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17/06/1986 | FRANCE | N°84-14717

France | France, Cour de cassation, Chambre civile 1, 17 juin 1986, 84-14717


Sur le premier moyen, pris en ses trois branches :

Attendu que, selon les juges du fond, Mme X... a fait mettre en place par l'entreprise Chagot, dans le jardin de son pavillon, une citerne destinée à être remplie de gaz propane liquéfié et qui, grâce à un tube de cuivre pénétrant dans le sous-sol de la maison, devait alimenter la chaudière de son système de chauffage aux lieu et place des deux bouteilles de gaz constituant l'installation originaire ; que pour satisfaire le désir de sa cliente de ne pas être privée de chauffage pendant les quelques jours qui allaient s'é

couler entre la mise en place de la nouvelle installation et le remp...

Sur le premier moyen, pris en ses trois branches :

Attendu que, selon les juges du fond, Mme X... a fait mettre en place par l'entreprise Chagot, dans le jardin de son pavillon, une citerne destinée à être remplie de gaz propane liquéfié et qui, grâce à un tube de cuivre pénétrant dans le sous-sol de la maison, devait alimenter la chaudière de son système de chauffage aux lieu et place des deux bouteilles de gaz constituant l'installation originaire ; que pour satisfaire le désir de sa cliente de ne pas être privée de chauffage pendant les quelques jours qui allaient s'écouler entre la mise en place de la nouvelle installation et le remplissage de la citerne, l'entreprise Chagot a différé la suppression de l'ancien dispositif, maintenu en service, tout en laissant ouvert, dans le vide sanitaire, sous le pavillon, le tube provenant de la citerne et non encore raccordé à la chaudière ; qu'elle a néanmoins d'ores et déjà délivré à Mme X..., dûment signé, le certificat de conformité exigé en la matière et attestant " que le raccordement était étanche sous la pression de service et que le gaz passait normalement dans les canalisations " ; que la société Quincaillerie Régionale de la Brie ci-après dite Q.R.B., liée à la société Elf Antargaz par un contrat en exécution duquel elle a contresigné le certificat de conformité, a donné ce contreseing sans vérifier l'exactitude des énonciations du document ; que de même, au vu du certificat contresigné, le préposé de la société Elf Antargaz a procédé au remplissage de la citerne ; que le gaz livré s'est alors répandu dans le vide sanitaire et que le fonctionnement de la chaudière a provoqué son explosion, laquelle a détruit l'immeuble ;

Attendu que Mme X... et son assureur, Groupe des Assurances Mutuelles de France ci-après dit G.A.M.F., ont assigné en réparation de leurs préjudices l'entreprise Chagot, la société Q.R.B. et son assureur Union des Assurances de Paris ci-après dite U.A.P., ainsi que la société Elf Antargaz ; que l'arrêt attaqué a condamné in solidum l'entreprise Chagot et la société Q.R.B. à indemniser Mme X... et le G.A.M. F., la charge des condamnations étant répartie entre elles par moitié ; qu'il a mis hors de cause Elf Antargaz ; qu'il a déclaré l'U.A.P. non tenue à garantie envers son assurée Q.R.B. ;

Attendu que Q.R.B. reproche en premier lieu aux juges d'appel d'avoir ainsi retenu sa responsabilité alors que, d'une part, ils ne se seraient pas expliqués sur le fait que le pavillon était demeuré chauffé par l'ancienne installation, alors que, d'autre part, ils n'auraient pas davantage répondu au moyen de droit qu'elle avait tiré de la substitution d'un simple contrat de coopération au précédent contrat de distributeur la liant à Elf Antargaz, et alors que, de troisième part, ils auraient entaché leur arrêt d'un défaut de base légale en omettant de rechercher si la faute essentielle n'était pas celle de l'entreprise Chagot, qui lui avait dissimulé le caractère prématuré de son certificat de conformité ;

Mais attendu que l'arrêt attaqué énonce expressément que " l'ancien système de chauffage avait continué à fonctionner ", qu'il appartenait dès lors à des professionnels " compétents ou supposés tels " de prendre " toutes dispositions pour assurer sans risque la mise en service de la nouvelle installation après cessation de fonctionnement de la précédente ", que Q.R.B., qui devait " s'assurer de la consistance de l'installation avant de demander au livreur de remplir la citerne ", s'était bornée à contresigner le certificat établi par l'entreprise Chagot et qu'ainsi les deux professionnels " ont, l'un et l'autre, commis des manquements graves à leurs obligations, en relation avec l'accident " ; que, la matérialité du contreseing n'étant pas contestée et sa délivrance supposant à elle seule, à la charge de son auteur, l'obligation de s'assurer effectivement, au préalable, de la consistance de l'installation, qu'il ait ou non la qualité de distributeur, l'argument auquel se référe la seconde branche était inopérant ; que la Cour d'appel, qui a déduit de ses constatations que les fautes de Chagot et de Q.R.B. étaient " aussi grossières l'une que l'autre ", a légalement justifié sa décision et qu'aucun des trois griefs formulés ne peut donc être accueilli ;

Sur le deuxième moyen, pris en ses deux branches :

Attendu qu'il est ensuite reproché à l'arrêt attaqué d'avoir mis hors de cause la société Elf Antargaz, alors que, d'une part, selon le moyen, les prescriptions réglementaires et l'usage de la corporation imposaient de ne pas livrer, comme en l'espèce, en l'absence du client et en tout cas de fermer le robinet de coupure générale et la " vanne départ ", et alors que, d'autre part, la Cour d'appel se devait au moins de retenir l'imprudence du livreur qui remplissait pour la première fois une cuve récemment installée, et ce, hors la présence de la propriétaire, de l'installateur et du prétendu distributeur, et n'a cependant pris aucune précaution, telle que la fermeture du robinet de sortie de la citerne ;

Mais attendu que la Cour d'appel a relevé " que, contrairement à ce que soutient Q.R.B., il n'entrait pas dans les obligations d'Elf Antargaz de vérifier si le certificat de conformité avait été signé et contresigné à tort ou à raison par l'installateur et le distributeur " ; qu'elle a pu en déduire que le livreur, qui avait en main ce certificat, n'avait pas commis de faute en s'abstenant, avant remplissage de la citerne, de procéder lui-même à une troisième vérification et de fermer le robinet de sortie, ce qui, selon ses constatations, n'était pas davantage prescrit ; que le moyen ne peut donc être accueilli en aucune de ses deux branches ;

Mais, sur le troisième moyen ;

Vu l'article 1134 du Code civil ;

Attendu que les clauses des conditions particulières d'une police d'assurance ont prééminence sur celles des conditions générales au cas où elles sont inconciliables avec elles ;

Attendu que pour déclarer l'U.A.P. non tenue à garantie envers son assurée Q.R.B., laquelle invoquait par conclusions les conditions particulières de la police, qui était produite, la Cour d'appel se fonde sur ce que " sans qu'il soit même besoin d'examiner le point de savoir quelles annexes étaient applicables à la police (...), ces annexes étant sans influence sur le problème posé, force est de retenir que l'article 2-3.13 des conditions générales excluait de la garantie " les dommages survenant " après achèvement des ouvrages, travaux et prestations de service " ;

Attendu qu'en se refusant à rechercher si l'exclusion ainsi prévue par les conditions générales n'était pas absente des conditions particulières en ce qui concernait les prestations de service telles que la vérification d'installations à laquelle la société Q.R.B. était tenue pour pouvoir contresigner le certificat de conformité, et dont seules, en effet, l'omission ou la mauvaise exécution pouvaient contribuer comme en l'espèce à la survenance du dommage, la Cour d'appel n'a pas donné de base légale à sa décision ;

PAR CES MOTIFS :

CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il a déclaré l'Union des Assurances de Paris non tenue à garantie, l'arrêt rendu le 25 avril 1984 entre les parties, par la Cour d'appel de Paris ; remet, en conséquence, quant à ce, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la Cour d'appel d'Orléans


Synthèse
Formation : Chambre civile 1
Numéro d'arrêt : 84-14717
Date de la décision : 17/06/1986
Sens de l'arrêt : Cassation partielle
Type d'affaire : Civile

Analyses

ASSURANCE (règles générales) - Police - Conditions particulières - Prééminence sur les conditions générales - Clauses inconciliables

Les clauses des conditions particulières d'une police d'assurance ont prééminence sur celles des conditions générales au cas où elles sont inconciliables entre elles.


Références :

Code civil 1134

Décision attaquée : Cour d'appel de Paris, 25 avril 1984

A RAPPROCHER : Cour de Cassation, chambre civile 1, 1969-05-12, bulletin 1969 I N° 174 p. 141 (Cassation) et les arrêts cités.


Publications
Proposition de citation : Cass. Civ. 1re, 17 jui. 1986, pourvoi n°84-14717, Bull. civ. 1986 I N° 166 p. 167
Publié au bulletin des arrêts des chambres civiles 1986 I N° 166 p. 167

Composition du Tribunal
Président : Président :M. Joubrel
Avocat général : Avocat général :M. Rocca
Rapporteur ?: Rapporteur :M. Raoul Béteille
Avocat(s) : Avocats :M. Choucroy, M. Célice, la Société civile professionnelle Boré et Xavier, M. Defrenois et M. Parmentier

Origine de la décision
Date de l'import : 14/10/2011
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:1986:84.14717
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