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31/05/1989 | FRANCE | N°87-15627

France | France, Cour de cassation, Chambre civile 1, 31 mai 1989, 87-15627


Attendu, selon les énonciations des juges du fond, que la ville d'Amiens a confié à la société Dégremont la réalisation d'une station d'épuration ; que la société Dégremont a sous-traité une partie de ces travaux à la société Lecat laquelle a elle-même sous-traité les travaux de fondation par pieux forés à l'entreprise Fondaco ; que le bureau d'Etudes GECTI avait été chargé des calculs de résistance et de la réalisation des plans d'exécution de ceux-ci ;

Attendu que des désordres sont survenus du fait de la rupture d'un certain nombre de pieux ; que la Compagn

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Attendu, selon les énonciations des juges du fond, que la ville d'Amiens a confié à la société Dégremont la réalisation d'une station d'épuration ; que la société Dégremont a sous-traité une partie de ces travaux à la société Lecat laquelle a elle-même sous-traité les travaux de fondation par pieux forés à l'entreprise Fondaco ; que le bureau d'Etudes GECTI avait été chargé des calculs de résistance et de la réalisation des plans d'exécution de ceux-ci ;

Attendu que des désordres sont survenus du fait de la rupture d'un certain nombre de pieux ; que la Compagnie française d'assurance européenne, assureur de la société Dégremont, a pris en charge avant toute réception des travaux par la ville d'Amiens la remise en état nécessaire pour une valeur de 2 921 595,31 francs ; qu'elle a fait assigner en remboursement de cette somme les deux entreprises sous-traitantes et leurs assureurs ainsi que la société GECTI ; que la cour d'appel a estimé que la responsabilité du dommage revenait à raison de 15 % à l'entreprise Dégremont, 55 % à l'entreprise Lecat, 15 % à l'entreprise Fondaco, et 15 % au bureau d'étude GECTI ; que, sous réserve de cette répartition définitive de la charge de l'indemnité, elle a donc condamné in solidum ces trois dernières sociétés ainsi que les compagnies UAP assureur de l'entreprise Lecat et Winterthur, assureur de l'entreprise Fondaco à rembourser à la société française européenne d'assurances 85 % de l'indemnité versée par celle-ci ;

Sur le premier moyen pris en ses deux branches et sur le quatrième moyen : (sans intérêt) ;

Mais sur le second moyen pris en ses trois premières branches :

Vu les articles 1134 du Code civil et L. 113-1 du Code des assurances ;

Attendu que, pour condamner l'UAP, assureur de l'entreprise Lecat, in solidum avec d'autres, envers la Compagnie française d'assurance européenne, la cour d'appel a retenu qu'étaient ambiguës, parce que présentées dans des colonnes, et ne constituaient donc pas une exclusion formelle et limitée, les dispositions qui, accordant la garantie de l'assureur pour les travaux effectués par les sous-traitants de l'assuré, en ce qui concerne sa responsabilité des articles 1792 et suivants du Code civil, écartaient toute garantie pour ceux qu'il n'avait pas exécutés lui-même, lorsque le sinistre était antérieur à leur réception ;

Attendu cependant qu'en statuant ainsi alors que la distinction établie par le contrat d'assurances et constatée par l'arrêt attaqué entre, d'une part, responsabilité des articles 1792 et suivants du Code civil, que l'entrepreneur a légalement l'obligation d'assurer même s'il n'exécute pas les travaux lui-même, et, d'autre part, assurance des sinistres survenus avant reception des travaux, soumise à la liberté contractuelle, était claire et précise, non contraire à la loi et ne comportait aucune exclusion de garantie, la cour d'appel a méconnu les conséquences légales de ses propres constatations et dénaturé le contrat d'assurance ;

Et sur le troisième moyen pris en ses deuxième et troisième branches :

Vu les articles 1792-6 du Code civil, L. 112-6, L. 243-8 A. 241-1 devenu A. 243-1 du Code des assurances et son annexe I ;

Attendu qu'il résulte du premier de ces textes que la réception qui fait courir la garantie décennale est l'acte par lequel le maître de l'ouvrage déclare accepter l'ouvrage avec ou sans réserves ; du second, que l'assureur peut opposer au tiers qui invoque le bénéfice de la police les exceptions opposables au souscripteur originel et des trois autres textes, que l'inopposabilité au bénéficiaire de l'indemnité de la franchise prévue au contrat ne joue qu'en matière d'assurance obligatoire de la responsabilité du constructeur, c'est-à-dire postérieurement à la réception ;

Attendu qu'en déclarant inopposable à la Compagnie française d'assurance européenne la franchise prévue par le contrat passé entre l'entreprise Fondaco, sous-traitante de l'entreprise Lecat, elle-même sous-traitante de l'entreprise Dégremont, avec son assureur la compagnie Winterthur, au motif qu'une réception des travaux avait eu lieu entre l'entreprise Lecat et l'entreprise Fondaco, alors que la ville d'Amiens n'ayant encore procédé à aucune r2ception, les parties se trouvaient dans la période où, les travaux demeurant en cours, la garantie décennale ne jouait pas encore, la cour d'appel a violé les textes susvisés ;

PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur la quatrième branche du deuxième moyen ni la première du troisième moyen :

CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il a condamné l'UAP in solidum avec d'autres envers la Compagnie française d'assurance européenne et, également, en ce qu'il a dit que la franchise stipulée dans le contrat d'assurance existant entre l'entreprise Fondaco et la compagnie Winterthur n'était pas opposable à la Compagnie française d'assurance européenne, l'arrêt rendu le 8 avril 1987, entre les parties, par la cour d'appel de Paris ; remet, en conséquence, quant à ce, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Versailles


Synthèse
Formation : Chambre civile 1
Numéro d'arrêt : 87-15627
Date de la décision : 31/05/1989
Sens de l'arrêt : Cassation partielle
Type d'affaire : Civile

Analyses

ASSURANCE RESPONSABILITE - Caractère obligatoire - Travaux du bâtiment - Franchise - Inopposabilité au bénéficiaire de l'indemnité - Conditions - Réception des travaux

CONTRAT D'ENTREPRISE - Responsabilité de l'entrepreneur - Assurance - Caractère obligatoire - Franchise à la charge de l'entrepreneur - Inopposabilité au tiers lésé

Il résulte des articles L. 243-8 et A. 241-1, devenu A. 243-1, du Code des assurances et de son annexe I que l'inopposabilité au bénéficiaire de l'indemnité de la franchise prévue au contrat d'assurance ne joue qu'en matière d'assurance obligatoire de la responsabilité du constructeur, c'est-à-dire postérieurement à la réception des travaux, qui, selon l'article 1792-6 du Code civil, est l'acte par lequel le maître de l'ouvrage déclare accepter l'ouvrage avec ou sans réserves .


Références :

Code civil 1792-6
Code des assurances L243-8, A241-1 devenu A 243-1

Décision attaquée : Cour d'appel de Paris, 08 avril 1987


Publications
Proposition de citation : Cass. Civ. 1re, 31 mai. 1989, pourvoi n°87-15627, Bull. civ. 1989 I N° 216 p. 144
Publié au bulletin des arrêts des chambres civiles 1989 I N° 216 p. 144

Composition du Tribunal
Président : Président : M. Jouhaud, conseiller doyen faisant fonction
Avocat général : Avocat général :M. Charbonnier
Rapporteur ?: Rapporteur : M. Jouhaud, conseiller doyen faisant fonction
Avocat(s) : Avocats :la SCP Masse-Dessen, Georges et Thouvenin, M. Odent .

Origine de la décision
Date de l'import : 14/10/2011
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:1989:87.15627
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