LA COUR DE CASSATION, PREMIERE CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le pourvoi formé par Madame B... née Andrée C..., demeurant à Marchiennes (Nord), rue Fernand Rombeau,
en cassation d'un arrêt rendu le 9 mai 1986 par la cour d'appel de Douai (3ème Chambre), au profit de :
1°) Madame Fernande A... épouse Y..., demeurant à Metz (Moselle), ...,
2°) LA CAISSE PRIMAIRE D'ASSURANCE MALADIE DES TRAVAILLEURS SALARIES DE L'ARRONDISSEMENT DE DOUAI, dont le siège est à Douai (Nord), avenue du Maréchal Leclerc,
défenderesses à la cassation ; La demanderesse invoque à l'appui de son pourvoi, le moyen unique de cassation annexé au présent arrêt ; LA COUR, en l'audience publique du 6 juillet 1988, où étaient présents :
M. Ponsard, président ; Mme Gié, conseiller référendaire rapporteur ; MM. X... Bernard, Barat, Massip, Viennois, Grégoire, Zennaro, Bernard de Saint-Affrique, Thierry, conseillers ; Mme Crédeville, conseiller référendaire ; Mme Flipo, avocat général ; Mlle Ydrac, greffier de chambre ; Sur le rapport de Mme Gié, conseiller référendaire, les observations de la SCP Rouvière, Lepitre et Boutet, avocat de Mme C..., de Me Jacoupy, avocat de Mme Z..., les conclusions de Mme Flipo, avocat général, et après en avoir délibéré conformément à la loi ; Donne défaut contre la Caisse Primaire d'Assurance Maladie des Travailleurs Salariés de l'Arrondissement de Douai ; Sur le moyen unique, pris en ses trois branches :
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Douai, 9 mai 1986) qu'en exécution d'un traitement médical prescrit à Mme Z... pour soigner un abcès dentaire, Mme B..., infirmière, a pratiqué sur cette dernière une série d'injections intra-musculaires de "Velocef" ; qu'alors que les dix premières piqûres n'avaient entraîné aucune réaction anormale, Mme Z... a ressenti, à la onzième intervention, des douleurs immédiates et une insensibilité du pied qui l'ont empêchée de regagner seule son domicile ; qu'une paralysie du nerf sciatique poplité externe entraînant une paralysie des muscles antérieurs de la jambe est apparue dans les jours suivants et que les traitements mis en place ultérieurement n'ont apporté aucune amélioration ; que Mme Z... a assigné Mme B... pour faire juger qu'elle était responsable de son préjudice ; Attendu que Mme B... fait grief à l'arrêt d'avoir fait droit à cette demande, alors, selon le moyen, d'une part, que l'infirmière ne peut être tenue pour responsable que de ses fautes caractérisée lesquelles ne peuvent être déduites des conséquences dommageables de l'acte qu'elle a effectué ; que, dès lors, l'arrêt, qui constate que la piqûre avait été apparemment faite dans les règles de l'art, ne pouvait retenir l'existence d'une faute du seul fait des douleurs ressenties par Mme Z... et de l'insensibilité de son pied, ce qui excluait précisément une atteinte directe du nerf sciatique qui seule pouvait être considérée comme fautive ; qu'en statuant ainsi, la cour d'appel s'est contredite et a entaché sa décision d'un manque de
base légale au regard de l'article 1147 du Code civil, et alors, d'autre part, que si l'expert a énoncé que, s'agissant d'une femme petite et maigre, il fallait n'enfoncer l'aiguille habituelle que partiellement, il n'a jamais retenu que l'acte professionnel accompli par Mme B... revêtait un caractère fautif ; qu'en retenant une faute à l'encontre de l'infirmière, la cour d'appel a dénaturé le rapport de l'expert ;
Mais attendu que l'arrêt énonce justement que l'infirmière, tenue, comme le médecin, d'une obligation de moyen doit prendre toutes les précautions qui s'imposent compte tenu, notamment, de la morphologie du patient et de la nocivité du produit qu'elle injecte ; que si l'arrêt relève que l'injection a été "apparemment" effectuée dans les règles de l'art en ce qui concerne son siège et la position du malade, il retient par contre que Mme B... a injecté, sinon dans le nerf sciatique, tout au moins à proximité immédiate, un produit qui a nécessairement irradié et dont elle ne pouvait ignorer le caractère particulièrement "agressif" pour les tissus nerveux ; que l'arrêt précise encore, sans dénaturer le rapport de l'expert, qu'en raison de la petite taille et du faible poids du sujet, il aurait fallu utiliser une aiguille plus petite ou n'enfoncer l'aiguille habituelle que partiellement ; qu'ainsi, la cour d'appel, qui ne s'est pas contredite, a caractérisé la faute commise par Mme B... dans l'accomplissement de son acte professionnel ; que la décision est légalement justifiée et que le moyen n'est fondé en aucune de ses branches ; PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi ;