LA COUR DE CASSATION, PREMIERE CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le pourvoi formé par la compagnie UNION DES ASSURANCES DE PARIS (UAP), société anonyme d'assurances, dont le siège social est 9 place Vendôme à Paris (1er),
en cassation d'un arrêt rendu, le 13 juin 1984, par la cour d'appel de Paris (7e Chambre, Section A), au profit :
1°) de la société civile immobilière 33-35 rue de Chazelles à Paris (17e),
2°) de la société COFEM FRANCE, dont le siège est 22 rue Saint-Vincent à Paris (10e),
3°) du SYNDICAT DES COPROPRIETAIRES DE L'IMMEUBLE 33-35 rue de Chazelles à Paris, pris en la personne de son syndic, la société JEANNIOT, dont le siège est 7-9 rue des Cottages à Paris (18e),
4°) de la société civile immobilière Dominique MONCEAU, dont le siège est 33 rue de Chazelles à Paris (17e),
5°) du SYNDICAT DES COPROPRIETAIRES DU 32 rue MEDERIC à Paris (17e), pris en la personne de son syndic la société A. et P. DEGUELDRE, 40 avenue de Villiers à Paris (17e),
6°) de M. Théophile QUERE, demeurant 32 rue Médéric à Paris (17e),
7°) de Mme Elie LUBRINER, demeurant 32 rue Médéric à Paris (17e),
8°) de M. Pierre PAOLI, demeurant 32 rue Médéric à Paris (17e),
9°) de M. Jacques BELHUCHE, demeurant 32 rue Médéric à Paris (17e),
10°) de la compagnie LA PRESERVATRICE, société anonyme d'assurances dont le siège social est 48 rue Notre-Dame des Victoires à Paris (8e),
11°) de la compagnie LA CONCORDE, société anonyme d'assurances dont le siège est 5 rue de Londres à Paris (9e),
12°) de M. CHEVALLEY, demeurant 67 avenue Roger Salengro à Chaville (Hauts-de-Seine),
13°) de la compagnie CIAM, dont le siège social est 7 rue de Madrid à Paris (8e),
14°) de M. Henry GOURDAIN, domicilié 174 boulevard Saint-Germain à Paris (6e), pris en sa qualité de syndic de la liquidation des biens de la société SETIB,
15°) de la SOCIETE INDUSTRIELLE THERMIQUE DES FLUIDES (ITF), dont le siège social est 28 rue de Valenton à Maisons-Alfort (Val-de-Marne),
16°) de M. Jean-Louis BERTHET, demeurant 127 boulevard Malesherbes à Paris (17e),
17°) de M. HERISSAY, domicilié 22 rue Bergère à Paris (9e), pris en sa qualité de syndic du règlement judiciaire de la société STEFAL,
défendeurs à la cassation
La compagnie CIAM a formé un pourvoi incident contre l'arrêt de la cour d'appel de Paris ;
La compagnie UAP, demanderesse au pourvoi principal, invoque, à l'appui de son recours, le moyen unique de cassation annexé au présent arrêt ; La compagnie CIAM, demanderesse au pourvoi incident, invoque, à l'appui de son recours, le moyen unique de cassation également annexé au présent arrêt ; LA COUR, en l'audience publique du 14 octobre 1987, où étaient présents :
M. Fabre, président, M. Kuhnmunch, rapporteur, MM. Ponsard, Jouhaud, Camille Bernard, Barat, Viennois, Zennaro, Fouret, Bernard de Saint-Affrique, conseillers, Mme Gié, conseiller référendaire, M. Charbonnier, avocat général, Mlle Ydrac, greffier de chambre ; Sur le rapport de M. le conseiller Kuhnmunch, les observations de la SCP Rouvière, Lepitre et Boutet, avocat de la compagnie UAP, de Me Choucroy, avocat de la SCI 33-35 rue de Chazelles à Paris (17e) et de la société Cofem France, de la SCP Jean et Didier Le Prado, avocat du Syndicat des copropriétaires de l'immeuble 33-35 rue de Chazelles à Paris, de Me Parmentier, avocat du Syndicat des copropriétaires du 32 rue Médéric à Paris (17e), de la SCP Le Bret et de Lanouvelle, avocat de la compagnie La Concorde, de la SCP Nicolas, Masse-Dessen et Georges, avocat de la compagnie CIAM, les conclusions de M. Charbonnier, avocat général, et après en avoir délibéré conformément à la loi ; Donne défaut contre la société civile immobilière Dominique Monceau, M. Quere, Mme Lubriner, MM. Paoli, Belhuche, la compagnie La Préservatrice, M. Chevalley, M. Gourdain ès qualités de syndic de la liquidation des biens de la société SETIB, la Société industrielle thermique des fluides, M. Berthet, M. Hérissay ès qualités de syndic du règlement judiciaire de la société STEFAL ; Attendu, selon les énonciations des juges du fond, que la société civile immobilière du 33-35 rue de Chazelles à Paris (SCI), ayant pour gérant la COFEM, promoteur, a fait édifier à cette adresse un ensemble immobilier ; que ces deux sociétés étaient assurées par l'Union des assurances de Paris (UAP) pour les garanties biennale et décennale ; que sont notamment intervenus dans la construction M. Chevalley, architecte, la SETIB, entreprise de gros oeuvre, assurée auprès de la compagnie d'assurances Caisse industrielle d'assurances mutuelles (CIAM) "en individuelle de base", ainsi que la STEFAL, chargée du lot "ventilation" ; que l'ensemble immobilier comprend plusieurs niveaux en sous-sol à usage de garages ;
Attendu qu'il est apparu, après la réception provisoire, que l'ensemble des ventilations hautes des niveaux de garages débouchant dans une cour sur laquelle s'ouvrent les fenêtres d'un immeuble voisin était source d'odeurs et de bruits et comportait des risques d'incendie ; que ces nuisances et ces risques ont donné lieu à plusieurs instances ; Attendu que, par arrêt partiellement infirmatif, la cour d'appel (Paris, 13 juin 1984) a notamment jugé que M. Chevalley, la SETIB et la STEFAL étaient responsables in solidum des défauts de conformité des trois premiers niveaux de garages ; que M. Chevalley et la CIAM étaient tenus in solidum, sous réserve des dispositions contractuelles en ce qui concerne cette dernière, de relever entièrement la SCI et la COFEM de toutes les conséquences pécuniaires résultant des non-conformités de ces niveaux de garages ; que l'UAP et la CIAM étaient chacune tenues, dans les limites de leur contrat, de garantir leurs assurés respectifs, -la SCI et la COFEM pour l'UAP, la SETIB pour la CIAM- pour tous les travaux de mise en conformité des trois premiers niveaux de garages ; Sur les première et troisième branches du moyen unique du pourvoi principal et du pourvoi incident :
Attendu qu'il est reproché par l'UAP et la CIAM à la cour d'appel d'avoir statué ainsi aux motifs que les non-conformités aux règlements de ces niveaux de garages constituaient, en raison notamment des risques d'incendie, des vices cachés au sens des articles 1792 et 2270 du Code civil -dans leur rédaction due à la loi n° 67-3 du 3 janvier 1967- affectant le gros oeuvre et rendant les garages inutilisables et impropres à leur destination, alors que, selon le moyen, d'une part, les polices souscrites ne garantissaient que les dommages à la construction et que, dès lors, en condamnant les compagnies d'assurances à garantir des non-conformités aux règlements, cause d'un trouble à la propriété voisine, sans constater les désordres causés à la construction, la cour d'appel a violé la convention des parties et l'article 1134 du Code civil ; alors que, d'autre part, les conditions générales des polices excluaient les dommages causés à des tiers et qu'en l'espèce, l'action tendait exclusivement à la cessation d'un trouble de voisinage et à la réparation du dommage en résultant pour la propriété voisine du fait de bruits et d'émanations d'air vicié et que, dès lors, en faisant supporter par les assureurs la réparation d'un trouble causé à un tiers, la cour d'appel encourt les mêmes critiques ; Mais attendu que l'arrêt attaqué a précisé que les compagnies d'assurances n'étaient pas tenues de garantir leurs assurés de dommages causés à des tiers même s'ils sont la conséquence d'un vice de construction ; que le moyen manque donc en fait ;
Sur le moyen unique, pris en sa deuxième branche également commune aux pourvois principal et incident :
Attendu qu'il est encore fait grief à l'arrêt attaqué d'avoir statué comme il a fait alors que, selon le moyen, les défauts de conformité relevaient de la responsabilité contractuelle de droit commun et non de la responsabilité décennale et qu'en décidant cependant que les non-conformités aux règlements des trois premiers niveaux de garages constituaient des vices cachés au sens des articles précités, la cour d'appel a violé ces articles par fausse application ; Mais attendu que la cour d'appel a retenu que les non-conformités aux règlements relevées après l'occupation des lieux entraînaient des risques d'incendie impliquant l'impropriété de l'immeuble à sa destination et une atteinte aux gros ouvrages ; qu'elle en a exactement déduit que les non-conformités constituaient des vices cachés soumis à la garantie décennale ; qu'il s'ensuit que le moyen n'est pas fondé ; PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi principal et le pourvoi incident ; Et, vu les dispositions de l'article 628 du nouveau Code de procédure civile, condamne la compagnie UAP et la compagnie CIAM, envers le Trésor public, à une amende de vingt mille francs ; condamne la compagnie UAP et la compagnie CIAM, envers tous les défendeurs, aux dépens, ceux avancés par le Syndicat des copropriétaires de l'immeuble 33-35 rue de Chazelles, liquidés à la somme de onze francs, quatre vingts centimes, ceux avancés par la compagnie La Concorde, liquidés à la somme de cinq francs, vingt cinq centimes, et aux frais d'exécution du présent arrêt ;