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10/06/1986 | FRANCE | N°85-92827

France | France, Cour de cassation, Chambre criminelle, 10 juin 1986, 85-92827


IRRECEVABILITE et CASSATION PARTIELLE sur les pourvois formé, par :
- X... Lakdar,
- la compagnie d'assurances Helvetia Accidents,
- l'agent judiciaire du Trésor public,
contre un arrêt de la Cour d'appel de Chambéry, Chambre correctionnelle, en date du 17 avril 1985 qui, dans une procédure suivie contre le premier nommé des chefs d'homicide involontaire commis sous l'empire d'un état alcoolique, délit de fuite et contravention au Code de la route, s'est prononcé sur les intérêts civils.
LA COUR,
Vu la connexité joignant les pourvois ;
Sur la recevabilité

du pourvoi de l'agent judiciaire du Trésor public ;
Attendu que l'arrêt attaqué ...

IRRECEVABILITE et CASSATION PARTIELLE sur les pourvois formé, par :
- X... Lakdar,
- la compagnie d'assurances Helvetia Accidents,
- l'agent judiciaire du Trésor public,
contre un arrêt de la Cour d'appel de Chambéry, Chambre correctionnelle, en date du 17 avril 1985 qui, dans une procédure suivie contre le premier nommé des chefs d'homicide involontaire commis sous l'empire d'un état alcoolique, délit de fuite et contravention au Code de la route, s'est prononcé sur les intérêts civils.
LA COUR,
Vu la connexité joignant les pourvois ;
Sur la recevabilité du pourvoi de l'agent judiciaire du Trésor public ;
Attendu que l'arrêt attaqué qui a déclaré irrecevable comme s'étant produite tardivement en cause d'appel l'intervention de l'agent judiciaire du Trésor n'est pas critiqué de ce chef par le demandeur ;
Que ce dernier étant ainsi définitivement reconnu étranger à l'instance est sans intérêt et sans droit à attaquer des dispositions de l'arrêt portant sur les rapports entre les seules parties demeurées en cause et qui ne peuvent acquérir à son égard l'autorité de la chose jugée ni lui faire grief ;
D'où il suit que ledit pourvoi doit être déclaré irrecevable ;
Sur le pourvoi de X... et de la compagnie d'assurances Helvetia ;
Vu le mémoire produit ;
Sur le moyen unique de cassation, commun à ces demandeurs, pris de la violation des articles 1382 du Code civil, 464 et 593 du Code de procédure pénale, 1er de l'ordonnance du 7 janvier 1959, défaut de motifs, manque de base légale ;
" en ce que l'arrêt attaqué partiellement infirmatif a condamné le tiers responsable d'un accident à payer à Gilbert Y... la somme de 300 000 F, à Pierre Y... celle de 50 388 F et à Anne Y... la somme de 26 636 F au titre de leur préjudice économique ;
" aux motifs que la défunte, employée des Postes et Télécommunications, percevait un salaire net de 8 051 F par mois, que Gilbert Y... exerce la profession de convoyeur ; que s'il n'a pas produit de pièces justifiant de son salaire, il est certain que celui-ci était au moins égal au salaire minimum garanti ; qu'il n'y a pas lieu, comme l'appelant le demande, de surseoir à statuer pour obtenir la justification de celui-ci ; que la disparition de son épouse apporte un préjudice au foyer puisque le traitement de celle-ci ne contribue plus au fonctionnement du foyer ; que Y... percevra un jour une pension de réversion, que le montant du préjudice économique subi par chacun des enfants ayant été exactement évalué doit être confirmé (arrêt p. 4 et 5) ;
" alors que l'évaluation du préjudice subi par la victime doit être opérée par le juge au moment où il statue ; qu'en déterminant le préjudice économique des parties civiles, dont la Cour d'appel constate qu'il est représenté par la perte d'un salaire pour le foyer familial, en fonction du SMIC que percevait Y... au moment de l'accident, sans rechercher quel était son salaire effectif au moment de la fixation du préjudice économique, la Cour d'appel de Chambéry n'a pas donné de base légale à sa décision et a par suite violé les textes visés au moyen ;
" alors que la réparation du préjudice de la victime doit être intégrale sans entraîner un enrichissement ; que pour calculer le montant des dommages-intérêts, les juges du fond doivent prendre en considération la réparation du préjudice qui résulte des prestations versées par l'Etat aux ayants cause de la victime dont le capital est, aux termes de l'article 1er de l'ordonnance de 1959, remboursable par le tiers responsable de l'accident ; que ces prestations ont pour objet en effet de réparer totalement ou partiellement la perte de revenus consécutive au décès de la victime ; qu'en ne prenant pas dès lors en considération les sommes versées par l'Etat aux ayants cause de la victime pour fixer leur préjudice économique, la Cour d'appel a alloué une indemnité qui excède le montant du préjudice effectivement subi et a par suite violé l'article 1382 du Code civil ;
" aux motifs que la règle d'ordre public du double degré de juridiction ainsi que l'inapplicabilité en matière criminelle des articles 554 et 555 du nouveau Code de procédure civile s'opposent à toute intervention de l'Etat pour la première fois en cause d'appel ; que par suite l'intervention de l'agent judiciaire du Trésor est irrecevable ; qu'il échet de constater que l'Etat, en vertu de l'ordonnance du 7 janvier 1959, est subrogé dans les droits de la victime et dispose de plein droit d'une action contre le tiers responsable en remboursement de toutes prestations versées à la victime ou ses ayants droit du fait du décès (arrêt p. 5, § 6 et § 9) ;
" alors qu'en constatant que l'Etat était de plein droit subrogé dans les droits de la victime et disposait d'une action directe en remboursement contre le tiers responsable, la Cour de Chambéry a, nonobstant le prononcé de l'irrecevabilité de l'intervention de l'Etat en cause d'appel qui demandait le remboursement de ses prestations, violé l'article 1er de l'ordonnance de 1959 en évaluant le préjudice des ayants cause sans tenir compte des prestations ainsi versées par l'Etat et réparant déjà au moins partiellement le préjudice subi par les consorts Y... " ;
Vu lesdits articles ;
Attendu qu'il résulte des dispositions de l'ordonnance du 7 janvier 1959 que lorsque le décès d'un agent de l'Etat est imputable à un tiers, la réparation du préjudice subi par les ayants droit est assurée tant par les prestations de l'Etat que, le cas échéant, par l'indemnité complémentaire mise à la charge du tiers ; qu'il s'ensuit que les ayants droit ne sauraient cumuler le bénéfice desdites prestations avec l'indemnité de droit commun ;
Attendu qu'il ressort des énonciations de l'arrêt attaqué que X..., reconnu coupable d'homicide involontaire sur la personne de Josette Z... épouse Y..., employée des Postes, a été, par une décision définitive, déclaré entièrement responsable des conséquences dommageables de ce délit ;
Attendu que sur l'appel relevé par la compagnie d'assurances Helvetia, partie intervenante, d'un jugement qui avait alloué aux consorts Y... diverses indemnités, l'agent judiciaire du Trésor est intervenu devant la juridiction du second degré pour réclamer le remboursement de prestations servies par l'Etat au conjoint survivant de la victime et à ses deux enfants mineurs ;
Attendu que la Cour d'appel, après avoir déclaré cette intervention irrecevable comme tardive, a exactement relevé qu'en vertu de l'ordonnance du 7 janvier 1959 l'Etat, subrogé dans les droits de la victime, disposait contre le tiers responsable d'une action en remboursement de toutes les prestations versées aux ayants droit du fait du décès et que ce recours s'exerçait par imputation à due concurrence sur les indemnités allouées, à l'exclusion de celles qui réparaient des préjudices de caractère personnel ;
Mais attendu qu'en condamnant néanmoins X... à payer aux parties civiles des indemnités correspondant à l'intégralité du préjudice subi, sans en déduire les prestations qui contribuaient à réparer ledit préjudice, les juges ont méconnu le principe ci-dessus rappelé ;
D'où il suit que la cassation est encourue de ce chef ;
Par ces motifs :
Déclare IRRECEVABLE le pourvoi de l'agent judiciaire du Trésor ;
Et sur le pourvoi de X... et de la compagnie d'assurances Helvetia :
CASSE ET ANNULE l'arrêt susvisé de la Cour d'appel de Chambéry en date du 17 avril 1985, sauf en celles de ses dispositions qui ont déclaré irrecevable l'intervention de l'agent judiciaire du Trésor et fixé l'indemnisation du préjudice moral, et pour qu'il soit à nouveau statué conformément à la loi, dans les limites de la cassation prononcée ;
RENVOIE la cause et les parties devant la Cour d'appel de Grenoble.


Synthèse
Formation : Chambre criminelle
Numéro d'arrêt : 85-92827
Date de la décision : 10/06/1986
Sens de l'arrêt : Irrecevabilité et cassation partielle
Type d'affaire : Criminelle

Analyses

1° CASSATION - Qualité - Partie au procès - Agent judiciaire du Trésor - Intervention en cause d'appel - Irrecevabilité - Pourvoi - Irrecevabilité.

ETAT - Action civile - Intervention en cause d'appel - Irrecevabilité - Cassation - Qualité - Partie au procès (non) * INTERVENTION - Intervention en cause d'appel - Irrecevabilité - Agent judiciaire du Trésor - Cassation - Qualité - Partie au procès (non).

1° L'agent judiciaire du Trésor dont l'intervention tardive en cause d'appel a été déclarée irrecevable est sans intérêt et sans droit et donc non recevable à se pourvoir contre les dispositions d'un arrêt non susceptibles d'acquérir à son égard l'autorité de la chose jugée et de lui faire grief (1).

2° ACTION CIVILE - Préjudice - Réparation - Victime agent d'un service public - Recours - Recours de la victime ou des ayants droit contre le tiers - Non-cumul des prestations avec l'indemnité de droit commun.

2° Même si l'agent judiciaire du Trésor n'est pas régulièrement présent aux débats les ayants droit d'un agent de l'Etat mortellement blessé ne peuvent cumuler le bénéfice des prestations servies par la collectivité publique avec l'indemnité de droit commun mise à la charge du responsable de l'accident (2).


Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Chambéry, 17 avril 1985

(1) A RAPPROCHER : Cour de Cassation, chambre criminelle, 1969-11-04, bulletin criminel 1969 N° 279 p. 667 (Irrecevabilité). Cour de Cassation, chambre criminelle, 1971-05-25, bulletin criminel 1971 N° 174 p. 438 (Irrecevabilité). (2) A RAPPROCHER : Cour de Cassation, chambre criminelle, 1973-02-21, bulletin criminel 1973 N° 87 p. 205 (Cassation) et les arrêts cités. Cour de Cassation, chambre criminelle, 1984-05-29, bulletin criminel 1984 N° 198 (4) p. 515 (Cassation) et l'arrêt cité.


Publications
Proposition de citation : Cass. Crim., 10 jui. 1986, pourvoi n°85-92827, Bull. crim. criminel 1986 N° 197 p. 508
Publié au bulletin des arrêts de la chambre criminelle criminel 1986 N° 197 p. 508

Composition du Tribunal
Président : Président :M. Bruneau, Conseiller le plus ancien faisant fonctions
Avocat général : Avocat général : M. de Sablet
Rapporteur ?: Rapporteur : Mlle Bregeon
Avocat(s) : Avocats : MM. Parmentier et Ancel.

Origine de la décision
Date de l'import : 14/10/2011
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:1986:85.92827
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