LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le pourvoi formé par M. X..., demeurant ...,
en cassation d'un arrêt rendu le 18 mars 1985 par la cour d'appel de Bordeaux (Chambre sociale), au profit de la société GESTETNER, prise en la personne de son président-directeur général, domicilié ... à Vitry-sur-Seine (Val-de-Marne),
défenderesse à la cassation ; LA COUR, composée selon l'article L.131-6, alinéa 2, du Code de l'organisation judiciaire, en l'audience publique du 17 décembre 1987, où étaient présents :
M. Le Gall, conseiller le plus ancien faisant fonction de président, M. Aragon-Brunet, conseiller référendaire rapporteur, M. Benhamou, conseiller, M. Dorwling-Carter, avocat général, Mme Ferré, greffier de chambre ; Sur le rapport de M. Aragon-Brunet, conseiller référendaire, les observations de la SCP Jean-Marie Defrenois et Marc Lévis, avocat de M. X..., de la SCP Desaché et Gatineau, avocat de la société Gestetner, les conclusions de M. Dorwling-Carter, avocat général, et après en avoir délibéré conformément à la loi ; Sur le moyen unique :
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Bordeaux, 18 mars 1985), que la société Gestetner a employé M. X... à sa succursale de Bordeaux, en qualité de représentant, du 19 novembre 1979 au 15 janvier 1981, date de la démission du salarié ; que le contrat de travail de M. X... comportait une clause de non-concurrence lui interdisant, pendant une durée de deux ans, d'exercer une activité ayant trait à la vente de photocopieurs, duplicateurs et fournitures correspondantes sur le territoire de la succursale ; que cette clause prévoyait que sa violation serait sanctionnée par le versement d'une indemnité forfaitaire ; Attendu que M. X... fait grief à l'arrêt de l'avoir condamné à payer à la société cette indemnité forfaitaire, alors, selon le pourvoi, d'une part, que bien que limitée géographiquement et dans le temps, une clause de non-concurrence n'est valable que si elle n'a pas pour effet de priver le représentant de la possibilité d'exercer normalement son activité professionnelle ; qu'en se bornant, dans ces conditions, à relever que M. X... avait conservé la possibilité d'exercer d'autres emplois que celui de représentant en photocopieurs, duplicateurs et fournitures correspondantes, qui était le sien au sein de la société Gestetner et pour lequel cette dernière l'avait formé, la cour d'appel a privé sa décision de toute base légale au regard de l'article 1134 du Code civil ; alors, d'autre part, qu'il appartient aux juges du fond de constater et de caractériser les actes de concurrence susceptibles d'entraîner le jeu de la clause pénale inscrite au contrat ; qu'en l'espèce, l'arrêt constate que M. X... n'a été au service des sociétés concurrentes de la société Gestetner que pour des périodes très courtes et que ces sociétés, connaissance prise de la clause de non-concurrence, ont aussitôt rompu toute relation
contractuelle avec M. X..., lequel aurait ainsi seulement "tenté" de travailler pour des entreprises concurrentes ; qu'en l'état, et en l'absence de la constatation du moindre fait précis de concurrence imputable à M. X..., la cour d'appel n'a pas légalement justifié sa décision au regard de l'article 1134 du Code civil ; et alors, enfin, que le juge peut modérer la peine prévue au contrat si celle-ci paraît manifestement excessive eu égard, notamment, au préjudice subi ; qu'en l'espèce, le salarié faisait valoir, dans ses conclusions délaissées, que la société Gestetner ne pouvait prétendre au jeu automatique de la clause dans la mesure où elle n'établissait ni l'existence de faits de concurrence ni le préjudice qui en serait résulté pour elle ; qu'en s'abstenant, dans ces conditions, de rechercher si la peine convenue n'apparaissait pas, à tout le moins, excessive, la cour d'appel n'a pas légalement justifié sa décision au regard des articles 1134 et 1152 du Code civil ; Mais attendu, d'une part, que la cour d'appel a retenu que la clause de non-concurrence n'interdisait pas à M. X..., qui pouvait continuer à représenter des entreprises de vente de matériel de reprographie dans d'autres régions que celle de Bordeaux et qui avait précédemment travaillé dans des secteurs très variés, d'exercer une activité conforme à sa formation et à ses capacités ; Attendu, d'autre part, qu'ayant relevé que M. X... avait été employé du 28 mars au 17 mai 1981, puis de fin mai au 18 septembre 1981 et enfin pendant le mois d'octobre 1981 par des entreprises concurrentes de la société Gestetner dans la région de Bordeaux, et que ces firmes ne s'étaient séparées de ce salarié que sur intervention de la société Gestetner, elle a pu en déduire que M. X... avait violé l'obligation de non-concurrence qu'il avait souscrite ; Attendu, enfin, qu'il ne résulte ni de l'arrêt ni des conclusions d'appel que M. X... ait demandé aux juges du second degré la diminution du montant de l'indemnité prévue en cas de violation de la clause de non-concurrence ; Qu'il s'ensuit que le moyen n'est fondé en aucune de ses branches ; PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi ;