le bail commercial produit, rédigé en la forme sous-seing privé, n'est pas daté et ne comporte que la signature d'une seule partie ; qu'il ne peut être reproché à la juridiction du second degré de n'avoir pas tenu compte d'un acte imparfait établi à une date inconnue ; que le grief alléguant une prétendue méconnaissance de ce document est donc dénué de portée et doit être écarté ; PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi ;