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26/01/1988 | FRANCE | N°86-10742;86-12447

France | France, Cour de cassation, Chambre civile 1, 26 janvier 1988, 86-10742 et suivant


Joint, en raison de leur connexité, les pourvois n°s 86-10.742 et 86-12.447 introduits, le premier, par la SARL Etablissements Gabriel Cash and Carry et, le second, par la société Winterthur, assureur de ces établissements ; .

Sur les cinq moyens réunis du pourvoi n° 86-10.742 et le moyen unique pris en ses quatre branches du pourvoi n° 86-12.447 :

Attendu, selon les énonciations des juges du fond (Aix, 27 novembre 1985), que M. X..., qui faisait ses courses dans les locaux des Etablissements Cash and Carry, s'est lancé, ainsi que quelques autres personnes, à la pours

uite de malfaiteurs armés qui venaient de s'emparer de la recette du m...

Joint, en raison de leur connexité, les pourvois n°s 86-10.742 et 86-12.447 introduits, le premier, par la SARL Etablissements Gabriel Cash and Carry et, le second, par la société Winterthur, assureur de ces établissements ; .

Sur les cinq moyens réunis du pourvoi n° 86-10.742 et le moyen unique pris en ses quatre branches du pourvoi n° 86-12.447 :

Attendu, selon les énonciations des juges du fond (Aix, 27 novembre 1985), que M. X..., qui faisait ses courses dans les locaux des Etablissements Cash and Carry, s'est lancé, ainsi que quelques autres personnes, à la poursuite de malfaiteurs armés qui venaient de s'emparer de la recette du magasin ; qu'il est parvenu à faire lâcher son butin par un des voleurs ; qu'au cours de cette intervention, M. X... a été blessé par un coup de feu tiré par un autre ; que, se fondant sur les dispositions légales relatives à la gestion d'affaire, il a demandé aux Etablissements Cash and Cary l'indemnisation des dommages qu'il avait subis ; que la cour d'appel lui a donné satisfaction ;

Attendu que ces établissements font grief à l'arrêt attaqué d'avoir ainsi statué alors, selon le premier moyen, que le fait pour une personne témoin d'un vol et sans lien avec la victime de ce vol de se lancer à la poursuite des voleurs n'impliquerait pas l'intention de gérer les affaires d'autrui mais celle de se comporter en collaborateur bénévole des services de police ; alors, selon le second moyen, que le magasin ayant donné pour consigne à son personnel - et ce dans l'intérêt de la sécurité de tous - de ne pas résister en cas d'agression armée, la cour d'appel aurait dû rechercher si l'intervention de M. X... devait être réellement considérée comme utile ; alors, selon le troisième moyen, qu'elle n'aurait pu retenir que l'action de ce dernier avait été approuvée par les Etablissements Cash and Carry parce qu'ils avaient ensuite ouvert une collecte en sa faveur et lui avaient accordé un crédit d'achats gratuits dès l'instant que ces mesures pouvaient tout aussi bien traduire un geste commercial ou la simple volonté de récompenser le civisme d'un client courageux ; alors, encore, selon le quatrième moyen, qu'après avoir relevé que M. X... avait instinctivement réagi dans l'intérêt général, elle n'aurait recherché ni si cette réaction était exclusive de l'intention de gérer l'affaire des Etablissements Cash and Carry ni, à tout le moins, laquelle de ces deux motivations avait été chez lui déterminante ; et alors, enfin, selon le cinquième moyen, que l'intention d'agir dans l'intérêt général ayant fait de lui le collaborateur occasionnel du service public, les juges d'appel n'auraient pu mettre la totalité du préjudice à la charge de ces établissements ;

Attendu que la compagnie d'assurances Winterthur, assureur des Etablissements Cash and Carry, condamnée à garantir ces derniers de leur condamnation envers M. X..., soulève dans son propre pourvoi un moyen unique en quatre branches ; que la première branche soutient, comme le premier moyen du pourvoi des Etablissements Cash and Carry, que M. X... n'aurait pu intervenir que comme collaborateur bénévole du service public de la police ; que la troisième branche allègue, comme le troisième moyen de l'autre pourvoi, que la collecte organisée par ces établissements ne pouvait être regardée comme valant ratification de son geste ; que, selon la quatrième branche, analogue au cinquième moyen de l'autre pourvoi, la constatation d'une interférence entre les motifs d'intérêt général et de sauvegarde des intérêts particuliers ayant animé M. X... aurait dû conduire à ne mettre à la charge des Etablissements Cash and Carry que la seule proportion de son préjudice correspondant à la part revenant, dans l'attitude de leur client, au désir de sauvegarder leurs intérêts ; que seule la seconde branche soulève un grief que ne comporte pas l'autre pourvoi, en soutenant que les risques considérables pris par la victime étant sans proportion avec la somme récupérée, son attitude n'aurait pas, en la circonstance, été celle d'un bon père de famille ;

Mais attendu qu'analysant les circonstances de la cause, la cour d'appel a souverainement estimé que si la première réaction de M. X... avait été inspirée par le comportement des malfaiteurs, intolérable pour un honnête homme, il était certain que son action avait été poursuivie, en dépit des risques encourus par lui, dans l'intention et la volonté d'agir pour le compte des Etablissements Cash and Carry dont il était le client ; qu'elle a retenu aussi, d'une part, que l'intervention de M. X... avait été utile puisqu'elle avait permis la récupération de la somme dérobée par les malfaiteurs et, d'autre part, que l'opportunité de ladite intervention était telle que l'initiative ainsi prise était justifiée sans que la société Cash and Carry puisse se prévaloir des consignes de non-intervention qu'elle avait données à son personnel en pareil cas, M. X... n'ayant fait que se joindre à l'action entreprise notamment par un des cadres de cette société ; qu'elle a ainsi légalement justifié la décision par laquelle elle a accueilli l'action de M. X... sur le fondement de la gestion d'affaires ; qu'aucun des moyens des deux pourvois ne peut donc être accueilli ;

PAR CES MOTIFS :

REJETTE les pourvois n°s 86-10.742 et 86-12.447


Synthèse
Formation : Chambre civile 1
Numéro d'arrêt : 86-10742;86-12447
Date de la décision : 26/01/1988
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Civile

Analyses

GESTION D'AFFAIRES - Définition - Acte utile - Vol commis au préjudice d'un commerçant - Intervention d'un client ayant permis de récupérer l'objet du larcin

* GESTION D'AFFAIRES - Définition - Volonté de représenter - Vol de la recette d'un magasin - Poursuite du voleur par un client du magasin

Est légalement justifié l'arrêt accueillant sur le fondement de la gestion d'affaires la demande en indemnisation formée contre la société exploitant un grand magasin, par un client blessé alors qu'il poursuivait un malfaiteur qui venait de s'emparer de la recette dès lors que la cour d'appel relève souverainement que cette personne avait agi pour le compte du magasin, que son intervention avait été utile puisqu'elle avait permis de récupérer la somme dérobée et que l'opportunité de cette intervention était telle que l'initiative prise était justifiée sans que la société exploitante puisse se prévaloir des consignes de non-intervention qu'elle avait données à son personnel en pareil cas .


Références :

Décision attaquée : Cour d'appel d'Aix-en-Provence, 27 novembre 1985


Publications
Proposition de citation : Cass. Civ. 1re, 26 jan. 1988, pourvoi n°86-10742;86-12447, Bull. civ. 1988 I N° 25 p. 16
Publié au bulletin des arrêts des chambres civiles 1988 I N° 25 p. 16

Composition du Tribunal
Président : Président :M. Fabre
Avocat général : Avocat général :M. Charbonnier
Rapporteur ?: Rapporteur :M. Jouhaud
Avocat(s) : Avocats :MM. Foussard, Goutet .

Origine de la décision
Date de l'import : 14/10/2011
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:1988:86.10742
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