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12/01/1988 | FRANCE | N°87-81357

France | France, Cour de cassation, Chambre criminelle, 12 janvier 1988, 87-81357


ANNULATION PARTIELLE par voie de retranchement sans renvoi et REJET des pourvois formés par :

X... Sylvia, Y... Jean-Pierre, prévenus, la société " Grande Brasserie alsacienne d'Adelshoffen ", la société " Brasserie du Pêcheur ", parties intervenantes, contre un arrêt de la cour d'appel de Colmar, chambre correctionnelle, en date du 20 janvier 1987, qui a condamné Y... à 10 mois d'emprisonnement et 10 000 francs d'amende pour infractions au Code des débits de boissons et proxénétisme aggravé, Sylvia X... à 4 mois d'emprisonnement avec sursis et 6 000 francs d'amende pour

infraction audit Code et proxénétisme aggravé, et a prononcé la ferm...

ANNULATION PARTIELLE par voie de retranchement sans renvoi et REJET des pourvois formés par :

X... Sylvia, Y... Jean-Pierre, prévenus, la société " Grande Brasserie alsacienne d'Adelshoffen ", la société " Brasserie du Pêcheur ", parties intervenantes, contre un arrêt de la cour d'appel de Colmar, chambre correctionnelle, en date du 20 janvier 1987, qui a condamné Y... à 10 mois d'emprisonnement et 10 000 francs d'amende pour infractions au Code des débits de boissons et proxénétisme aggravé, Sylvia X... à 4 mois d'emprisonnement avec sursis et 6 000 francs d'amende pour infraction audit Code et proxénétisme aggravé, et a prononcé la fermeture définitive des deux débits de boissons en cause.
LA COUR,
Joignant les pourvois en raison de la connexité ;
Sur les pourvois de Y... et de Sylvia X... ;
Attendu que l'article L. 29 du Code des débits de boissons, qui interdit à toute personne d'exploiter plus d'un débit de boissons à consommer sur place des deuxième, troisième et quatrième catégories, a été abrogé par la loi du 9 juillet 1987 ; que cette interdiction n'a été reprise par aucun texte ;
Attendu en conséquence que si les juges ont pu, au jour de leur décision, déclarer Sylvia X... et Y... coupables d'infraction audit article, cette disposition, privée désormais de base légale, doit être retranchée de l'arrêt attaqué, les peines prononcées contre ces demandeurs demeurant justifiées par les autres chefs de condamnation, plus graves, contre lesquels aucun moyen n'est produit ;
Sur le pourvoi de la Grande Brasserie alsacienne d'Adelshoffen ;
Vu le mémoire produit ;
Sur le moyen unique de cassation (sans intérêt),
Sur le deuxième moyen de cassation (sans intérêt) ;
Sur le pourvoi de la Brasserie du Pêcheur ;
Vu le mémoire produit ;
Sur le premier moyen de cassation (sans intérêt) ;
Sur le deuxième moyen de cassation (sans intérêt) ;
Sur le troisième moyen de cassation, pris de la violation de l'article 1er du protocole additionnel à la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, de l'article 6-1 de ladite Convention, de l'article 55 de la Constitution du 4 octobre 1958, de l'article 593 du Code de procédure pénale, défaut de motifs, manque de base légale, défaut de réponse à conclusions régulièrement déposées :
" en ce que l'arrêt attaqué a prononcé la fermeture définitive de la Taverne des Amis dont le fonds et les murs sont propriété de la SA Brasserie du Pêcheur, en conséquence de la condamnation de Sylvia X... et de Jean-Pierre Y... pour infraction à l'article L. 29 du Code des débits de boissons ;
" au motif que la Convention européenne des droits de l'homme ne saurait en la matière faire échec à l'application de la législation nationale ;
" alors, de première part, qu'en vertu de l'article 55 de la Constitution du 4 octobre 1958, les traités régulièrement ratifiés prévalent sur les lois nationales, même postérieures ; que tel est le cas de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales régulièrement ratifiée par la France, le 20 janvier 1966 ; que la SA Brasserie du Pêcheur, citée devant le tribunal correctionnel sur le fondement de l'article L. 59-1 du Code des débits de boissons, soutenait dans ses conclusions déposées devant la Cour que les dispositions du Code des débits de boissons obligeant le juge à prononcer la fermeture définitive du débit de boissons à quelque personne qu'il appartienne, en conséquence d'une condamnation pour infraction à l'article L. 29 du Code des débits de boissons, violaient tout à la fois l'article 1er du protocole additionnel et le principe du procès équitable énoncé à l'article 6, alinéa 1, de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; et qu'en se bornant à affirmer l'inapplicabilité de la Convention à l'espèce sans répondre, ne serait-ce que pour les rejeter, aux chefs péremptoires des conclusions de la société demanderesse, l'arrêt attaqué a violé l'article 55 de la Constitution du 4 octobre 1958 et l'article 593 du Code de procédure pénale ;
" alors, de seconde part, que l'article 1er, alinéa 1er, du protocole additionnel à la Convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales pose le principe du respect de la propriété et soumet la privation de propriété à certaines conditions prévues par la loi et par les principes généraux du droit international et qu'ainsi, la fermeture définitive d'un fonds de commerce ne peut être légalement prononcée par l'autorité judiciaire d'un pays adhérent à la Convention qu'en considération, non seulement des dispositions du droit interne mais aussi par référence aux principes généraux du droit international ; qu'en l'espèce, la fermeture de la Taverne des Amis équivalait à l'expropriation sans indemnité du fonds de commerce appartenant à la SA Brasserie du Pêcheur ;
" alors, de troisième part, que si l'article 1er, alinéa 2, du protocole additionnel reconnaît aux Etats le pouvoir de réglementer l'usage des biens, conformément à l'intérêt général et en mettant en vigueur les lois qu'ils jugent nécessaires à cette fin, les Etats doivent, dans l'exercice de ce pouvoir, maintenir un juste équilibre entre les exigences de l'intérêt général de la communauté et les impératifs de sauvegarde des droits fondamentaux des particuliers et qu'il en résulte que la confiscation d'un bien ne peut être prononcée à l'encontre d'un propriétaire comme conséquence d'une infraction si celui-ci est innocent ;
" alors enfin que le prononcé de la mesure de fermeture définitive du débit de boissons illégalement exploité étant obligatoire en application de l'article L. 30 du Code des débits de boissons pour le Tribunal, dès lors que celui-ci entre en voie de condamnation à l'encontre du débitant et le propriétaire du fonds de commerce n'étant pas admis à faire valoir sa bonne foi et à faire procéder à un examen complet de ses droits de caractère civil, le recours judiciaire, organisé par l'article L. 59-1 du Code des débits de boissons ne satisfait pas aux exigences de l'article 6, alinéa 1er, de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales " ;
Attendu que la demanderesse soutient vainement que les juges n'auraient pas répondu, ou auraient répondu insuffisamment à ses conclusions invoquant l'illégalité, au regard de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, de la réglementation nationale relative à la fermeture par voie judiciaire des débits de boissons illégalement exploités ; qu'en effet le droit à l'exploitation des débits de boissons ne relève pas de la Convention précitée ; qu'au surplus cette réglementation institue en faveur du propriétaire d'un débit de boissons menacé de fermeture des règles de procédure et des recours protecteurs de ses intérêts ;
Que ce moyen doit lui aussi être écarté ;
Par ces motifs :
ANNULE, par voie de retranchement et sans renvoi, l'arrêt de la cour d'appel de Colmar en date du 20 janvier 1987, en ce qu'il a déclaré Jean-Pierre Y... et Sylvia X... coupables d'avoir exploité plus d'un débit de boissons à consommer sur place de la quatrième catégorie ;
REJETTE les pourvois pour le surplus.


Synthèse
Formation : Chambre criminelle
Numéro d'arrêt : 87-81357
Date de la décision : 12/01/1988
Type d'affaire : Criminelle

Analyses

CONVENTION EUROPEENNE DES DROITS DE L'HOMME - Droits protégés - Débit de boissons - Réglementation (non)

DEBIT DE BOISSONS - Exploitation - Convention européenne des droits de l'homme - Droit protégé (non)

Le droit d'exploiter ou de faire exploiter un débit de boissons ne relève pas de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.


Références :

Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales (protocole additionnel 01) du 04 novembre 1950 art. 1 al. 2
Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales du 04 novembre 1950 art. 6 al.1

Décision attaquée : Cour d'appel de Colmar (chambre correctionnelle), 20 janvier 1987


Publications
Proposition de citation : Cass. Crim., 12 jan. 1988, pourvoi n°87-81357, Bull. crim. criminel 1988 N° 10 p. 22
Publié au bulletin des arrêts de la chambre criminelle criminel 1988 N° 10 p. 22

Composition du Tribunal
Président : Président :M. Bonneau, conseiller le plus ancien faisant fonction
Avocat général : Avocat général :M. Tatu
Rapporteur ?: Rapporteur :M. Milleville
Avocat(s) : Avocats :la SCP Vier et Barthélémy, la SCP Lesourd et Baudin.

Origine de la décision
Date de l'import : 14/10/2011
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:1988:87.81357
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