CASSATION PARTIELLE sur le pourvoi formé par :
- l'administration des douanes,
contre un arrêt de la Chambre correctionnelle de la Cour d'appel de Colmar en date du 22 mars 1985 qui, pour opposition à l'exercice des fonctions d'agents des douanes par refus de communication de documents, a relaxé Y... (Philippe) des fins de la poursuite et a débouté l'Administration des fins de sa demande ;
LA COUR,
Vu le mémoire produit ;
Sur le moyen unique de cassation, pris de la violation des articles 53, 65, 413 bis, 431, 451, 455, 92 du Code des douanes, 593 du Code de procédure pénale, défaut de motifs et manque de base légale,
" en ce que l'arrêt attaqué a prononcé la relaxe au profit du prévenu du chef d'opposition à fonctions pour refus de communication de documents ;
" aux motifs que l'article 65 du Code des douanes vise exclusivement le cas où des documents sont conservés au domicile de la personne contrôlée ou dans un local habité par elle-même ; qu'en l'espèce les relevés bancaires exigés par l'administration n'appartenaient pas personnellement au prévenu ; qu'ils étaient, comme le compte bancaire, au nom d'une tierce personne domiciliée à l'étranger ; qu'il n'est de surcroît nullement établi que les documents litigieux se trouvaient matériellement sur le territoire français ; que les articles 65 et 413 bis du Code des douanes ne pourraient avoir pour effet de faire encourir les peines de la contravention au prévenu qui ne voudrait ou ne pourrait pas obtenir des documents appartenant à une tierce personne et les rapporter en France pour se justifier aux yeux de l'administration (arrêt p. 4 et 5) ;
" alors qu'en application de l'article 65 du Code des douanes, les documents de toute nature possédés par un particulier ou détenus pour son compte par des tiers doivent être communiqués sur leur réquisition aux fonctionnaires des douanes habilités dès lors que ces documents peuvent comporter des renseignements concernant des opérations régulières ou irrégulières relevant de leur compétence et sont propres à faciliter l'accomplissement de leur mission ; qu'il résulte du procès-verbal du 5 juin 1981 que Y... a reconnu avoir fait ouvrir à son profit un compte en Suisse par l'intermédiaire d'une dame X... et que le solde serait créditeur en sa faveur d'une somme de 14 000 francs suisses ; que pour relaxer Y... du chef d'opposition à fonctions pour non-communication de pièces, qu'il détenait par l'intermédiaire d'un tiers, l'arrêt attaqué déclare que les relevés bancaires étaient au nom d'une tierce personne ; qu'en statuant ainsi, la Cour d'appel a violé par fausse application l'article 65 du Code des douanes ; "
Vu lesdits articles ;
Attendu qu'aux termes de l'article 65 du Code des douanes rendu applicable au domaine cambiaire par les dispositions édictées par l'article 451 du même Code, les inspecteurs et certains agents de l'administration des douanes peuvent exiger la communication de papiers et documents de toute nature relatifs à des opérations intéressant leur service, notamment ceux se trouvant chez toutes les personnes physiques ou morales directement ou indirectement intéressées par des opérations régulières ou irrégulières relevant de la compétence douanière ;
Attendu qu'il appert de l'arrêt attaqué et des procès-verbaux, base des poursuites, que mis en demeure le 3 novembre 1982 au cours d'investigations régulièrement effectuées par les agents des douanes compétents de leur fournir les documents intéressant leur service, en l'espèce les relevés d'un compte bancaire qu'il reconnaissait avoir ouvert à l'étranger, mais sous l'identité d'un tiers y résidant, puis alimenté à plusieurs reprises en usant des services du même intermédiaire, Y... Philippe s'y est refusé ;
Attendu que pour le relaxer des fins de la poursuite et débouter l'administration des douanes de ses demandes, les juges énoncent que l'article 65 du Code des douanes " vise exclusivement le cas où les documents sont conservés au domicile de la personne contrôlée ou dans un local habité par elle-même ; que les documents bancaires exigés par l'administration des douanes n'appartenaient pas personnellement au prévenu mais à une tierce personne domiciliée à l'étranger et que de surcroît, il n'était nullement établi que les relevés litigieux se trouvaient matériellement sur le territoire français ; "
Mais attendu qu'en prononçant ainsi la Cour d'appel a ajouté aux textes de loi applicables des conditions qui n'y figurent pas et a, ainsi, méconnu le sens et la portée de ceux-ci ;
Que dès lors son arrêt encourt la cassation ;
Par ces motifs :
CASSE ET ANNULE, mais en ses seules dispositions concernant l'action douanière, l'arrêt de la Cour d'appel de Colmar du 22 mars 1985, et pour être jugé à nouveau conformément à la loi, dans les limites de la cassation ainsi prononcée :
RENVOIE la cause et les parties devant la Cour d'appel de Nancy.