SUR LE PREMIER MOYEN, PRIS EN SES DEUX BRANCHES : ATTENDU, SELON LES ENONCIATIONS DES JUGES DU FOND, QUE LA SOCIETE SCHENK ALGERIE, CONSTITUEE EN 1952, SOUS LA FORME D'UNE SOCIETE A RESPONSABILITE LIMITEE, AYANT SON SIEGE A ORAN, A TRANSFERE, A LA SUITE DE L'ACCESSION A L'INDEPENDANCE DE L'ALGERIE, SON SIEGE A SETE, ET A PRIS LA FORME D'UNE SOCIETE ANONYME, TOUT EN CONSERVANT UNE SUCCURSALE A ORAN ;
QU'ELLE AVAIT OUVERT UN COMPTE A LA BANQUE NATIONALE D'ALGERIE AUPRES DE LAQUELLE ELLE AVAIT ESCOMPTE UN ENSEMBLE DE VALEURS ET D'EFFETS LIBELLES EN FRANCS FRANCAIS VENANT A ECHEANCE AVANT LE 8 AOUT 1969, DATE A LAQUELLE LE FRANC A ETE DEVALUE ;
QU'AYANT MIS EN RECOUVREMENT DES EFFETS POSTERIEUREMENT AU 8 AOUT 1969, LA BANQUE NATIONALE ALGERIE, CONFORMEMENT A UNE ORDONNANCE DU 18 AOUT 1969 DU GOUVERNEMENT ALGERIEN, A PORTE LA PERTE RESULTANT DE LA DEVALUATION AU DEBIT DU COMPTE DE LA SOCIETE SCHENK ALGERIE CE QUI A RENDU CE COMPTE DEBITEUR D'UNE SOMME DE 1 029 449,51 DINARS ;
QUE, PAR JUGEMENT EN DATE DU 13 DECEMBRE 1974, DU TRIBUNAL CIVIL D'ORAN, CONFIRME PAR ARRET, EN DATE DU 6 AVRIL 1977 DE LA COUR D'ORAN, LA SOCIETE SCHENK ALGERIE A ETE CONDAMNEE A PAYER CETTE SOMME, AINSI QUE CELLE DE 2 000 DINARS DE DOMMAGES-INTERETS A LA BANQUE NATIONALE D'ALGERIE ;
ATTENDU QUE LA SOCIETE SCHENK ALGERIE FAIT GRIEF A L'ARRET CONFIRMATIF ATTAQUE D'AVOIR DECLARE EXECUTOIRE EN FRANCE L'ARRET DE LA COUR D'ORAN, DU 6 AVRIL 1977, ET LE JUGEMENT CONFIRME DU 13 DECEMBRE 1974, ALORS, SELON LE MOYEN, D'UNE PART, QUE LE PRIVILEGE DE JURIDICTION EDICTE PAR L'ARTICLE 15 DU CODE CIVIL A RAISON DE LA NATIONALITE FRANCAISE DU DEFENDEUR N'A PAS A ETRE EXPRESSEMENT INVOQUE DEVANT LES TRIBUNAUX ETRANGERS ;
QU'EN DECIDANT QUE LA SOCIETE SCHENK NE POUVAIT PLUS SE PREVALOIR DE CETTE DISPOSITION, POUR CONTESTER LA COMPETENCE DES TRIBUNAUX ALGERIENS, DES LORS QU' A AUCUN MOMENT DE LA PROCEDURE ELLE N'AVAIT DEMANDE A EN BENEFICIER, LA COUR D'APPEL A VIOLE, PAR REFUS D'APPLICATION, L'ARTICLE 15 DU CODE CIVIL, ET ALORS, D'AUTRE PART, QUE LA RENONCIATION TACITE AU PRIVILEGE DE L'ARTICLE 15 DU CODE CIVIL NE PEUT RESULTER QUE D'ACTES MANIFESTANT SANS EQUIVOQUE LA VOLONTE D'Y RENONCER ;
QU'EN PRETENDANT VOIR UNE TELLE RENONCIATION DANS LA PRESENTATION DE MOYENS DE DEFENSE AU FOND ET L'INITIATIVE D'UN APPEL DEVANT LA COUR D'ORAN, L'ARRET ATTAQUE A PRIVE DE BASE LEGALE SA DECISION AU REGARD DES ARTICLES 15, 1315 ET 2221 DU CODE CIVIL ;
MAIS ATTENDU QUE L'ARRET RELEVE QUE SUR L'ACTION PORTEE CONTRE ELLE DEVANT LE TRIBUNAL D'ORAN, LA SOCIETE SCHENK ALGERIE A COMPARU, A DEFENDU AU FOND, SANS AVOIR SOULEVE L'INCOMPETENCE DE LA JURIDICTION ETRANGERE, ET A INTERJETE APPEL DEVANT LA COUR D'ORAN DU JUGEMENT RENDU ;
QU'IL A PU DEDUIRE DE CE COMPORTEMENT UNE RENONCIATION TACITE DE LA SOCIETE SCHENK ALGERIE A SE PREVALOIR DES DISPOSITIONS DE L'ARTICLE 15 DU CODE CIVIL ;
QU'EN AUCUNE DE SES BRANCHES LE MOYEN N'EST DONC FONDE ;
SUR LE DEUXIEME MOYEN, PRIS EN SES DEUX BRANCHES : ATTENDU QUE L'ARRET ATTAQUE EST AUSSI CRITIQUE POUR AVOIR ESTIME QUE LE TRIBUNAL D'ORAN ETAIT COMPETENT AU REGARD DES REGLES DE COMPETENCE ORDINAIRES, AU MOTIF, D'UNE PART, QUE LA SOCIETE SCHENK N'AVAIT PAS SOULEVE L'INCOMPETENCE, ALORS QUE CE TEXTE EDICTANT DES REGLES DE COMPETENCE EXCLUSIVE, LA RENONCIATION A LA COMPETENCE DES TRIBUNAUX FRANCAIS NE POUVAIT RESULTER QUE D'ACTES MANIFESTANT SANS EQUIVOQUE UNE VOLONTE EN CE SENS, ACTES QUE LA COUR D'APPEL N'A PAS RELEVE ET AU MOTIF, D'AUTRE PART, QUE LA BANQUE NATIONALE D'ALGERIE AVAIT PU VALABLEMENT ASSIGNER DEVANT LE TRIBUNAL D'ORAN DANS LE RESSORT DUQUEL LA SOCIETE SCHENK ALGERIE AVAIT UNE SUCCURSALE REPRESENTEE PAR UN AGENT, ALORS QUE CETTE SIMPLE AGENCE NE POUVAIT AVOIR UNE PERSONNALITE MORALE DISTINCTE DE CELLE DE LA SOCIETE ELLE-MEME QUI ETAIT REGIE PAR LA LOI FRANCAISE ET QUE LES TRIBUNAUX FRANCAIS AVAIENT EXCLUSIVEMENT COMPETENCE, A RAISON DU SIEGE SOCIAL EN FRANCE DE LA SOCIETE DEFENDERESSE, POUR CONNAITRE DE L'ACTION EN PAIEMENT DU SOLDE DE SON COMPTE COURANT DANS LES LIVRES DE LA BANQUE NATIONALE D'ALGERIE ;
MAIS ATTENDU QUE L'ARTICLE 59, ALINEA 7, DU CODE DE PROCEDURE CIVILE APPLICABLE EN LA CAUSE, NE PRECISAIT PAS QUE LA SOCIETE DEVAIT ETRE ASSIGNEE DEVANT LE TRIBUNAL DU LIEU DE SON SIEGE SOCIAL, MAIS DEVANT "LE JUGE DU LIEU OU ELLE EST ETABLIE" ;
QUE LA COUR D'APPEL A RELEVE QUE LA SOCIETE SCHENK ALGERIE AVAIT A ORAN UNE SUCCURSALE IMPORTANTE AYANT A SA TETE UN AGENT QUI POUVAIT UTILEMENT LA REPRESENTER ;
QU'ELLE EN A DEDUIT A BON DROIT, PAR APPLICATION DU TEXTE PRECITE, QUE LA SOCIETE SCHENK ALGERIE AVAIT ETE VALABLEMENT ASSIGNEE DEVANT LE TRIBUNAL D'ORAN, OU ELLE ETAIT ETABLIE, DES LORS QU'IL ETAIT CONSTANT QUE L'ACTION ENGAGEE TENDAIT AU PAIEMENT DU SOLDE DU COMPTE COURANT QUI SERVAIT DIRECTEMENT AUX OPERATIONS DE CETTE SUCCURSALE ;
QU'ELLE A PAR CE MOTIF, ET ABSTRACTION FAITE DE CELUI, SURABONDANT, CRITIQUE PAR LA PREMIERE BRANCHE DU MOYEN, LEGALEMENT JUSTIFIE SA DECISION SUR CE POINT ;
QU'AINSI EN AUCUNE DE SES BRANCHES LE MOYEN NE PEUT ETRE ACCUEILLI ;
SUR LE TROISIEME MOYEN : ATTENDU QU'IL EST ENCORE SOUTENU QUE LE JUGE FRANCAIS SAISI D'UNE DEMANDE D'EXEQUATUR DOIT D'OFFICE VERIFIER SI LA DECISION ETRANGERE REUNIT LES CONDITIONS REQUISES ET CONSTATER DANS SA DECISION LE RESULTAT DE CET EXAMEN ;
QU'EN L'ESPECE, LA COUR D'APPEL N'A PAS CONSTATE QUE L'ENSEMBLE DES CONDITIONS PREVUES PAR L'ARTICLE 1ER DE LA CONVENTION FRANCO-ALGERIENNE DU 27 AOUT 1964 ETAIENT REUNIES ;
MAIS ATTENDU QUE LA COUR D'APPEL A VERIFIE QUE LES DECISIONS ALGERIENNES SOUMISES A SON CONTROLE EMANAIENT DE JURIDICTIONS COMPETENTES SELON LES REGLES FRANCAISES CONCERNANT LES CONFLITS DE JURIDICTIONS ;
QU'ELLE A ESTIME AUSSI QUE CES DECISIONS NE CONTENAIENT RIEN DE CONTRAIRE A LA CONCEPTION FRANCAISE DE L'ORDRE PUBLIC INTERNATIONAL, NI AUX PRINCIPES DE DROIT PUBLIC APPLICABLES EN FRANCE ;
QU'IL N'ETAIT PAS DISCUTE DEVANT ELLE, QUE TOUTES LES PARTIES EN CAUSE AVAIENT COMPARU ET QUE LES DECISIONS ETAIENT PASSEES EN FORCE DE CHOSE JUGEE ET SUSCEPTIBLES D'EXECUTION EN ALGERIE, CE QUI RESULTAIT DU SIMPLE EXAMEN DES PIECES PRODUITES ;
QU'AINSI, L'ARRET, MOTIVE, A FAIT UNE EXXACTE APPLICATION DE LA CONVENTION FRANCO-ALGERIENNE DU 27 AOUT 1964 ET A LEGALEMENT JUSTIFIE SA DECISION DECLARANT EXECUTOIRES EN FRANCE LES DEUX DECISIONS ALGERIENNES ;
QUE LE MOYEN N'EST DONC PAS FONDE ;
SUR LE QUATRIEME MOYEN, PRIS EN SES TROIS BRANCHES : ATTENDU QU'IL EST REPROCHE A LA JURIDICTION DU SECOND DEGRE D'AVOIR ESTIME NON CONTRAIRE A L'ORDRE PUBLIC L'ORDONNANCE PRISE PAR LE GOUVERNEMENT ALGERIEN LE 18 AOUT 1969, RESERVANT AU TRESOR PUBLIC LE BENEFICE REALISE PAR TOUTE PERSONNE PHYSIQUE OU MORALE, PAR SUITE DE MODIFICATIONS DE PARITES MONETAIRES, SUR DES DETTES OU DES CREANCES NEES ANTERIEUREMENT A CES MODIFICATIONS ET EN VERTU DE LAQUELLE LA BANQUE NATIONALE D'ALGERIE AVAIT CALCULE LE SOLDE DU COMPTE COURANT DE LA SOCIETE SCHENK ALGERIE, ALORS, SELON LE MOYEN, D'UNE PART, QU'EN VERTU DU PRINCIPE D'ORDRE PUBLIC DE LA SOUVERAINETE DES ETATS, CETTE ORDONNANCE NE POUVAIT AVOIR D'EFFET QUE SUR LE TERRITOIRE DE L'ETAT ALGERIEN ET QU'EN ACCORDANT L'EXEQUATUR A UNE DECISION FAISANT APPLICATION D'UNE TELLE MESURE A UNE SOCIETE AYANT SON SIEGE SOCIAL EN FRANCE, LA COUR D'APPEL A VIOLE CE PRINCIPE ;
QUE, D'AUTRE PART, LE JUGE DOIT REFUSER L'EXEQUATUR A TOUTE DECISION CONTRAIRE A L'ORDRE PUBLIC FRANCAIS QUAND BIEN MEME CETTE DECISION SERAIT FONDEE SUR UNE LOI DE POLICE ET DE SURETE DE L'ETAT DONT ELLE PROVIENT ;
QU'EN ENONCANT QUE L'ORDONNANCE PRISE LE 18 AOUT 1969 PAR LE GOUVERNEMENT ALGERIEN ETAIT UNE LOI DE POLICE GENERALE QUI DEVAIT S'APPLIQUER EN L'ESPECE EN ALGERIE MEME A UNE SOCIETE FRANCAISE EN VERTU DE L'ARTICLE 3 DU CODE CIVIL, LA COUR D'APPEL A MECONNU L'ETENDUE DE SON POUVOIR JURIDICTIONNEL ;
QU'ENFIN, EN STATUANT COMME ILS L'ONT FAIT, LES JUGES D'APPEL N'ONT PAS SATISFAIT AUX EXIGENCES DE LA CONVENTION FRANCO-ALGERIENNE DU 27 AOUT 1964, PRESCRIVANT AU JUGE DE L'EXEQUATUR DE VERIFIER QUE LA DECISION NE CONTIENT RIEN DE CONTRAIRE A L'ORDRE PUBLIC DE L'ETAT OU ELLE EST INVOQUEE ;
MAIS ATTENDU, D'ABORD, QU'EN ACCORDANT L'EXEQUATUR D'UNE DECISION ALGERIENNE QUI AVAIT FIXE LA CREANCE DE LA BANQUE NATIONALE D'ALGERIE EN TENANT COMPTE DE L'ORDONNANCE DU GOUVERNEMENT ALGERIEN, L'ARRET ATTAQUE N'A PAS POUR AUTANT FAIT PRODUIRE UN EFFET EXTRA TERRITORIAL A CETTE ORDONNANCE ;
ATTENDU, ENSUITE, QU'EN L'ESPECE, LES BENEFICES PROVENAIENT DE MODIFICATIONS DE PARITES PORTANT SUR LES ELEMENTS D'UN COMPTE COURANT TOUJOURS OUVERT, AU JOUR OU ELLES ETAIENT INTERVENUES, A LA BANQUE NATIONALE D'ALGERIE, C'EST-A-DIRE SUR DES CREANCES OU DES DETTES SOUMISES PARLEUR LOCALISATION A LA LOI ALGERIENNE ;
QU'A BON DROIT, ET SANS MECONNAITRE L'ETENDUE DE SON POUVOIR JURIDICTIONNEL, LA COUR D'APPEL A ESTIME -EN L'ABSENCE DE SPOLIATION NON INVOQUEE- QU'ELLE NE POUVAIT REFUSER EFFET A L'ACTE ETRANGER DE PUISSANCE PUBLIQUE QUI PORTAIT SUR DES DROIT INCORPORELS SOUMIS A LA LOI ALGERIENNE ;
ATTENDU, ENFIN, QU'EN ESTIMANT QUE LES DECISIONS JUDICIAIRES ALGERIENNES, QUI AVAIENT FAIT APPLICATION DE L'ORDONNANCE DU 18 AOUT 1969, DU GOUVERNEMENT ALGERIEN, N'ETAIENT PAS DE CE FAIT CONTRAIRES A LA CONCEPTION FRANCAISE DE L'ORDRE PUBLIC INTERNATIONAL, LES JUGES D'APPEL ONT PAR LA-MEME VERIFIE L'EXISTENCE DE LA CONDITION POSEE PAR L'ARTICLE 1ER-D)DE LA CONVENTION FRANCO-ALGERIENNE DU 27 AOUT 1964 ;
QU'EN AUCUNE DE SES BRANCHES LE MOYEN N'EST DONC FONDE ;
PAR CES MOTIFS : REJETTE LE POURVOI FORME CONTRE L'ARRET RENDU LE 16 FEVRIER 1982 PAR LA COUR D'APPEL DE MONTPELLIER ;