LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le pourvoi formé par la BANQUE NATIONALE DE PARIS, société anonyme, dont le siège social est à Paris (9ème), ...,
en cassation d'un arrêt rendu le 23 janvier 1986 par la cour d'appel de Douai (2ème chambre civile), au profit de Monsieur Lucien X..., demeurant à Bailleul (Nord), rue du Mont Noir,
défendeur à la cassation ; La demanderesse invoque à l'appui de son pourvoi, le moyen unique de cassation annexé au présent arrêt ; LA COUR, en l'audience publique du 20 avril 1988, où étaient présents :
M. Baudoin, président, M. Peyrat, rapporteur, MM. C..., A..., Z..., Le Tallec, Patin, Bézard, Bodevin, Mme B..., M. Plantard, conseillers, Mlle Y..., M. Le Dauphin, conseillers référendaires, M. Cochard, avocat général, Mme Arnoux, greffier de chambre ; Sur le rapport de M. le conseiller Peyrat, les observations de la SCP Defrenois et Levis, avocat de la Banque Nationale de Paris, de la SCP Riché, Blondel et Thomas-Raquin, avocat de M. X..., les conclusions de M. Cochard, avocat général, et après en avoir délibéré conformément à la loi ; Sur le moyen unique, pris en ses deux branches :
Attendu qu'il résulte des énonciations de l'arrêt attaqué (Douai, 23 janvier 1986) que M. X... livrait des céréales à la société Soval qui lui fournissait des aliments pour bétail ; que la société Soval a tiré sur M. X... une lettre de change ; que cet effet, non accepté, a été escompté par la Banque Nationale de Paris (la banque) ; que celle-ci a assigné M. X... en paiement de la lettre de change ;
Attendu que la banque fait grief à la cour d'appel de l'avoir déboutée de sa demande, alors, selon le pourvoi, d'une part, que M. X... ne contestait pas avoir reçu de la société Soval des denrées pour une valeur correspondant au montant de la traite litigieuse, mais réclamait le bénéfice de la compensation en alléguant avoir fourni à cette société des céréales pour un montant au moins égal, ce qui était expressément contesté par la banque ; qu'il incombait donc à M. X..., lequel excipait d'une compensation, d'apporter les éléments de preuve de nature à la justifier ; qu'en statuant ainsi, la cour d'appel a méconnu les termes du litige et violé l'article 4 du nouveau Code de procédure civile, et a renversé la charge de la preuve, au mépris des dispositions de l'article 1315 du Code civil, alors, d'autre part, que, la cour d'appel a omis de répondre aux conclusions de la banque faisant valoir que les livraisons de M. X..., réceptionnées par la société Soval, avant la date de l'escompte, ont été déduites sur les factures de cette société, de telle sorte qu'elles se trouvent d'ores et déjà compensées, la traite impayée représentant ainsi le reste dû par M. X... à la société Soval ; Mais attendu qu'ayant relevé que M. X... et la société Soval avaient conclu un accord instituant une compensation entre les valeurs des produits livrés par chacune des parties et impliquant la connexité des opérations effectuées dans le cadre du compte, établi entre elle, la cour d'appel, en constatant, dans l'exercice de son pouvoir souverain d'appréciation des éléments de preuve qui lui étaient soumis, que la société Soval n'avait pas démontré qu'elle ait payé à M. X... toutes les livraisons effectuées avant la clôture du compte à l'époque de l'échéance de la lettre de change et qu'elle se soit trouvée créancière de celui-ci pour le montant de cet effet, a fait ressortir qu'exerçant l'action née de la provision et ayant la charge d'établir l'existence, à la date d'échéance de l'effet, d'une créance du tireur sur le tiré qui ne pouvait résulter que d'un solde créditeur du compte en faveur de la société Soval, celle-ci avait échoué dans cette démonstration ; qu'en l'état de ces énonciations et constatations, sans méconnaître les termes du litige ni inverser la charge de la preuve et répondant aux conclusions invoquées, la cour d'appel a justifié sa décision ; d'où il suit que le moyen n'est fondé ni en l'une ni en l'autre de ses branches ; PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi ;