CASSATION PARTIELLE sur le pourvoi formé par :
- le Fonds de Garantie Automobile, partie intervenante,
contre un arrêt de la Cour d'appel de Rennes, Chambre correctionnelle, en date du 6 mars 1985, qui, dans une poursuite exercée contre X... des chefs de blessures involontaires sous l'empire de l'ivresse ou d'un état alcoolique et infractions au Code de la route, s'est prononcé sur les intérêts civils.
LA COUR,
Vu les mémoires produits en demande et en défense ;
Sur le moyen unique de cassation pris de la violation des articles 5 du décret n° 83-482 du 9 juin 1983, L. 211-5, R. 211-11, R. 211-10 et R. 211-3 du Code des assurances, R. 193 du Code de la route, de l'article 6 de l'arrêté du 24 septembre 1980, ensemble les articles 591 et 593 du Code de procédure pénale ;
" pris de ce que l'arrêt attaqué a confirmé le jugement qui a déclaré la compagnie d'assurances La France, partie intervenante, " bien fondée à opposer un refus de garantie des conséquences dommageables des blessures subies par Patrice Y... ", qui avait pris place sur le cyclomoteur conduit par X... ;
" aux motifs qu'il est constant que le contrat d'assurance souscrit par X... comportait l'exclusion ci-après aux conditions générales, article 23, § 79 a " ne sont pas garantis les dommages subis par les personnes transportées à titre gratuit sur un véhicule à deux roues lorsque cette garantie n'est pas prévue par stipulation expresse aux conditions particulières " ; que ces " conditions particulières " relatives à l'assurance des cyclomoteurs indiquaient littéralement : " sont notamment exclus les dommages subis par les personnes transportées " ; que l'article 5 du décret n° 83-482 du 9 juin 1983 a abrogé le premièrement de l'article R. 211-11 du Code des assurances, lequel autorisait les assureurs, comme cela a été le cas pour le contrat litigieux, à exclure de la garantie les personnes transportées sur des véhicules à deux roues ; que ce texte est applicable à la présente espèce, ayant été publié au Journal officiel du 14 juin 1983, soit antérieurement à l'accident survenu ; mais considérant que le décret dont s'agit ne saurait pour autant couvrir les situations illégales analogues à celle dans laquelle s'est trouvé Fabrice Y... ; considérant, manifestement, que ce jeune homme, personne transportée, l'était de façon illicite, très précisément en violation de l'article 6 de l'arrêté du 24 septembre 1980 puisqu'il était âgé de plus de 14 ans " ;
" alors qu'en raison de l'abrogation, par l'article 5, du décret n° 83-483 du 9 juin 1983, du premièrement de l'article R. 211-11 du Code des assurances déclarant valables les clauses du contrat ayant pour objet d'exclure de la garantie la responsabilité encourue par l'assuré : " du fait des dommages subis par les personnes transportées sur un véhicule à deux roues ", le contrat d'assurance ne peut, suivant l'article R. 211-10, 2°, du même Code resté en vigueur, comporter une exclusion de garantie qu'en ce qui concerne les dommages subis par les personnes transportées lorsque le transport n'est pas effectué dans des conditions suffisantes de sécurité... ", que pour l'application de ces dispositions, l'article R. 211-3 dudit Code prévoit que " le transport est considéré comme effectué dans des conditions suffisantes de sécurité... d) en ce qui concerne les véhicules à deux roues... lorsque le véhicule ne transporte qu'un seul passager en sus du conducteur " ; qu'en l'état de ces textes relatifs à l'assurance des véhicules terrestres à moteur, la Cour d'appel n'a pas légalement justifié sa décision en se bornant à déclarer que le décret du 9 juin 1983 " ne saurait pour autant couvrir des situations illégales analogues à celle dans laquelle s'est trouvé Fabrice Y... ; que ce jeune homme, personne transportée, l'était de façon illicite, " très précisément en violation de l'article 6 de l'arrêté du 24 septembre 1980 puisqu'il était âgé de plus de 14 ans " alors que l'article R. 193 du Code de la route et l'arrêté du 24 septembre 1980, notamment l'article 6, aux termes duquel " le passager d'un cycle ou d'un cyclomoteur à deux roues ne doit pas être âgé de plus de 14 ans ", sanctionné pénalement, ne pouvaient servir de fondement au refus de garantie opposé par l'assureur de la compagnie La France qui devait s'apprécier exclusivement au regard des règles précitées insérées dans le Code des assurances applicable au jour de l'accident " ;
Vu lesdits articles ;
Attendu qu'en matière d'assurance obligatoire d'un véhicule terrestre à moteur, le fait que la faute de l'assuré ait été pénalement sanctionnée ne met pas obstacle à l'exécution par l'assureur de son obligation de garantie ; que l'article L. 113-1 du Code des assurances, applicable à tous les contrats d'assurance, pose, en effet, le principe que, hors le cas de faute intentionnelle ou dolosive impliquant chez l'assuré la volonté de créer le dommage tel qu'il s'est réalisé, les sinistres causés par la faute de l'assuré sont à la charge de l'assureur ; qu'il résulte de la combinaison des articles R. 211-10-2° et A. 211-3- d), ainsi que de l'article R. 211-11 modifié par l'article 5 du décret du 9 juin 1983 que nonobstant toute clause contraire l'assureur d'un véhicule à deux roues est tenu de dédommager le passager victime d'un accident, pourvu que cette victime soit l'unique personne transportée ;
Qu'ainsi, en déclarant la compagnie La France fondée en son refus de garantie, au motif que la victime était transportée dans des conditions illicites, la Cour d'appel n'a pas donné de base légale à sa décision ;
Par ces motifs :
CASSE ET ANNULE l'arrêt susvisé de la Cour d'appel de Rennes, en date du 6 mars 1985, mais seulement en ce qu'il a déclaré la compagnie La France non tenue à garantie, et pour qu'il soit à nouveau statué conformément à la loi, dans les limites de la cassation ainsi prononcée :
RENVOIE la cause et les parties devant la Cour d'appel d'Angers.