LA COUR DE CASSATION, DEUXIEME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le pourvoi formé par :
1°/ la Société civile immobilière BETA, dont le siège est à Biarritz (Pyrénées Atlantiques), boulevard du Prince de Galles, résidence Sunset,
2°/ Monsieur Robert X..., demeurant boulevard du Prince de Galles, résidence Sunset à Biarritz (Pyrénées Atlantiques),
en cassation d'un arrêt rendu le 24 septembre 1986 par la cour d'appel de Pau (1ère chambre), au profit du Syndicat de la copropriété de la Résidence ARCIA, dont le siège est ... (Pyrénées Atlantiques),
défendeur à la cassation ; Les demandeurs invoquent, à l'appui de leur pourvoi, les deux moyens de cassation annexés au présent arrêt ; LA COUR, en l'audience publique du 6 janvier 1988, où étaient présents :
M. Aubouin, président ; M. Billy, rapporteur ; MM. B..., Chabrand, Michaud, Dutheillet-Lamonthézie, Deroure, Mme A..., M. Delattre, conseillers ; Mme D..., M. Lacabarats, conseillers référendaires ; M. Tatu, avocat général ; Mme Lagardère, greffier de chambre ; Sur le rapport de M. le conseiller Billy, les observations de Me Copper-Royer, avocat de la SCI Beta et de M. Y..., de la SCP Lyon-Caen, Fabiani et Liard, avocat du Syndicat de la copropriété de la Résidence Arcia, les conclusions de M. Tatu, avocat général, et après en avoir délibéré conformément à la loi ; Sur le second moyen, pris en sa première branche :
Attendu, selon l'arrêt confirmatif attaqué, que M. Y... avait été condamné envers le syndicat des copropriétaires de la résidence Arcia et huit des copropriétaires, par un arrêt du 26 avril 1978 devenu irrévocable, à supporter le coût de certains travaux, que le syndicat lui a fait signifier un commandement de payer suivi d'une saisie-exécution ; que M. Y... a fait opposition au commandement et que la société civile immobilière Bêta a revendiqué les meubles saisis ; Attendu que M. Y... reproche à l'arrêt de l'avoir débouté de son opposition en retenant que l'arrêt de 1978 avait mis à sa charge l'intégralité des travaux visés dans le mémoire récapitulatif de M. C... en date du 26 février 1980 et de s'être ainsi contredit ;
Mais attendu qu'il résulte de l'arrêt et des productions que la décision de 1978 avait condamné M. Y... à supporter le coût des travaux à exécuter conformément aux propositions de l'expert Z... après réévaluation au jour de leur exécution sur présentation des bons de paiement, "lesdits travaux devant être exécutés sous le contrôle de l'expert C...", et que c'est donc hors de toute contradiction que la cour d'appel a retenu que M. Y... était bien débiteur en vertu de l'arrêt de 1978 du montant des travaux évalués par M. C... en 1980 ; D'où il suit que le moyen n'est pas fondé ; Sur le second moyen, pris en sa seconde branche :
Attendu que, selon le moyen, l'instance ayant été engagée sur la seule demande du syndicat et de huit copropriétaires sur quarante-et-un, M. Y... ne pouvait se voir condamner à supporter l'intégralité du coût de la réfection des balcons, parties privatives, sans violation de l'article 4 du nouveau Code de procédure civile ; Mais attendu que la cour d'appel, saisie par le syndicat de conclusions tendant au paiement de l'intégralité du coût des réparations, balcons compris, et ayant retenu, par un motif non critiqué, que le syndic était habile à agir pour la réfection des balcons, n'a en rien méconnu l'objet du litige dont elle était saisie ; D'où il suit que le grief ne saurait être accueilli ; Mais sur le premier moyen :
Vu l'article 1328 du Code civil, ensemble l'article 608 du Code civil ; Attendu que celui qui se prétend propriétaire d'objets saisis et en demande la distraction à son profit peut administrer la preuve de sa propriété par tous moyens abandonnés à l'appréciation des juges du fond ; Attendu que la société civile immobilière Bêta revendiquait les meubles saisis sur la base d'un inventaire sous seing privé portant la date du 1er juillet 1971 et signé notamment par M. Y... lui-même, que, pour rejeter la demande, l'arrêt énonce qu'il importe peu que le mobilier saisi soit celui qui a été prétendument mis à la disposition de M. Y... par la société civile immobilière parce que l'inventaire produit n'a pas date certaine ; Qu'en statuant ainsi, alors que les actes sous seing privé opposables au débiteur ont la même foi vis-à-vis des créanciers chirographaires agissant en tant que tels que vis-à-vis de lui-même, hors le cas de fraude prouvée, la cour d'appel a violé les textes susvisés ;
PAR CES MOTIFS :
CASSE ET ANNULE, en ce qu'il a rejeté la demande de distraction des biens saisis formulée par la société civile immobilière Bêta, l'arrêt rendu le 24 septembre 1986, entre les parties, par la cour d'appel de Pau ; remet, en conséquence, quant à ce, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Toulouse, à ce désignée par délibération spéciale prise en la chambre du conseil ;