CASSATION PARTIELLE sur le pourvoi formé par :
- X... Régis,
- Y... Paul,
contre un arrêt de la Cour d'appel de Riom, Chambre correctionnelle, en date du 12 février 1986, qui, pour homicide et blessures involontaires, les a condamnés, le premier à 4 mois d'emprisonnement avec sursis et 1 000 francs d'amende, le second à 8 mois d'emprisonnement avec sursis et 2 000 francs d'amende, a condamné en outre X... à 1 000 francs d'amende pour contravention au Code de la route et a sursis à statuer sur les intérêts civils.
LA COUR,
Vu le mémoire personnel produit au nom des demandeurs et le mémoire en défense ;
Attendu que le premier de ces mémoires est signé, non par les demandeurs, mais par leur conseil, avocat au barreau de Clermont-Ferrand ; que, dès lors, il n'est pas conforme aux dispositions de l'article 584 du Code de procédure pénale et ne saisit pas la Cour de Cassation des moyens qu'il peut contenir ;
Mais sur le moyen pris d'office de la violation des articles 385-1, 591 et 593 du Code de procédure pénale ;
Vu lesdits articles ;
Attendu qu'il résulte de l'article 385-1 du Code de procédure pénale que lorsqu'elle est saisie avant toute défense au fond d'une exception fondée sur une cause de nullité ou sur une clause du contrat d'assurance tendant à mettre l'assureur hors de cause et à l'exonérer totalement de son obligation de garantie à l'égard des tiers, la juridiction pénale est tenue de statuer ;
Attendu, en outre, que selon l'article 593 du même Code les arrêts en dernier ressort sont déclarés nuls lorsqu'il a été omis ou refusé de prononcer sur une ou plusieurs demandes des parties ;
Attendu, selon l'arrêt attaqué, qu'une collision s'est produite de nuit entre une automobile conduite par Z..., dans laquelle avaient pris place A... et B..., et un ensemble routier que son conducteur X... avait immobilisé sur la chaussée à l'occasion d'une manifestation de transporteurs ; que A... a été tué et B... blessé ; que sur les poursuites engagées pour homicide et blessures involontaires contre X... et contre Y..., organisateur de la manifestation, B... et les ayants droit de A... se sont constitués parties civiles ; que deux compagnies d'assurance, l'Union des assurances de Paris (UAP) et la compagnie " Le Foyer ", sont intervenues aux débats ;
Attendu qu'il ressort des énonciations de l'arrêt que X... avait souscrit auprès de l'Union des assurances de Paris (UAP) une police couvrant sa responsabilité civile afférente à la conduite de l'ensemble routier ; que le 1er février 1982 il avait souscrit auprès de la compagnie " Le Foyer " un contrat garantissant le même risque, la police le liant à l'UAP ne devant toutefois cesser d'avoir effet que le 8 avril 1982 ; que l'accident litigieux s'est produit le 29 mars 1982, date à laquelle les deux contrats d'assurance étaient en cours de validité ; que X... a déclaré le sinistre à la compagnie " Le Foyer " ;
Attendu que celle-ci a dénié sa garantie et sollicité sa mise hors de cause en faisant valoir que le contrat souscrit auprès d'elle par X... contenait une clause selon laquelle, au cas où il existerait des assurances antérieures couvrant les mêmes risques, sa propre garantie ne pourrait jouer qu'à titre de complément, pour pallier une éventuelle insuffisance de ces assurances antérieures ; que l'UAP a soutenu que les deux assureurs devaient prendre en charge le sinistre, chacun pour moitié, par application des dispositions de l'article L. 121-4 du Code des assurances dans sa rédaction due à la loi du 13 juillet 1982 ;
Attendu que la Cour d'appel, après avoir déclaré les prévenus coupables des délits objet de la poursuite, a sursis à statuer sur les prétentions des parties civiles " jusqu'à ce que la juridiction de droit commun ait statué sur les effets de la situation de cumul des contrats souscrits par X... " ;
Mais attendu qu'en se déterminant ainsi, alors, d'une part, qu'il lui appartenait de se prononcer elle-même sur le mérite de l'exception soulevée par la compagnie " Le Foyer " et qui, se fondant sur une clause du contrat d'assurance, était de nature à exonérer totalement cet assureur de son obligation de garantie à l'égard des tiers, et alors, d'autre part, qu'elle était saisie de conclusions des ayants droit de A... sollicitant la condamnation in solidum des prévenus et des deux compagnies d'assurances à réparer leur préjudice, la juridiction du second degré a méconnu les principes ci-dessus rappelés ;
D'où il suit que la cassation est encourue de ce chef ;
Par ces motifs :
CASSE ET ANNULE l'arrêt susvisé de la Cour d'appel de Riom en date du 12 février 1986, mais seulement en ce qu'il a refusé de statuer sur l'exception soulevée par la compagnie d'assurance " Le Foyer " et sursis à prononcer sur l'action civile jusqu'à ce que la juridiction de droit commun ait statué sur cette exception, toutes autres dispositions dudit arrêt étant expressément maintenues ;
Et pour qu'il soit statué à nouveau conformément à la loi, dans les limites de la cassation ainsi prononcée :
RENVOIE la cause et les parties devant la Cour d'appel de Bourges.