Attendu, selon les énonciations de l'arrêt attaqué, que M. Milton Z..., qui, en 1962, avait obtenu, par contrat, de Mme Y..., dite X..., la concession exclusive de l'importation et de la distribution des parfums X... aux Etats-Unis et au Canada, et la société Milton Z..., ont, en vertu de la clause compromissoire insérée dans le contrat de concession, saisi les arbitres, qui avaient reçu pouvoir d'amiables compositeurs, de difficultés qui, relativement à l'exécution du contrat, les opposaient à Mme X... ; que cet arbitrage était régi par la loi française ; qu'invoquant l'article 1028 du Code de procédure civile, alors applicable, Mme X... a fait opposition à l'ordonnance d'exequatur de la sentence rendue par les arbitres le 30 mars 1973 ; que l'arrêt de la cour d'appel de Paris, en date du 12 juillet 1974, qui avait débouté Mme X... de cette opposition a été cassé, de plusieurs chefs, par un arrêt de la première chambre civile de la Cour de Cassation en date du 16 juin 1976 ; que l'arrêt attaqué (Amiens, 13 mai 1985), statuant sur renvoi, a accueilli certains moyens de Mme X... et en a écarté d'autres ; .
Sur le premier moyen de cassation :
Attendu que Mme X... fait grief à cet arrêt d'avoir annulé un chef de la sentence arbitrale du 30 mars 1973 et laissé subsister les autres, alors que, selon le moyen, la nullité d'une partie de la sentence fait obstacle à son exequatur, qui ne peut être divisé ;
Mais attendu que, en l'absence d'une indivisibilité ou d'un lien de dépendance entre les différents chefs de la sentence, qui ne sont pas allégués, l'article 1028 du Code de procédure civile, applicable en la cause, ne fait pas obstacle à un exequatur partiel ; que le moyen est dépourvu de tout fondement ;
Sur le deuxième moyen, pris en ses deux branches :
Attendu que l'arrêt attaqué a déclaré irrecevables les moyens de nullité invoqués par Mme X... relativement à des chefs de la sentence au sujet desquels l'arrêt du 12 juillet 1974, qui avait débouté Mme X... de son opposition à l'ordonnance d'exequatur, n'avait pas été cassé ;
Attendu qu'il est fait grief à la cour d'appel de renvoi d'avoir ainsi statué, alors que, devant la juridiction de renvoi, pourraient, selon le pourvoi, être présentés tous moyens, soumis ou non à la première cour d'appel, à la seule exception des moyens rejetés par la Cour de Cassation, et alors que, au surplus, les trois griefs déclarés irrecevables reprochaient à certains chefs de condamnation de la sentence de réparer des préjudices extracontractuels se trouvant hors du champ d'application du compromis, ce qui est précisément le grief qu'avait admis l'arrêt de cassation à propos d'un autre chef de la sentence ;
Mais attendu que, dans son dispositif même, l'arrêt du 16 juin 1976 a expressément limité la cassation de l'arrêt de la cour d'appel aux dispositions écartant certains moyens de nullité énumérés ; que la cour d'appel de renvoi en a déduit à bon droit que Mme X... ne pouvait invoquer devant elle que des moyens de nullité visant les chefs compris dans la cassation ; qu'il importe peu que les griefs dirigés contre les dispositions irrévocables soient analogues à l'un des griefs qui ont entraîné la cassation ; que le moyen n'est donc fondé en aucune de ses branches ;
Sur le troisième moyen :
Attendu que l'arrêt attaqué a décidé que les arbitres n'avaient pas statué en dehors des termes du compromis en accordant à M. Z... une somme de 125 000 dollars pour compenser la perte que lui aurait fait subir l'application d'une clause du contrat du 1er juillet 1962 qui, en cas de hausse des prix des produits X..., ne l'autorisait à répercuter cette hausse sur ses prix de revente qu'en valeur absolue ;
Attendu que Mme X... soutient que, dès lors que les arbitres avaient reconnu que la clause précitée n'ouvrait à M. Z... aucun droit à l'augmentation des prix de vente autorisés, la somme à lui allouée ne pouvait avoir qu'un fondement extracontractuel et se trouvait à ce titre en dehors du compromis, au sens de l'article 1028. 1° du Code de procédure civile ;
Mais attendu que la cour d'appel de renvoi a relevé que les arbitres, " sans aller jusqu'à retenir un abus de droit dans l'application de la clause litigieuse, comme il leur était demandé, ont voulu en atténuer les effets excessifs, par référence à l'équité, pour concilier la lettre d'un contrat international de longue durée et son exécution de bonne foi dans des circonstances de fait qui bouleversaient l'équilibre entre les parties " ; que, par cette référence implicite à l'article 1134, alinéa 3, du Code civil, les juges de l'exequatur ont ainsi relevé que les arbitres s'étaient placés dans le cadre contractuel et en ont justement déduit qu'ils n'avaient pas statué hors compromis ; d'où il suit que le moyen n'est pas mieux fondé que les précédents ;
Et sur le quatrième moyen :
Attendu que la cour d'appel de renvoi a encore écarté le grief critiquant les arbitres pour avoir fixé à 476 000 dollars le préjudice subi par M. Z... du fait du refus arbitraire par Mme X... de lui livrer certains produits ;
Attendu que, reprenant un motif de cassation figurant dans l'arrêt du 16 juin 1976, le pourvoi reproche à la cour d'appel d'avoir, ce faisant, dénaturé l'acte de mission des arbitres et le mémoire de M. Z..., en date du 9 décembre 1970, auquel cet acte de mission faisait référence et qui fixait le préjudice de ce chef à 400 000 dollars ;
Mais attendu que, si cette critique pouvait porter contre l'arrêt de la cour d'appel de Paris du 12 juillet 1974, qui avait dit que l'acte de mission se bornait à énumérer les infractions contractuelles reprochées à Mme X..., sans chiffrer le montant des dommages-intérêts réclamés à propos de chacune d'elles, elle manque en fait en tant qu'elle est dirigée contre l'arrêt de la cour d'appel de renvoi ; qu'en effet, celui-ci, sans nier que l'acte de mission se soit référé au mémoire du 9 décembre 1970 qui évaluait le préjudice à 400 000 dollars, a considéré que les arbitres, en retenant comme montant de la condamnation le chiffre de 476 000 dollars avancé par un mémoire de juillet 1972, avaient tenu compte du préjudice continué en cours d'arbitrage et statué sur une demande de dommages-intérêts, non pas nouvelle, mais simplement actualisée au jour de leur sentence ; qu'il s'ensuit que, sans avoir à transmettre le dossier à l'assemblée plénière de la Cour de Cassation, malgré l'identité de moyens, dès lors que l'arrêt de la cour d'appel de renvoi n'a pas contredit la doctrine de l'arrêt qui la saisissait, il y a lieu pour la première chambre civile de rejeter ce moyen comme les trois premiers ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi