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11/03/1986 | FRANCE | N°85-13237;85-13324

France | France, Cour de cassation, Chambre commerciale, 11 mars 1986, 85-13237 et suivant


Joint les pourvois n°s 85.13-237 et 85.13-324, formés respectivement par M. Z... et par M. X..., qui attaquent le même arrêt ;

Attendu qu'il résulte des énonciations de cet arrêt (Grenoble, 14 février 1985) que le syndic de la liquidation des biens de la société Copharm a assigné MM. X... et Y..., dirigeants de cette société, en paiement des dettes sociales, que les premiers juges ont accueilli cette demande en son principe, que les défendeurs ont interjeté appel de leur décision à laquelle ils reprochaient d'être intervenue sans que la cause ait été communiquée au

ministère public et sans qu'ils aient été entendus en Chambre du conseil, ...

Joint les pourvois n°s 85.13-237 et 85.13-324, formés respectivement par M. Z... et par M. X..., qui attaquent le même arrêt ;

Attendu qu'il résulte des énonciations de cet arrêt (Grenoble, 14 février 1985) que le syndic de la liquidation des biens de la société Copharm a assigné MM. X... et Y..., dirigeants de cette société, en paiement des dettes sociales, que les premiers juges ont accueilli cette demande en son principe, que les défendeurs ont interjeté appel de leur décision à laquelle ils reprochaient d'être intervenue sans que la cause ait été communiquée au ministère public et sans qu'ils aient été entendus en Chambre du conseil, que la Cour d'appel a invité les parties à présenter leurs observations sur le moyen susceptible d'être tiré de la nullité de l'acte introductif d'instance et que, après communication du dossier au ministère public et sur les conclusions de celui-ci, elle a condamné solidairement les appelants à supporter une partie de l'insuffisance d'actif ;

Sur les premiers moyens des pourvois, pris en leurs diverses branches et réunis :

Attendu que MM. Z... et X... font grief à la Cour d'appel d'avoir statué ainsi, après avoir annulé le jugement entrepris et évoqué, alors que, selon le pourvoi du premier, ayant constaté que le syndic avait agi par voie d'assignation au lieu de le faire par voie de requête présentée au tribunal de commerce, que la procédure devait être annulée parce que " le jugement n'avait pas été précédé de l'audition des dirigeants sociaux en Chambre du conseil " et que, " pas davantage ", la cause n'avait été communiquée au ministère public, la Cour d'appel devait en déduire qu'elle ne pouvait se saisir d'un litige qui, en raison de l'irrégularité de la saisine du tribunal, n'avait pas été valablement soumis à la juridiction de première instance et a donc violé les articles 14 et 562 du Nouveau Code de procédure civile, et alors, selon le pourvoi du second, d'une part, que l'introduction d'une instance par un moyen procédural autre que celui prévu par la loi, spécialement comme en l'espèce par une assignation qui, en tant que telle était parfaitement régulière, n'entraîne pas nullité d'un acte de procédure, mais a pour effet de ne pas saisir la juridiction et donne donc naissance à une fin de non-recevoir qui, même lorsqu'elle est relevée d'office, doit être retenue sans qu'il y ait à justifier d'un grief, de sorte que l'arrêt a violé l'article 124 du Nouveau Code de procédure civile, alors, d'autre part, que dans les circonstances procédurales de l'espèce, telles qu'analysées par l'arrêt, l'absence de saisine du tribunal par le syndic n'a pas pu être régularisée par la faculté légale accordée en la matière au tribunal de se saisir d'office, dès lors, que la Cour d'appel a constaté que les formalités substantielles qui conditionnent une telle saisine d'office (audition des défendeurs en Chambre du conseil et communication de la cause au ministère public) n'avaient pas été observées et que le jugement était de ce fait nul, de telle sorte que la saisine du tribunal n'a pu s'opérer de quelle manière que ce soit et que ce n'est pas seulement le jugement, mais l'ensemble de la procédure de première instance qui est entachée dès l'origine d'une irrégularité substantielle ; que, par suite, l'effet dévolutif de l'appel n'avait pu se produire puisque, sur le fond, aucune instance n'avait été valablement engagée ; que le juge du

second degré ne pouvait donc que constater la nullité de la procédure dans son ensemble, sans pouvoir la régulariser lui-même, puisque le droit de se saisir d'office n'appartient qu'au juge du premier degré (et non au juge d'appel) ; qu'il s'ensuit que l'arrêt attaqué procède d'une violation combinée des articles 126, 562 du Nouveau Code de procédure civile et 99 alinéa 1er de la loi du 13 juillet 1967, et alors enfin que viole derechef l'article 562 du Nouveau Code de procédure civile, en son alinéa 2, l'arrêt qui fait application de ce texte, après avoir constaté que l'appel ne tendait nullement à l'annulation du jugement et que l'irrégularité de la procédure de première instance a été soulevée d'office par la Cour d'appel, ce qui constitue une hypothèse étrangère aux prévisions de ce texte ;

Mais attendu, en premier lieu, que la Cour d'appel a déclaré que le jugement était nul parce qu'il avait été rendu sans que la cause ait été communiquée au ministère public, et sans que les dirigeants sociaux aient été entendus ou dûment appelés en Chambre du conseil, et n'a pas retenu la nullité ou l'absence d'effet de l'assignation puisqu'elle a énoncé que " la saisine du tribunal était régulière quant au fond " ;

Attendu, en deuxième lieu, qu'elle a pu se prononcer ainsi alors que les prescriptions contenues dans l'article 95 du décret du 22 décembre 1967, et relatives à la requête du syndic sont édictées dans l'intérêt des dirigeants, après avoir constaté que l'assignation contenait dans l'exposé de la demande et des moyens, qu'elle avait été délivrée un an avant les débats de première instance et que MM. X... et Y... avaient été à même de présenter utilement leur défense ;

Attendu enfin que, dès lors que MM. X... et Y... avaient conclu à l'irrégularité de la procédure en même temps qu'ils concluaient au fond, sans avoir limité leurs appels à certains chefs, la Cour d'appel était saisie de l'intégralité du litige ; que c'est donc en vertu de l'effet dévolutif attaché à ces appels, et non pas d'office, que la Cour d'appel s'est déterminée au fond comme elle l'a fait ;

D'où il suit qu'aucun des griefs des moyens n'est fondé ;

Sur le second moyen des pourvois, pris chacun en ses deux branches :

Attendu que MM. Z... et X... reprochent encore à la Cour d'appel d'avoir refusé de surseoir à statuer jusqu'à la communication par le syndic d'un certain nombre de documents qu'ils lui réclamaient, aux motifs notamment qu'ils n'avaient opposé l'exception de communication de pièces qu'après avoir conclu au fond et que, par le jeu de la présomption de l'article 99 de la loi du 13 juillet 1967, la charge de la preuve n'incombait pas au syndic, alors que, selon le premier pourvoi, d'une part, la demande de communication de pièces peut être présentée en tout état de cause ; que la Cour d'appel a violé les articles 73 et 74 du Nouveau Code de procédure civile, et alors que, d'autre part, dans des conclusions précises, demeurées sans réponse, M. Z... détaillait les pièces dont la communication était indispensables à la connaissance de la Cour d'appel pour apprécier le montant exact du passif de la société et la part qu'il avait prise dans la gestion de celle-ci ; que la réponse sybilline de l'arrêt selon laquelle les documents énumérés ne paraissaient pas indispensables aux débats ne constitue pas l'examen

du moyen de nature à justifier légalement l'arrêt ; qu'en conséquence la Cour d'appel a violé l'article 455 du Nouveau Code de procédure civile, alors que, selon le second pourvoi, d'une troisième part, en se déterminant comme elle l'a fait, la Cour d'appel a violé les articles 74, 132 et suivants du Nouveau Code de procédure civile aux termes desquels la demande de communication de pièces ne constitue pas une exception de procédure et peut être formulée en tout état de cause, et alors enfin qu'en vertu de l'article 99 de la loi du 13 juillet 1967, la seule existence d'une insuffisance d'actif ne suffit pas à justifier la condamnation des dirigeants sociaux et que la présomption édictée par ce texte ne prive pas les défendeurs du droit de solliciter la production par le syndic des documents sociaux dont ils ont été déssaisis à son profit par l'effet de la procédure collective ; d'où il suit que l'arrêt procède d'une violation de l'article 11 du Nouveau Code de procédure civile ;

Mais attendu qu'ayant estimé que l'insuffisance d'actif était constante et s'élevait, selon les précisions apportées par le syndic, à une somme supérieure au montant de la condamnation qu'elle a prononcée, la Cour d'appel n'a fait qu'user de son pouvoir discrétionnaire en rejetant la demande dont elle était saisie, sans pour autant déclarer celle-ci irrecevable ; qu'elle a ainsi répondu aux conclusions invoquées et fondé sa décision du chef critiqué, abstraction faite des motifs ci-dessus reproduits, et qui sont surabondants ; qu'il s'ensuit que les moyens sont sans fondement ;

PAR CES MOTIFS :

REJETTE les pourvois


Synthèse
Formation : Chambre commerciale
Numéro d'arrêt : 85-13237;85-13324
Date de la décision : 11/03/1986
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Commerciale

Analyses

1° REGLEMENT JUDICIAIRE - LIQUIDATION DES BIENS (loi du 13 juillet 1967) - Personne morale - Dirigeants sociaux - Paiement des dettes sociales - Action en justice - Procédure - Requête du syndic - Omission - Assignation tendant aux mêmes fins.

1° PROCEDURE CIVILE - Acte de procédure - Nullité - Irrégularité de fond - Définition - Faillite - règlement judiciaire - liquidation des biens - Personne morale - Dirigeants sociaux - Action en paiement des dettes sociales - Action introduite par voie d'assignation (non).

1° Répond aux exigences de l'article 95 du décret du 22 décembre 1967 - dont les prescriptions sont édictées dans l'intérêt des dirigeants sociaux - l'assignation délivrée au dirigeant d'une société en liquidation des biens à la requête du syndic de cette procédure collective pour qu'il soit condamné sur le fondement de l'article 99 de la loi du 13 juillet 1967 au paiement de tout ou partie des dettes sociales, dès lors que cette assignation précise l'objet de la demande et a été délivrée assez tôt pour que le dirigeant ait pu utilement organiser sa défense.

2° APPEL CIVIL - Effet dévolutif - Portée - Jugement sur le fond - Annulation - Effets.

2° APPEL CIVIL - Effet dévolutif - Conclusions de l'appelant - Appelant concluant au fond et à l'annulation du jugement - 2° REGLEMENT JUDICIAIRE - LIQUIDATION DES BIENS (loi du 13 juillet 1967) - Procédure - Ministère public - Communication des causes - Nécessité - Dirigeants sociaux - 2° REGLEMENT JUDICIAIRE - LIQUIDATION DES BIENS (loi du 13 juillet 1967) - Personne morale - Dirigeants sociaux - Paiement des dettes sociales - Action en justice - Procédure - Audition du dirigeant en chambre du conseil - Convocation - Omission - Annulation de la décision - Portée - 2° REGLEMENT JUDICIAIRE - LIQUIDATION DES BIENS (loi du 13 juillet 1967) - Procédure - Appel - Dirigeant social poursuivi en paiement de dettes sociales - Audition en chambre du conseil - Omission - Appel tendant à l'annulation du jugement - Décision au fond - MINISTERE PUBLIC - Communication - Communication obligatoire - Règlement judiciaire ou liquidation des biens - Dirigeants sociaux - PROCEDURE CIVILE - Droits de la défense - Audition des parties - Audition en chambre du conseil - Omission - Dirigeant social poursuivi en paiement des dettes sociales.

2° C'est à juste titre qu'une Cour d'appel après avoir annulé un jugement rendu en matière de responsabilité pécuniaire des dirigeants sociaux sans que la cause ait été communiquée au Ministère public et sans que les dirigeants sociaux aient été entendus ou dûment appelés en chambre du conseil, a énoncé faisant application de l'article 562 alinéa 2 du nouveau Code de procédure civile qu'elle était saisie de l'intégralité du litige par l'effet dévolutif de l'appel, dès lors qu'il avait été conclu au fond par les parties.


Références :

(1)
(2)
Décret du 22 décembre 1967 art. 95
Loi du 13 juillet 1967 art. 99
Nouveau code de procédure civile 562 al. 2

Décision attaquée : DECISION (type)

DANS LE MEME SENS : Cour de Cassation, chambre commerciale, 1983-07-11, bulletin 1983 IV N° 213 (2) p. 185 (Rejet) et l'arrêt cité. A RAPPROCHER : Cour de Cassation, chambre commerciale, 1978-05-03, bulletin 1978 IV N° 128 (1) p. 107 (Rejet). Cour de Cassation, chambre civile 2, 1985-02-27, bulletin 1985 II N° 46 p. 33 (Cassation) et l'arrêt cité. Cour de Cassation, chambre commerciale, 1985-10-23, bulletin 1985 IV N° 247 p. 207 (Rejet) et l'arrêt cité. Cour de Cassation, chambre commerciale, 1986-02-25, bulletin 1986 IV N° 28 p. 24 (Rejet) et les arrêts cités.


Publications
Proposition de citation : Cass. Com., 11 mar. 1986, pourvoi n°85-13237;85-13324, Bull. civ. 1986 IV N° 45 p. 38
Publié au bulletin des arrêts des chambres civiles 1986 IV N° 45 p. 38

Composition du Tribunal
Président : Président : M. Baudoin -
Avocat général : Avocat général : M. Cochard -
Rapporteur ?: Rapporteur : M. Perdriau -
Avocat(s) : Avocats : la Société civile professionnelle Martin-Martinière et Ricard, la Société civile professionnelle Lesourd et Baudin et la Société civile professionnelle Lyon-Caen, Fabiani et Liard.

Origine de la décision
Date de l'import : 14/10/2011
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:1986:85.13237
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