LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, en son audience publique, tenue au Palais de Justice, à PARIS, le vingt-deux mars mil neuf cent quatre vingt huit, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le rapport de M. le conseiller MORELLI, les observations de la société civile professionnelle Jean et Didier LE PRADO et de la société civile professionnelle BORE et XAVIER, avocats en la Cour, et les conclusions de Mme l'avocat général PRADAIN ; Statuant sur les pourvois formés par :
- Y... Christophe,
- LES CONSORTS X...,
parties civiles,
contre un arrêt du 8 janvier 1986 de la cour d'appel de Versailles, (7ème chambre) qui, ayant relaxé Z... des chefs d'homicide et de blessures involontaires, et mis hors de cause la société Loireumat, civilement responsable, les a déboutés de leurs demandes ; Joignant les pourvois en raison de la connexité ; Vu le mémoire produit, commun aux demandeurs, et le mémoire en défense ; Sur le moyen unique de cassation, pris de la violation des articles 319 et 320 du Code pénal, 1382 du Code civil, 485 et 593 du Code de procédure pénale, dénaturation du procès-verbal de gendarmerie, défaut de motifs et manque de base légale ; " en ce que l'arrêt attaqué a relaxé Z..., prévenu d'homicide et blessures involontaires et débouté, en conséquence les parties civiles de leur demande ; " aux motifs que aucune faute n'est établie à la charge de Z... lequel s'est engagé dans sa manoeuvre à un moment où il se trouvait dans l'impossibilité absolue d'apercevoir la voiture Renault et qui, au moment du choc, avait accompli la majeure partie de sa traversée, puisqu'il a été heurté à l'arrière droit de sa remorque, ne pouvait plus prendre aucune mesure pour éviter la collision ; " alors qu'il résulte du procès-verbal de gendarmerie que le choc s'est produit à hauteur du pneumatique arrière droit du tracteur d'où il suit que Z... commençait sa manoeuvre ; que son véhicule obstruait la chaussée qu'il n'a pris aucune mesure pour éviter la collision et que c'est par suite d'une grave dénaturation du procès-verbal de gendarmerie que la cour d'appel a statué comme elle l'a fait et qu'elle a ainsi violé les textes visés au moyen " ;
Attendu qu'il appert de l'arrêt attaqué qu'hors agglomération et par temps de brouillard une collision s'est produite entre l'ensemble articulé que conduisait Z..., employé de la société Loireumat, et la voiture pilotée par Y... qui circulait en sens inverse ; que l'épouse de cet automobiliste a été tuée et que Y... a été blessé ; Attendu que pour relaxer Z..., en mettant hors de cause la société Loireumat, et débouter les parties civiles la juridiction du second degré, résumant les faits, indique notamment " qu'alors qu'un intense brouillard, limitant à une dizaine de mètres la visibilité, régnait sur la région ", le prévenu, voulant quitter par la gauche une route nationale afin d'emprunter une voie secondaire, " a arrêté son poids-lourd au milieu de la chaussée pour laisser passer, selon ses dires, plusieurs voitures qui circulaient en sens inverse du sien " ; que n'ayant aperçu aucun obstacle ce chauffeur, le clignotant gauche de son véhicule fonctionnant, " a entrepris son virage qui était presque terminé lorsque l'automobile de Y... est venue percuter la remorque à la roue arrière droite " ; que la vitesse de ladite automobile a été évaluée à 80-90 km / h par Y... et un usager qui le suivait et à 110 km / h par un autre témoin, les traces de freinage étant de 25 mètres environ ; Attendu que de cet exposé les juges concluent " qu'aucune faute n'est établie à la charge d'Z... lequel s'est engagé dans sa manoeuvre à un moment où, compte tenu de la visibilité réduite, et de l'allure de la voiture, il se trouvait dans l'impossibilité absolue d'apercevoir cette dernière " et ne pouvait plus, " ayant accompli lors du choc la majeure partie de sa traversée puisque son ensemble routier a, été heurté à l'arrière droit, prendre aucune mesure pour éviter la collision " ; Attendu qu'en l'état de ces motifs, exempts d'insuffisance ou de contradiction, d'où il résulte qu'aucun comportement fautif du prévenu n'était démontré, la cour d'appel, qui a apprécié souverainement la valeur des éléments de preuve soumis à son examen, n'a pas encouru les griefs allégués au moyen, lequel ne peut dès lors être accueilli ; Et attendu que l'arrêt est régulier en la forme ; REJETTE les pourvois