LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le pourvoi formé par la société CREDIT FONCIER de MONACO, dont le siège social est ...,
en cassation d'un arrêt rendu le 29 novembre 1985 par la cour d'appel d'Aix-en-Provence (2ème chambre), au profit de la société PELLEGRINO CAVE WASHINGTON, société à responsabilité limitée, dont le siège social est ... (Alpes-Maritimes),
défenderesse à la cassation ; La demanderesse invoque à l'appui son pourvoi, un moyen unique de cassation annexé au présent arrêt ; LA COUR, composée selon l'article L. 131-6, alinéa 2, du Code de l'organisation judiciaire, en l'audience publique du 15 novembre 1988, où étaient présents :
M. Baudoin, président ; M. Lacan, conseiller référendaire rapporteur, M. Defontaine, conseiller, M. Jeol avocat général, Mme Arnoux, greffier de chambre ; Sur le rapport de M. le conseiller référendaire Lacan, les observations de la SCP Guiguet, Bachellier et Potier de la Varde, avocat de la société Crédit Foncier de Monaco, les conclusions de M. Jeol, avocat général, et après en avoir délibéré conformément à la loi ; Donne défaut contre la société Pellegrino-Cave Washington ; Sur le moyen unique :
Attendu qu'il résulte des énonciations de l'arrêt confirmatif attaqué (Aix-en-provence, 29 novembre 1985) que la société Cogel France, dont "l'animateur" et proprétaire de la moitié du capital social était M. X..., a tiré le 13 février 1981 sur la société Pellegrino-Cave Washington (la société Pellegrino) qui l'a acceptée, une lettre de change à échéance du 30 janvier 1983 ; que la société Muroge, dont le fondé de pouvoir était également M. X..., a endossé cet effet et l'a fait escompter le 3 novembre 1982 par son banquier le Crédit Foncier de Monaco (le CFM) ; qu'il est apparu que M. X... avait obtenu de la société Pellegrino la signature de la lettre de change au moyen de procédés frauduleux ; que la société Pellegrino ayant refusé de payer l'effet litigieux, a été assignée par le CFM ;
Attendu que le CFM reproche à la cour d'appel de l'avoir débouté de sa demande en paiement alors, selon le pourvoi, que c'est à la date où l'effet lui est remis que l'on doit apprécier si le porteur avait conscience d'agir au détriment du tiré en acquérant cet effet ; qu'ainsi la cour d'appel, qui constate que la banque a escompté le 3 novembre 1982 une lettre de change émise par une société Cogel France en représentation de marchandises, et que ce n'est que le 12 janvier 1983 que M. X..., animateur de la société tireur et venderesse de la marchandise a été condamné pour escroquerie par la juridiction répressive, n'a pu, sans refuser de tirer de ses propres énonciations les conséquences légales qui en découlent, en violation de l'article 121 du Code de commerce, décider qu'à la date de l'escompte le banquier avait connaissance de l'exception résultant de l'illicéité de la traite découlant elle-même du vice affectant le rapport fondamental ; Mais attendu que la cour d'appel, par une appréciation souveraine des éléments de preuve qui lui étaient soumis, a retenu que le CFM ne pouvait ignorer, dès la date de l'escompte, que la cause de la lettre de change était illicite ; qu'elle en a déduit à juste titre qu'en acquérant l'effet litigieux, le CFM avait agi sciemment au détriment du tiré accepteur ; que le moyen n'est pas fondé ; PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi ;