LA COUR DE CASSATION, PREMIERE CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le pourvoi formé par la société Euroflex, société anonyme dont le siège social est sis zone industrielle de Bray-sur-Seine, Bray-sur-Seine (Seine-et-Marne),
en cassation d'un arrêt rendu le 26 juin 1985 par la cour d'appel de Poitiers (chambre civile, 1ère section), au profit :
1°/ de la société anonyme Hervé Thermique dont le siège est au ... (Deux-Sèvres),
2°/ de la CAMIF, société coopérative des adhérents de la MACIF, dont le siège social est à Trévin de X..., Niort (Deux-Sèvres),
3°/ de la Mutuelle du Mans, dont le siège social est au ...,
4°/ de la compagnie d'assurances PRESERVATRICE FONCIERE, venant aux droits et obligations de la compagnie LA PRESERVATRICE, dont le siège social est au ... (9ème),
défenderesses à la cassation. La demanderesse invoque, à l'appui de son pourvoi, les trois moyens de cassation annexés au présent arrêt ; LA COUR, en l'audience publique du 21 février 1989, où étaient présents :
M. Ponsard, président ; M. Lesec, rapporteur ; MM. Y..., Z..., Grégoire, Kuhnmunch, Fouret, Thierry, Averseng, Pinochet, Mabilat, conseillers ; M. Charruault, conseiller référendaire ; M. Sadon, premier avocat général ; Mlle Ydrac, greffier de chambre ; Sur le rapport de M. le conseiller Lesec, les observations de la SCP Masse-Dessen, Georges et Thouvenin, avocat de la société Euroflex, de Me Choucroy, avocat de la société Hervé Thermique, de la SCP Coutard et Mayer, avocat de la compagnie d'assurances Préservatrice foncière, les conclusions de M. Sadon, premier avocat général, et après en avoir délibéré conformément à la loi ;
Attendu, selon les énonciations de l'arrêt attaqué (Poitiers, 26 juin 1985), que la société Euroflex a vendu du matériel à la société Hervé Thermique, chargée par la CAMIF (coopérative des adhérents de la mutuelle assurance des instituteurs de France-MACIF) de la réalisation de travaux de chauffage et de climatisation pour des bâtiments en construction ; qu'à la suite d'un sinistre ayant pour cause la défectuosité du matériel livré par Euroflex, la CAMIF, qui a pour assureur la "Mutuelle du Mans", a assigné en responsabilité la société Hervé Thermique, qui a elle-même appelé en garantie Euroflex ; que, celle-ci a appelé en la cause la compagnie "La Préservatrice foncière", son assureur ; que la cour d'appel a fait droit tant à l'action dirigée par la CAMIF contre Hervé Thermique qu'à celle intentée par cette société contre Euroflex ; que celle-ci, par contre, a été déboutée de son action en garantie contre La Préservatrice foncière ; Sur le premier moyen pris en ses quatre branches :
Attendu qu'Euroflex fait grief à l'arrêt attaqué d'avoir ainsi admis le bien fondé du recours exercé à son encontre par Hervé Thermique au motif que ne pouvait être opposée à cette société la clause des conditions générales de vente limitant à six mois le délai de garantie des tuyaux flexibles défectueux, invoquée par Euroflex et que l'action en garantie dirigée contre elle n'était pas forclose, alors que, selon le moyen, d'une part, en condamnant Euroflex sur le fondement d'une garantie conventionnelle de trois ans, sans préciser selon quelles modalités et sur quelles preuves un tel engagement avait été contracté, les juges d'appel ont privé leur décision de base légale ; alors, d'autre part, qu'ils se sont abstenus de répondre aux conclusions d'appel d'Euroflex par lesquelles celle-ci s'était appropriée les motifs du jugement infirmé qui, pour débouter Hervé Thermique, avait retenu que, mentionné sur de simples documents publicitaires, le délai de garantie de trois ans ne pouvait prévaloir sur celui de six mois précisé aux conditions générales de vente dont Hervé Thermique avait eu nécessairement connaissance ; alors, de troisième part, qu'en retenant un document qui n'avait pas été invoqué par Hervé Thermique dans ses conclusions et dont il n'a pas été constaté qu'il eût été contradictoirement débattu, les juges du second degré ont violé l'article 16 du nouveau Code de procédure civile ; alors, enfin, qu'en se fondant sur une correspondance d'Euroflex par laquelle celle-ci se bornait à indiquer à Hervé Thermique qu'elle "fera face" à ses éventuelles responsabilités, pour en déduire une renonciation d'Euroflex à soulever la forclusion résultant de la limitation à six mois de la garantie du matériel défectueux livré, la cour d'appel a violé l'article 1273 du Code civil ;
Mais attendu que, pour écarter la forclusion invoquée par Euroflex, l'arrêt attaqué a retenu le caractère non équivoque de l'engagement que cette société a souscrit, postérieurement au sinistre, comme à l'expiration de la garantie de six mois, dans une correspondance qui, adressée à Hervé Thermique, assurait celle-ci que, "de toutes façons", Euroflex ne la laissera pas seule vis-à-vis de son client, la CAMIF ; qu'ainsi, abstraction faite de motifs surabondants dont font état les autres branches du moyen, la cour d'appel a légalement justifié sa décision et répondu aux conclusions invoquées ; que le moyen ne peut être accueilli en aucune de ses branches ; Sur le deuxième moyen pris en ses deux branches :
Attendu qu'Euroflex fait encore grief à la cour d'appel de l'avoir déboutée de son recours en garantie contre La Préservatrice foncière, alors que, selon le moyen, d'abord, la correspondance invoquée constituant un engagement de l'assureur opposable à ce dernier, l'arrêt attaqué a violé l'article 1143 du Code civil, et alors, ensuite, que les juges du second degré ont laissé sans réponse les conclusions déposées, à titre subsidiaire, par Euroflex, selon lesquelles, même à supposer que la lettre signée par l'assureur n'ait pas valeur d'engagement exprès, la compagnie d'assurances, en l'adressant à l'assuré, ainsi dispensé de prendre par ailleurs une protection spéciale, a commis à son égard une faute dont elle doit réparation en le garantissant des condamnations prononcées ; Mais attendu que la cour d'appel a relevé que la lettre reçue par Euroflex, lui transmettant le règlement relatif à un autre sinistre dont cette société a bénéficié de la part de La Préservatrice foncière, rappelait seulement la teneur de certaines clauses de la police relatives aux conditions d'un maintien éventuel des garanties après résiliation du contrat et ne constituait pas un avenant pour Euroflex, d'autant que cette société n'ignorait pas les conditions, précisées par la police, autorisant l'extension de ces garanties au delà de la période de validité du contrat ; qu'ayant vérifié que n'était satisfaite, en l'espèce, aucune de ces conditions, elle a légalement justifié sa décision et a ainsi répondu aux conclusions invoquées ; que le moyen ne peut être accueilli en aucune de ses branches ; Et sur le troisième moyen :
Attendu qu'Euroflex fait enfin reproche à l'arrêt attaqué d'avoir dit que la somme de 76 952,52 francs, qu'elle a été condamnée à payer à Hervé Thermique, portera intérêts au taux légal à compter de la date de l'assignation et que les intérêts dus pour une année entière porteront eux-mêmes intérêts, alors que, selon le moyen, cette somme, qui correspond, non pas au remboursement du prix du matériel défectueux fourni, mais à sa vérification et à son remplacement, devant s'analyser comme une créance de dommages-intérêts susceptible de porter intérêts seulement à compter du jour de l'arrêt, la cour d'appel a violé les articles 1153 et 1154 du Code civil ;
Mais attendu qu'ayant constaté que, représentant le montant des travaux de réfection facturés par Hervé Thermique à la CAMIF et non réglés par celle-ci, la somme de 76 952,52 francs était prédéterminée, la cour d'appel a pu en mettre les intérêts à la charge d'Euroflex à compter de l'assignation et dire que, dus pour une année entière, ils porteront eux-mêmes intérêts ; que le moyen doit donc être également rejeté ; PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi ;