La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

03/03/1987 | FRANCE | N°85-15865

France | France, Cour de cassation, Chambre civile 1, 03 mars 1987, 85-15865


Sur le premier moyen :

Attendu, selon les énonciations des juges du fond, que la société Bureau d'études techniques pour la construction (ETCO) a, en 1964, demandé à son courtier habituel de lui faire souscrire un contrat d'assurance garantissant sa responsabilité professionnelle d'ingénieur conseil ; que, s'agissant d'un problème de coassurance, celui-ci s'est adressé à un " spécialiste ", la société Eeckman, à la fois courtier et représentante de diverses compagnies ; que la société Eeckman a fait délivrer à la société ETCO, par la société Northern, compagnie

apéritrice, aux droits de laquelle se trouve aujourd'hui la Commercial Union,...

Sur le premier moyen :

Attendu, selon les énonciations des juges du fond, que la société Bureau d'études techniques pour la construction (ETCO) a, en 1964, demandé à son courtier habituel de lui faire souscrire un contrat d'assurance garantissant sa responsabilité professionnelle d'ingénieur conseil ; que, s'agissant d'un problème de coassurance, celui-ci s'est adressé à un " spécialiste ", la société Eeckman, à la fois courtier et représentante de diverses compagnies ; que la société Eeckman a fait délivrer à la société ETCO, par la société Northern, compagnie apéritrice, aux droits de laquelle se trouve aujourd'hui la Commercial Union, une police prenant effet le 1er novembre 1964 et répartissant le risque, qui était garanti à 100 %, entre cette compagnie et plusieurs autres ; qu'après divers changements, opérés sous le contrôle de la société Eeckman, et faisant, chaque fois de sa part, l'objet d'une notification à la société ETCO, la Compagnie nouvelle d'assurances a pris 25 % du risque à sa charge ;

Attendu que cette compagnie a, le 20 décembre 1973, informé la société ETCO qu'elle se retirait de la coassurance ; que, cependant, la société Eeckman a continué à percevoir auprès de celle-ci des primes sur la base d'une couverture à 100 %, et à délivrer des attestations d'assurance sur cette même base ; que, le 27 février 1976, après survenance d'un sinistre consécutif à des travaux effectués pour la commune de Loudéac, la société Eeckman informait la société ETCO de la disparition de la couverture de la Compagnie nouvelle d'assurances depuis le 30 janvier 1974 et que, dans ces conditions, cette société restait son propre assureur à concurrence de 25 % ; que la société ETCO protestait ainsi que son courtier, en faisant valoir qu'elle avait demandé une couverture à 100 % et avait constamment payé pour cette couverture à laquelle elle estimait donc avoir droit ; que, le 1er décembre 1976, la société Eeckman a fait retour au courtier de la fraction de prime correspondant aux 25 % dont elle prétendait qu'ils n'étaient pas pris en charge ; que la société ETCO, ayant indemnisé la victime du sinistre, a assigné en remboursement la compagnie apéritrice, la société Eeckman et la Compagnie nouvelle d'assurances ; que la cour d'appel a mis hors de cause la Compagnie nouvelle d'assurances et qu'elle a condamné la compagnie apéritrice, en raison des agissements de son mandataire, la société Eeckman, à réparer le préjudice causé à la société ETCO par l'absence de couverture à 100 % du sinistre survenu ;

Attendu que les sociétés Eeckman et Commercial union reprochent à l'arrêt attaqué d'avoir déclaré non prescrite l'action exercée par la société ETCO au motif que l'événement ayant donné naissance à l'action était survenu le 1er décembre 1976 donc moins de deux ans avant l'assignation délivrée le 5 juin 1978, alors qu'il résulterait des constatations mêmes de la cour d'appel que c'est par lettre du 27 février 1976 que la société Eeckman avait informé la société ETCO de son refus partiel de couvrir le risque ; qu'il en résulterait donc une violation, par fausse application, de l'article L. 114-1 du Code des assurances ;

Mais attendu que l'action en cause était une action dirigée, en raison de sa négligence, contre un courtier spécialisé qui se trouvait en même temps représenter la compagnie apéritrice et non pas une action dérivant du contrat d'assurance ; que dès lors il importe peu qu'une erreur ait pu être commise quant au point de départ d'une prescription en tout état de cause inapplicable ; que le moyen ne peut être accueilli ;

Sur le deuxième moyen, pris en ses deux branches :

Attendu qu'il est en outre reproché à la cour d'appel, d'abord, de s'être déterminée par un motif hypothétique en affirmant que la société apéritrice avait été " certainement informée " du retrait de la Compagnie nouvelle d'assurances de toute couverture du risque, ensuite de s'être fondée sur les usages et les règles établis par l'assemblée plénière des sociétés d'assurances sans indiquer la nature et le contenu de ces règles et sans constater leur caractère obligatoire ;

Mais attendu que la cour d'appel, dont les motifs critiqués n'ont trait qu'à la connaissance de la situation par la compagnie apéritrice, a justifié, par les agissements à l'égard de l'assuré de la société Eeckman et son rôle de mandataire de ladite compagnie, la condamnation de sa mandante ; que le deuxième moyen est donc inopérant et ne peut être accueilli en aucune de ses branches ;

Rejette les premier et deuxième moyens ;

Mais sur le troisième moyen, pris en sa première branche :

Vu l'article L. 124-1 du Code des assurances ;

Attendu qu'il résulte de ce texte que dans les assurances de responsabilité, l'assureur n'est tenu que si, à la suite du fait dommageable prévu au contrat, une réclamation amiable ou judiciaire est présentée à l'assuré par le tiers lésé ;

Attendu que, saisie de conclusions aux termes desquelles la société ETCO aurait présenté, à la veille de l'expiration du contrat d'assurance, quatorze déclarations de sinistres qui n'auraient correspondu à aucune réclamation de tiers lésé, la cour d'appel, qui n'a pas recherché si ces déclarations auraient été ou non précédées de réclamations faites à l'assuré par voie amiable ou judiciaire, n'a pas donné de base légale à sa décision ;

PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur les deuxième et troisième branches du troisième moyen :

CASSE ET ANNULE, mais uniquement en ce qu'il a dit que le droit à réparation de la société ETCO s'étendait à la couverture des 14 sinistres déclarés le 3 juin 1976 l'arrêt rendu le 19 avril 1985, entre les parties, par la cour d'appel de Rennes ; remet, en conséquence, quant à ce, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Caen


Synthèse
Formation : Chambre civile 1
Numéro d'arrêt : 85-15865
Date de la décision : 03/03/1987
Sens de l'arrêt : Cassation partielle
Type d'affaire : Civile

Analyses

1° ASSURANCE (règles générales) - Prescription - Prescription biennale - Action dérivant du contrat d'assurance - Action en responsabilité dirigée contre un courtier mandataire de l'assureur - Application (non).

1° La prescription de l'article L. 114-1 du Code des assurances est inapplicable dès lors que l'action en cause était une action dirigée, en raison de sa négligence, contre un courtier spécialisé qui se trouvait en même temps représenter la compagnie apéritrice, et non pas une action dérivant du contrat d'assurance .

2° ASSURANCE RESPONSABILITE - Garantie - Conditions - Réclamation du tiers lésé - Recherche nécessaire.

2° Dans les assurances de responsabilité l'assureur n'est tenu que si, à la suite du fait dommageable prévu au contrat, une réclamation amiable ou judiciaire est présentée à l'assuré par le tiers lésé


Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Rennes, 19 avril 1985


Publications
Proposition de citation : Cass. Civ. 1re, 03 mar. 1987, pourvoi n°85-15865, Bull. civ. 1987 I N° 76 p. 57
Publié au bulletin des arrêts des chambres civiles 1987 I N° 76 p. 57

Composition du Tribunal
Président : Président :M. Fabre
Avocat général : Avocat général :M. Charbonnier
Rapporteur ?: Rapporteur :M. Jouhaud
Avocat(s) : Avocats :la SCP Peignot et Garreau, la SCP Le Bret et de Lanouvelle et la SCP Desaché et Gatineau .

Origine de la décision
Date de l'import : 14/10/2011
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:1987:85.15865
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award