LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le pourvoi formé par Monsieur X..., demeurant à Saussignac (Dordogne), Sigoules,
en cassation d'un arrêt rendu le 23 février 1987 par la cour d'appel de Bordeaux (2ème chambre), au profit de :
1°) Madame Z... DE LA SOURCE, demeurant ... (Yvelines) ; 2°) Monsieur Joseph A...
C..., demeurant "Pouthet", Eymet (Dordogne) ; 3°) Madame Denise B..., demeurant "le Gilette", Eymet (Dordogne) ; défendeurs à la cassation ; Le demandeur invoque à l'appui de son pourvoi, un moyen unique de cassation annexé au présent arrêt ; LA COUR, composée selon l'article L. 131-6, alinéa 2, du Code de l'organisation judiciaire, en l'audience publique du 25 octobre 1988, où étaient présents :
M. Baudoin, président, M. Sablayrolles, conseiller rapporteur, M. Perdriau, conseiller, M. Lacan, conseiller référendaire, M. Raynaud, avocat général, Mme Arnoux, greffier de chambre ; Sur le rapport de M. le conseiller Sablayrolles, les observations de Me Parmentier, avocat de M. X..., de la SCP Riché, Blondel et Thomas-Raquin, avocat de Mme Y... et M. C..., les conclusions de M. Raynaud, avocat général, et après en avoir délibéré conformément à la loi ; Donne défaut contre M. B... ; Sur le moyen unique, pris en sa première branche :
Vu l'article 1585 du Code civil ;
Attendu qu'il résulte des énonciations de l'arrêt attaqué que Mme Z... de la Source et M. C..., ayant en chai 172 hl de vin dont ils étaient chacun propriétaire pour moitié et qu'ils venaient d'être autorisés à commercialiser à raison de 140 hl en produit d'appelation contrôlée et de 32 hl en produit de consommation courante, ont recherché un acquéreur par l'entremise de Mme B..., courtier ; qu'uncontrat conclu verbalement avec M. X... a donné lieu, le 26 avril 1984, à l'enregistrement au comité interprofessionnel des vins de la région de Bergerac de deux bordereaux non datés relatifs à la vente à ce dernier de deux quantités de 70 hl de vin d'appelation contrôlée pour un prix déterminé ; qu'il était mentionné sur ces bordereaux établis le jour du contrat et signés par M. X..., que la marchandise devait être enlevée par l'acheteur dans le délai d'un mois ; que ce dernier n'a cependant commencé à en prendre livraison que le 22 juin 1984 et ce, à raison de 40 hl, puis a refusé de continuer à le retirer car le taux d'acidité volatil était trop élevé ; qu'un séquestre,
désigné en référé, ayant constaté que le vin était effectivement piqué, a livré en vinaigrerie la quantité restant dans le chai ; que Mme Z... de la Source et M. C... ont alors engagé contre M. X... une action tendant au paiement du prix stipulé au contrat ; Attendu que, pour condamner M. X... au paiement de ce prix, la cour d'appel, déliassant la motivation des premiers juges qui avaient estimé que la vente était faite en bloc comme portant sur la totalité de la récolte en chai, a énoncé qu'il fallait s'en ...ir aux mentions des deux bordereaux puis a retenu que l'acheteur se prévalait vainement d'un non transfert des risques puisqu'il avait acheté une quantité déterminée d'un vin déterminé et qui avait péri dans sa totalité, au point que les vendeurs ne pouvaient remédier à la perte en fournissant l'équivalent ; Attendu qu'en se déterminant ainsi, après avoir implicitement constaté qu'il s'agissait d'une vente à la mesure, et sans rechercher si, avant la dégradation du vin, la quantité vendue avait fait l'objet d'une individualisation de nature à opérer le transfert de propriété et des risques ou si M. X... était constitué en demeure de prendre part au mesurage et de procéder à l'enlèvement, la cour d'appel n'a pas donné de base légale à sa décision au regard du texte susvisé ; Sur le moyen unique, pris en sa seconde branche :
Vu l'article 1137 du Code civil ;
Attendu que pour condamner M. X... au paiement de l'intégralité du prix, la cour d'appel a énoncé que l'acheteur avait manqué à ses obligations en ne retirant pas le vin avant le 26 mai 1984 ce qui le rendait responsable même s'il avait ignoré létat des installations de ses cocontractants ; Attendu qu'en se déterminant ainsi sans avoir recherché, comme l'y invitaient les conclusions de M. X..., si l'on pouvait reprocher aux vendeurs un manquement à l'obligation de conservation du vin, la cour d'appel n'a pas donné de base légale à sa décision au regard du texte susvisé ; PAR CES MOTIFS :
CASSE ET ANNULE, dans toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 23 février 1987, entre les parties, par la cour d'appel de Bordeaux ; remet, en conséquence, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de toulouse ;