Vu la connexité, joint les pourvois n° s 84-43.313 et 84-43.314 ;
Sur les deux moyens réunis, pris de la violation des articles L. 322-2 et R. 322-1 du Code du travail, 5 et 6 de la convention du 5 novembre 1980, 13 de la loi des 16-24 août 1790, des arrêtés des 11 août 1980 et 18 août 1981, et de l'article 2 du Code civil :
Attendu que la convention d'allocation spéciale du Fonds National de l'Emploi (F.N.E.), conclue, le 5 novembre 1980, au bénéfice des salariés âgés, licenciés pour motif économique, entre la société automobile Talbot et le ministre du travail, prévoyait que l'entreprise verserait au F.N.E. une somme égale à 12 % du salaire de référence, tant pour son compte qu'au titre de la participation des salariés, celle-ci étant égale à la différence entre l'indemnité conventionnelle de licenciement et l'indemnité de départ ; que MM. X... et Y..., qui avaient adhéré à cette convention et auraient pu prétendre à une indemnité conventionnelle de licenciement dont la différence avec l'indemnité de départ aurait été plus élevée que le montant de la contribution à verser au F.N.E., ont réclamé à la société Talbot, qui ne leur avait versé que l'indemnité de départ, le solde de cette indemnité conventionnelle ;
Que la société Talbot fait grief à l'arrêt attaqué d'avoir accueilli ces demandes, alors, d'une part, que la convention conclue le 5 novembre 1980 n'assignait pas de plafonnement à la contribution de chaque salarié, seule la participation globale de l'employeur et des salariés étant limitée à 12 % du salaire trimestriel de référence (articles 5 et 6) ; que pour limiter néanmoins à 12 % la contribution personnelle des intéressés au financement du F.N.E., la Cour d'appel qui s'est uniquement fondée sur les arrêtés ministériels des 11 août 1980 et 18 août 1981, n'a pas tenu compte des dispositions de la convention d'allocation spéciale F.N.E. conclue par l'entreprise seule créatrice de droits et d'obligations entre les parties, et, alors, d'autre part, qu'en présence d'une difficulté sérieuse sur la portée ou la légalité d'un acte administratif non réglementaire, le juge judiciaire doit surseoir à statuer dans l'attente de la décision de la juridiction administrative ; qu'ainsi il incombait à l'arrêt attaqué s'il estimait sujettes à interprétation les dispositions précitées de la convention d'allocation spéciale signée par la société Talbot le 5 novembre 1980, non de passer outre à leur contenu mais de surseoir à statuer jusqu'au prononcé de la décision de la juridiction administrative sur ce point ; alors, encore, que l'arrêté du 11 août 1980 (art. 5) seul applicable aux rapports des parties régies par une convention d'allocation spéciale signée le 5 novembre 1980, n'avait pas fixé de limite à la contribution individuelle de chaque salarié au financement du F.N.E., contribution dont le montant devait correspondre à la différence entre l'indemnité conventionnelle de licenciement et l'indemnité de départ perçue par lui ; qu'en estimant néanmoins qu'il résultait de ce texte que la participation de chaque salarié ne pouvait en aucun cas excéder celle mise à la charge de l'employeur (soit 12 %), l'arrêt a violé par fausse interprétation l'article 5 de l'arrêté du 11 août 1980 ; alors, en outre, que l'arrêté du 18 août 1981 qui a institué un plafonnement de la participation du salarié à 12 % du salaire trimestriel de référence a expressément énoncé que cette nouvelle disposition " remplaçait " celle de l'arrêté du 11 août 1980 dont l'article 5
prévoyait une contribution non plafonnée du salarié au financement du F.N.E. ; qu'en considérant néanmoins l'arrêté du 18 août 1981 comme interprétatif et donc applicable aux intéressés adhérents à une convention F.N.E. signée le 5 novembre 1980 par l'employeur dans le cadre de l'arrêté antérieur, l'arrêt a violé l'article 2 du Code civil et les arrêtés des 11 août 1980 et 18 août 1981 ; alors, en tout état de cause, qu'en plafonnant à 12 % la contribution propre du salarié au financement du F.N.E., l'arrêté du 18 août 1981 n'a aucunement autorisé les salaries à revendiquer la part excédentaire de l'indemnité conventionnelle de licenciement non prélevée pour le versement au F.N.E., indemnité à laquelle ils avaient renoncé en adhérant à la convention d'allocation spéciale ; qu'en condamnant néanmoins la société à verser un complément à l'indemnité de départ déjà perçue par les intéressés et qui était la seule indemnité due par l'employeur aux salariés bénéficiaires du système de garantie de ressources en application d'une convention d'allocation spéciale, la Cour d'appel a là encore violé par fausse interprétation les arrêtés des 11 août 1980 et 18 août 1981 ; et alors, enfin, qu'aux termes de l'arrêté du 18 août 1981 le plafonnement de la participation du salarié à 12 % du salaire de référence est applicable " sauf le cas de conventions particulières " ; qu'en limitant à ce taux la participation du salarié en l'espèce sans rechercher si la convention signée par la société avec le ministre du travail dans le cadre de l'arrêté du 11 août 1980 n'appartenait pas à la catégorie de convention exclue par l'arrêté du 18 août 1981 de son champ d'application, l'arrêt n'a pas justifié légalement sa décision au regard de l'arrêté du 18 août 1981 ;
Mais attendu que, dès lors d'une part, qu'il n'était pas contesté que ladite convention était conforme en ce qui concernait le calcul de la participation des salariés aux dispositions de l'arrêté du 11 août 1980, en application duquel elle avait été conclue la Cour d'appel qui a interprêté cet arrêté, s'est bornée à faire application de la convention dont la légalité n'était pas discutée, et qu'elle n'était donc pas tenue de surseoir à statuer ; que, d'autre part, après avoir relevé que l'article 5 dudit arrêté du 11 août 1980 dispose que la contribution de 12 % des salaires que doit verser l'employeur est diminuée de la participation du salarié, l'arrêt en a exactement déduit que cette dernière participation appelée à venir en déduction de la contribution versée par l'employeur au titre de chaque salarié, ne saurait en aucun cas en excéder le montant et que la renonciation du salarié à la différence entre l'indemnité conventionnelle de licenciement et l'indemnité de départ, était limitée au montant de cette participation ;
Qu'ainsi abstraction faite des motifs surabondants relatifs à l'arrêté du 18 août 1981, la Cour d'appel a légalement justifié sa décision ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi
Condamne la demanderesse aux dépens, y compris les frais d'exécution ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, Chambre sociale, et prononcé par M. le Président en son audience publique du dix neuf février mil neuf cent quatre vingt six, conformément à l'article 452 du nouveau code de procédure civile