LA COUR DE CASSATION, PREMIERE CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le pourvoi formé par Monsieur Jean-Baptiste Z..., propriétaire-éleveur, demeurant à Noé (Haute-Garonne),
en cassation d'un arrêt rendu le 27 mars 1986 par la cour d'appel de Bordeaux (1ère chambre), au profit :
1°/ du GAEC DE LA MOLINIE, dont le siège est "Piste d Sillac" à Salles (Gironde),
2°/ de Monsieur A..., demeurant Port du Noyer à Arveyres (Gironde), pris en sa qualité de syndic du règlement judiciaire du GAEC DE LA MOLINIE,
3°/ de Monsieur F Y..., pris tant en son nom personnel qu'en sa qualité d'associé co-gérant, demeurant au siège du GAEC Piste de Sillac à Salles (Gironde),
4°/ de Monsieur Jean-Michel X..., pris tant en son nom personnel qu'en sa qualité d'associé co-gérant, demeurant au siège du GAEC Piste de Sillac à Salles (Gironde),
défendeurs à la cassation ; Le demandeur invoque, à l'appui de son pourvoi, les trois moyens de cassation annexés au présent arrêt ; LA COUR, en l'audience publique du 22 novembre 1988, où étaient présents :
M. Ponsard, président ; M. Zennaro, rapporteur ; M. Fabre, président faisant fonctions de conseiller ; MM. C..., D..., Grégoire, Lesec, Fouret, Averseng, Pinochet, conseillers ; Mme Gié, conseiller référendaire ; M. Sadon, premier avocat général ; Mlle Ydrac, greffier de chambre ; Sur le rapport de M. le conseiller Zennaro, les observations de Me Choucroy, avocat de M. Z..., de la SCP Peignot et Garreau, avocat du GAEC de la Molinie et de MM. A..., Y... et X..., pris ès qualités de syndics, les conclusions de M. Sadon, premier avocat général, et après en avoir délibéré conformément à la loi ;
Attendu, selon les énonciations des juges du fond, que le groupement agricole d'exploitation en commun (GAEC) dit "de la Molinie", constitué en 1979 entre MM. X... et Y..., dont l'objet était notamment l'élevage de brebis de race "Romanov" réputées pour leur fertilité, a acquis des lots d'animaux auprès de divers éleveurs, dont, en mai et juin 1980, 140 agnelles et 12 béliers provenant du cheptel de M. JB Z... ; que, lors de l'agnelage de fin 1980 début 1981, une perte importante, de l'ordre de 50 %, a été constatée à la suite d'avortements attribués, après analyses, à la maladie dite "chlamydiose" ; qu'après expertise, le GAEC, imputant la contamination de son troupeau aux bêtes livrées par M. Z..., a assigné ce dernier en responsabilité et en réparation de son préjudice ; que les premiers juges ont estimé que ces pertes étaient imputables par moitié à chacune des parties ; qu'en cause d'appel, le GAEC ayant été mis en règlement judiciaire, M. A..., syndic, est intervenu à l'instance ; que la cour d'appel (Bordeaux, 27 mars 1986) a retenu la responsabilité entière de M. Z... ; Sur les deux premiers moyens, pris en leurs diverses branches, tels qu'ils sont formulés au mémoire ampliatif et reproduits en annexe au présent arrêt :
Attendu d'abord, qu'après avoir constaté que, dans son rapport du 15 février 1984, l'expert judiciaire avait relaté que, sur les dix cheptels provenant d'éleveurs différents et ayant concouru à la formation du troupeau du GAEC, seuls deux d'entre eux avaient subi une atteinte de chlamydiose, que cette affection était la seule cause des avortements et que, seul, parmi les cheptels d'origine, celui de M. Z... en était sûrement atteint, la cour d'appel a relevé "qu'il n'a pu être établi si le vendeur avait indiqué à l'acquéreur la vaccination pratiquée par lui sur le cheptel d'origine, mais qu'il est certain qu'il n'a pas mentionné l'existence de la chlamydiose dans son cheptel et que les risques que les animaux vendus faisaient courir au cheptel d'origine en l'absence de vaccination, n'ont pas été clairement formulés" ; que les juges du second degré retiennent encore que l'expert a étudié minutieusement les conditions sanitaires des différents lots d'animaux acquis par le GAEC, en se renseignant notamment auprès des vétérinaires traitants et qu'il a pu ainsi éliminer toute suspicion en ce qui concerne les cheptels indemnes, vaccinés ou non, ainsi que le cheptel de M. B..., infecté en 1968 et 1976, mais vacciné et assaini, et dont les agnelles présentes au GAEC en octobre 1980 n'ont pas une proportion significative d'avortement ; qu'appréciant souverainement les éléments de preuve qui lui étaient soumis, la cour d'appel a estimé qu'il était établi que la contamination par la chlamydiose était imputable aux animaux livrés par M. Z... ; qu'elle a ainsi légalement justifié sa décision ;
Attendu, ensuite, que la cour d'appel, qui a constaté qu'il résultait du rapport d'expertise que le GAEC n'était pas à même de déceler le vice dont était atteint le troupeau vendu par M. Z... lors de la livraison de ces animaux, a pu estimer que, compte tenu des éléments de la cause, les dirigeants de ce groupement agricole n'étaient pas tenus, "en tant que professionnels, de rechercher d'eux-mêmes les vices qu'on recherche habituellement dans la profession" ; qu'ayant également relevé que les médiocres conditions dans lesquelles l'élevage du GAEC avait commencé pendant l'hiver 1979-1980, tant en ce qui concerne l'accouplement des bêtes qu'en ce qui concerne leur logement et leur nourriture, entraînant alors une forte mortalité, étaient sans incidence sur les résultats de l'agnelage de la saison suivante, au cours de laquelle ces conditions s'étaient nettement améliorées, elle a pu en déduire que le comportement du GAEC n'était pas de nature à établir sa responsabilité dans les pertes dues à la chlamydiose ; D'où il suit qu'aucun des deux premiers moyens n'est fondé ; Et sur le troisième moyen, tel qu'il est formulé au mémoire ampliatif et reproduit en annexe au présent arrêt :
Attendu qu'en décidant qu'il convenait de fixer le préjudice dont M. Z... doit assurer l'indemnisation à l'égard du GAEC à la somme proposée par l'expert (630 175 francs) dans son rapport antérieur à la demande au fond, et que cette somme sera assortie des intérêts légaux à compter de l'assignation introductive d'instance, la cour d'appel a implicitement mais nécessairement considéré que ces intérêts étaient alloués à titre de dommages-intérêts compensatoires et a ainsi légalement justifié sa décision ; D'où il suit que le troisième moyen ne peut être accueilli ; PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi ;