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22/07/1987 | FRANCE | N°85-15319

France | France, Cour de cassation, Chambre civile 1, 22 juillet 1987, 85-15319


Attendu, selon les énonciations des juges du fond, que la Société de Construction et Gestion Immobilière (SCOGIM) a constitué les 27 mars et 23 avril 1979 deux sociétés civiles immobilières "Les Terrasses de Cassis-Nord" et les "Terrasses de Cassis-Est" (les S.C.I.) dans chacune desquelles elle détenait 200 parts ; que parmi les associés figurait la société Compagnie Générale Immobilière de France (COGIFRANCE), porteuse de 150 parts de chaque S.C.I. ; que l'article 16 des statuts disposait que toute cession de parts sociales à des personnes étrangères à la société doit "ê

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Attendu, selon les énonciations des juges du fond, que la Société de Construction et Gestion Immobilière (SCOGIM) a constitué les 27 mars et 23 avril 1979 deux sociétés civiles immobilières "Les Terrasses de Cassis-Nord" et les "Terrasses de Cassis-Est" (les S.C.I.) dans chacune desquelles elle détenait 200 parts ; que parmi les associés figurait la société Compagnie Générale Immobilière de France (COGIFRANCE), porteuse de 150 parts de chaque S.C.I. ; que l'article 16 des statuts disposait que toute cession de parts sociales à des personnes étrangères à la société doit "être autorisée par décision collective ordinaire des associés" ; que, par deux actes sous seing privé des 8 et 18 mai 1979, la SCOGIM, tout en demeurant gérante des S.C.I., a cédé ses parts à quatre nouveaux associés ; qu'en mars 1981, la SCOGIM et la COGIFRANCE sont convenues que la première rachèterait les parts de la seconde ; que, par une lettre du 19 mars 1981, le président-directeur général de la COGIFRANCE a écrit à celui de la SCOGIM "en raison des dispositions statutaires, la réalisation de chacune de ces cessions est soumise à l'autorisation de la collectivité des associés réunis en assemblée générale ordinaire ... nous vous remercions de nous tenir informés de l'accomplissement de ce que nous estimons être une simple formalité, compte tenu de votre qualité de gérant" ; que, le 2 juin 1981, la SCOGIM a réglé la moitié du prix des parts cédées, soit 202.500 francs, et a confirmé que la cession "devait faire l'objet de l'approbation de tous les associés de cette opération" ; que la COGIFRANCE a prétendu ensuite que cette approbation n'était pas nécessaire, la SCOGIM ayant la qualité d'associé, et que la cession était parfaite ; que la COGIFRANCE a procédé à la signification de la cession intervenue aux S.C.I. et à tous les associés ; que, le 20 avril 1982, la SCOGIM, depuis lors en règlement judiciaire, a assigné la COGIFRANCE pour voir juger que l'agrément des associés n'ayant pas été donné à la cession du 19 mars 1981, la condition suspensive assortissant la cession était défaillie et condamner la COGIFRANCE à lui rembourser l'acompte déjà versé ; que la COGIFRANCE a résisté à cette demande en soutenant que la SCOGIM avait encore la qualité d'associé en 1981 et que son agrément par les autres associés n'était pas nécessaire, les cessions de parts consenties en 1979 étant nulles faute d'avoir été régulièrement approuvées par des assemblées générales qui étaient, en réalité, fictives ; que les S.C.I. et huit associés sont intervenus à l'instance pour soutenir les prétentions de la SCOGIM ; que la COGIFRANCE a conclu à l'irrecevabilité de ces interventions ;

Sur le premier moyen :

Attendu que la COGIFRANCE reproche à l'arrêt confirmatif attaqué d'avoir déclaré recevables ces interventions, alors, selon le moyen, que l'agrément prévu par l'article 16-1 des statuts, loin de porter atteinte au principe selon lequel chaque associé demeure libre de céder ses parts, prévoit les modalités d'exercice de la liberté de cession en stipulant qu'en cas de refus d'agrément du projet de cession non accompagné d'un rachat par les associés ou par des tiers agréés par eux, la cession est malgré tout réputée agréée ; que l'arrêt, qui se fonde exclusivement sur la solvabilité de la COGIFRANCE pour déclarer que les intervenants ont intérêt à son maintien dans les S.C.I., est entaché d'un défaut de base légale au regard des articles 1861 et suivants du Code civil et 31 et 330 du nouveau Code de procédure civile et a violé l'article 16 des statuts ;

Mais attendu que, selon l'article 330 du nouveau Code de procédure civile, l'intervention accessoire est recevable si son auteur a intérêt, pour la conservation de ses droits, à soutenir les prétentions d'une partie ; que le litige soumis aux juges du fond posait la question de savoir qui de la SCOGIM ou de la COGIFRANCE figurait parmi les associés des S.C.I. ; qu'ayant relevé, tant par motifs propres qu'adoptés, que l'opération de construction était "notoirement déficitaire" et que, quel que soit le sort réservé aux appels de fonds les associés d'une S.C.I. sont tenus de contribuer aux pertes, c'est dans l'exercice de son pouvoir souverain que la Cour d'appel a estimé que les S.C.I. et les sociétés intervenantes, porteuses de parts, avaient intérêt à voir figurer sur la liste des associés la COGIFRANCE, solvable, plutôt que la SCOGIM, qui est en règlement judiciaire ; d'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;

Sur le second moyen, pris en ses six branches :

Attendu qu'il est encore fait grief à la Cour d'appel d'avoir déclaré caduques les cessions de parts consenties par la COGIFRANCE à la SCOGIM, faute d'agrément par les associés, et d'avoir condamné la première à rembourser à la seconde la somme de 202.500 F., alors, selon le moyen, d'une part, que l'arrêt qui constate que l'article 16 des statuts exige que toute cession de parts sociales à des personnes étrangères soit autorisée par décision collective des associés et que les délibérations des assemblées générales du 23 avril 1979 ayant autorisé les cessions de parts consenties par la SCOGIM étaient entachées de nullité, n'a pas tiré les conséquences légales de ses propres constatations en décidant que la participation aux assemblées générales du 22 avril 1980, aux côtés des quatre cessionnaires, d'une mandataire de COGIFRANCE chargée de délibérer exclusivement sur l'approbation des comptes de 1979 suffisait à conférer à ces derniers la qualité d'associés ; alors, d'autre part, que l'arrêt qui constate que la SCOGIM n'a pas notifié à la COGIFRANCE les projets de cession avec demande d'agrément, comme le lui imposaient l'article 1986, alinéa 3, du Code civil et l'article 16 des statuts, mais décide néanmoins que cette dernière a agréé ces cessions, a violé les textes précités ; alors, de troisième part, que la représentante de la COGIFRANCE ayant reçu un mandat limité à l'examen de l'ordre du jour portant sur les comptes de 1979, n'était pas tenue de soulever les causes de nullité des assemblées générales du 22 avril 1980, de sorte qu'en décidant que sa participation au vote, aux côtés des cessionnaires, suffisait à constituer une ratification de cessions irrégulières qui privait la COGIFRANCE de critiquer leur validité, la Cour d'appel a violé les articles 1988, alinéa 2, et 1289 du Code civil, alors, de quatrième part, que la ratification d'un acte nul pour violation des formes requises par la loi pour la protection des tiers doit être nécessairement expresse ; qu'en se fondant sur la ratification tacite par la COGIFRANCE de la cession irrégulière consentie par la SCOGIM pour déclarer que cette cession est valide, la Cour d'appel a violé l'article 1338 du Code civil, alors, de cinquième part, que la ratification d'un acte entaché de vice ne peut résulter que de faits qui établissent sans équivoque la connaissance de ce vice et la volonté de le réparer ; que l'arrêt qui relève que la cession de parts consentie par la SCOGIM n'a pas été notifiée à la COGIFRANCE et que celle-ci n'avait été représentée à l'assemblée générale du 22 avril 1980 que par une de ses salariées munie d'un mandat spécial limité, a omis de relever la connaissance par ce mandataire du nom et du nombre des associés des S.C.I., ainsi que sa volonté sans équivoque d'agréer par son vote les cessionnaires, de sorte que l'arrêt est dépourvu de base légale ; et alors, de sixième part et enfin, que la COGIFRANCE, représentée par une de ses salariées, munie d'un mandat spécial limité, ne pouvait être engagée que sur le fondement d'un mandat apparent, de sorte qu'en omettant de relever l'existence d'un tel mandat, les juges du second degré ont entaché leur décision d'un défaut de base légale au regard de l'article 1998 du Code civil ;

Mais attendu que la Cour d'appel, ayant constaté que les cessions de parts consenties par la SCOGIM en mai 1979 étaient entachées de nullité, faute d'avoir été agréés par les autres associés, a recherché si la COGIFRANCE était fondée à penser que la SCOGIM avait conservé la qualité d'associé, ce qui - dans l'affirmative - rendait inutile que soit recueilli l'agrément par les autres associés de la cession de parts consentie le 19 mars 1981 par la COGIFRANCE à la SCOGIM ; qu'elle relève que la COGIFRANCE, représentée aux assemblées générales des S.C.I. tenues le 22 avril 1980, a eu connaissance de la présence parmi les associés des sociétés cessionnaires de la SCOGIM qu'elle avait pu ne pas connaître jusqu'alors et de l'absence de celle-ci ; qu'elle relève également qu'elle avait averti la SCOGIM dans sa lettre du 19 mars 1981, que "l'agrément des associés était nécessaire pour qu'elle redevienne membre des S.C.I." ; que de ces énonciations les juges du second degré ont déduit que la COGIFRANCE savait que la SCOGIM avait perdu sa qualité d'associé, ce qui rendait nécessaire de recueillir l'agrément des autres associés, condition mise par la SCOGIM à la cession de parts de la COGIFRANCE ; qu'ainsi, abstraction faite du motif critiqué relatif à la ratification par la COGIFRANCE des cessions litigieuses qui est surabondant, la Cour d'appel a légalement justifié sa décision ; d'où il suit qu'en aucune de ses six branches le moyen ne peut être accueilli ;

PAR CES MOTIFS :

REJETTE le pourvoi ;


Synthèse
Formation : Chambre civile 1
Numéro d'arrêt : 85-15319
Date de la décision : 22/07/1987
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Civile

Analyses

(Sur le 2e moyen) SOCIETE CIVILE - Société civile immobilière - Associés - Cession de parts - Validité.


Références :

Code civil 1134, 1338, 1998

Décision attaquée : Cour d'appel de Versailles, 21 mai 1985


Publications
Proposition de citation : Cass. Civ. 1re, 22 jui. 1987, pourvoi n°85-15319


Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:1987:85.15319
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