SUR LA RECEVABILITE DES POURVOIS ;
ATTENDU QUE, PAR UN PRECEDENT ARRET EN DATE DU 10 JUILLET 1979, LA CHAMBRE CRIMINELLE, STATUANT SUR UN PREMIER POURVOI DE LA PARTIE CIVILE, A CASSE ET ANNULE L'ARRET DE LA COUR D'APPEL EN DATE DU 30 OCTOBRE 1978 EN SES SEULES DISPOSITIONS CIVILES CONCERNANT LE DEMANDEUR DANS SES RAPPORTS AVEC LE FONDS DE GARANTIE AUTOMOBILE ET A DECLARE LEDIT POURVOI IRRECEVABLE, EN L'ETAT, EN CE QU'IL ETAIT DIRIGE CONTRE CELLES DES DISPOSITIONS CIVILES DE L'ARRET CONCERNANT LE DEMANDEUR DANS SES RAPPORTS AVEC LE PREVENU, AU MOTIF QUE LA DECISION PRECITEE, QUI AVAIT ETE RENDUE PAR DEFAUT A L'EGARD DE CE DERNIER, N'ETAIT PAS ENCORE SIGNIFIEE ET ETAIT RESTEE SUSCEPTIBLE D'OPPOSITION DE SA PART ;
ATTENDU QUE LE PREVENU N'AYANT PAS USE DE CETTE VOIE DE RECOURS A LA SUITE DE LA SIGNIFICATION DUDIT ARRET EFFECTUEE LE 17 AVRIL 1979, CETTE DECISION EST DEVENUE DEFINITIVE A SON EGARD ; QUE LA PARTIE CIVILE S'ETANT A NOUVEAU POURVUE LE 20 DECEMBRE 1979, SOIT APRES L'EXPIRATION DU DELAI PREVU PAR L'ARTICLE 492 ALINEA 1ER DU CODE DE PROCEDURE PENALE, IL Y A LIEU DE DECLARER SON SECOND POURVOI IRRECEVABLE COMME TARDIF ; QU'EN REVANCHE, LE PREMIER POURVOI DE LADITE PARTIE CIVILE, QUI AVAIT ETE DECLARE IRRECEVABLE EN L'ETAT, DOIT ETRE PRESENTEMENT EXAMINE PAR LA COUR DE CASSATION ;
AU FOND ;
VU LE MEMOIRE PRODUIT ;
SUR LE MOYEN UNIQUE DE CASSATION, PRIS DE LA VIOLATION DES ARTICLES 5 ET 1382 DU CODE CIVIL, 2, 3, 485, 512 ET 593 DU CODE DE PROCEDURE PENALE, DEFAUT DE REPONSE A CONCLUSIONS, MOTIFS HYPOTHETIQUES ET DUBITATIFS, DEFAUT DE MOTIFS ET MANQUE DE BASE LEGALE ;
EN CE QUE L'ARRET INFIRMATIF ATTAQUE A REDUIT A LA SOMME DE 120 000 FRANCS LE DOMMAGE MATERIEL SOUFFERT PAR LA JEUNE CAROLE X..., AU MOTIF QUE SI LA VICTIME AVAIT PU BENEFICIER D'UN EMPLOI QUI LUI EUT PROCURE UN REVENU DE 5 000 FRANCS PAR MOIS, LES ALEAS DE LA VIE HUMAINE N'AUTORISENT PAS A CONSIDERER COMME DES CERTITUDES DE SIMPLES PROBABILITES ; QUE COMPTE TENU DU NIVEAU SCOLAIRE DE LA VICTIME, ON DOIT ESTIMER QU'ELLE AVAIT UNE ACTIVITE L'AUTORISANT A REVENDIQUER UN SALAIRE DE L'ORDRE DE 2 500 FRANCS PAR MOIS ENVIRON DE SORTE QUE SA FILLE S'EST TROUVEE PRIVEE D'UNE SOMME DE 9 000 FRANCS PAR AN, QUE PAR SUITE ET EN APPLICATION DU BAREME DE LA CAISSE NATIONALE D'ASSURANCE SUR LA VIE, IL CONVIENT D'EVALUER A LA SOMME DE 120 000 FRANCS LE DOMMAGE MATERIEL SOUFFERT PAR LA JEUNE CAROLE ;
ALORS QUE, D'UNE PART, POUR LA FIXATION DU PREJUDICE, LES JUGES DOIVENT TENIR COMPTE DE LA PERTE DES CHANCES QU'AVAIT LA VICTIME DE VOIR SA SITUATION PROFESSIONNELLE S'AMELIORER ET SES GAINS D'AUGMENTER ; QU'UN TEL PREJUDICE, QUOIQUE FUTUR, PRESENTE UN CARACTERE CERTAIN, D'OU IL SUIT QUE LA COUR, QUI A STATUE PAR DES MOTIFS PUREMENT HYPOTHETIQUES, SANS S'EXPLIQUER SUR LE POINT DE SAVOIR SI, EN RAISON DU DEGRE DE PROBABILITE DUDIT EVENEMENT, IL Y AVAIT OU NON EN L'OCCURRENCE PERTE EFFECTIVE D'UNE CHANCE SERIEUSE D'AMELIORER LES RESSOURCES PROFESSIONNELLES DE LA VICTIME, N'A PAS JUSTIFIE LEGALEMENT SA DECISION ;
ALORS, D'AUTRE PART, QUE LA COUR A OMIS DE REPONDRE AUX CONCLUSIONS DU DEMANDEUR SOLLICITANT LA PRISE EN COMPTE DE L'EROSION MONETAIRE DANS L'EVALUATION DU PREJUDICE AINSI QUE L'AVAIENT FAIT LES PREMIERS JUGES ;
ALORS, EN OUTRE, QUE LES JUGES DOIVENT S'EXPLIQUER SUR LES DIVERS CHEFS DE PREJUDICE INVOQUES PAR LES CONCLUSIONS, QU'EN L'ESPECE, LA COUR A LAISSE SANS REPONSE LA DEMANDE DU DEMANDEUR RELATIVE A L'HERITAGE SUR LEQUEL LA JEUNE CAROLE POUVAIT COMPTER ;
ALORS, ENFIN ET EN TOUT ETAT DE CAUSE, QU'IL EST INTERDIT AUX JUGES DU FOND DE SE REFERER A DES REGLES ETABLIES A L'AVANCE POUR EVALUER LE MONTANT DU PREJUDICE RESULTANT D'UN ACCIDENT DE DROIT COMMUN, QU'EN L'ESPECE, LA COUR A VIOLE LE PRINCIPE EN APPLIQUANT LE BAREME DE LA CAISSE NATIONALE D'ASSURANCES SUR LA VIE, AU LIEU DE PROCEDER A UNE APPRECIATION IN CONCRETO DU PREJUDICE SUBI ;
VU LESDITS ARTICLES ;
ATTENDU QUE, SI LES JUGES APPRECIENT SOUVERAINEMENT LE PREJUDICE QUE PORTE L'INFRACTION A CELUI QUI S'EN PRETEND VICTIME, IL EN EST DIFFEREMMENT LORSQUE CETTE APPRECIATION EST DEDUITE DE MOTIFS CONTRADICTOIRES OU ERRONES OU NE REPONDANT PAS AUX CONCLUSIONS DES PARTIES ;
ATTENDU QU'IL APPERT DE L'ARRET ATTAQUE ET DES PIECES DE LA PROCEDURE QUE Y... JACQUES, POURSUIVI A LA SUITE D'UN ACCIDENT DE LA CIRCULATION AYANT OCCASIONNE LE DECES DE X... FLORENCE, A ETE DECLARE COUPABLE DE CONDUITE D'UN VEHICULE AUTOMOBILE EN ETAT D'IVRESSE ET HOMICIDE INVOLONTAIRE SUR LA PERSONNE DE LA SUSNOMMEE ; QUE LA RESPONSABILITE DES CONSEQUENCES DOMMAGEABLES DUDIT ACCIDENT A ETE MISE ENTIEREMENT A LA CHARGE DE CE PREVENU EN PRESENCE DU FONDS DE GARANTIE AUTOMOBILE, PARTIE INTERVENANTE AU PROCES ;
QU'EN VUE DE L'EVALUATION DU PREJUDICE SUBI PAR L'ENFANT DE LA VICTIME, X... CAROLE, AGEE DE 8 MOIS, REPRESENTEE PAR X... PIERRE, CE DERNIER, QUI S'ETAIT CONSTITUE PARTIE CIVILE, A VERSE AUX DEBATS UN CERTAIN NOMBRE DE DOCUMENTS TENDANT A ETABLIR QUE LA VICTIME, PLACEE A TITRE TEMPORAIRE, AU MOMENT DES FAITS, COMME AIDE-CAISSIERE DANS UN PARC DE STATIONNEMENT AUX APPOINTEMENTS MENSUELS DE 2 500 FRANCS ENVIRON, AVAIT ETE ADMISE POUR UN STAGE DE 9 MOIS DANS UN CENTRE D'ENSEIGNEMENT DES TECHNIQUES MODERNES DE DISTRIBUTION DEPENDANT DE L'INSTITUT DE FORMATION PERMANENTE DE LA CHAMBRE DE COMMERCE ET D'INDUSTRIE DE LIMOGES ET " QU'IL ETAIT RAISONNABLE DE PENSER " QUE, TROIS ANS APRES SA FORMATION, ELLE AURAIT PU PRETENDRE A UNE REMUNERATION MENSUELLE DE L'ORDRE DE 5 000 FRANCS ; QUE, SELON LES MEMES CONCLUSIONS, LA SECTION DEPARTEMENTALE DE L'AGENCE NATIONALE POUR L'EMPLOI, QUI AVAIT ETE CONSULTEE, PRECISAIT EN OUTRE QU'IL N'EXISTAIT " AUCUN PROBLEME DE RECLASSEMENT POUR LES INTERESSES AYANT SUIVI CES STAGES, CEUX-CI, (ETANT), EN EFFET, RECLAMES DANS LEUR QUASI-TOTALITE, SOIT PAR L'ENTREMISE DE L'ORGANISME DE FORMATION, SOIT PAR NOS SERVICES " ;
QUE L'ARRET ATTAQUE, APRES AVOIR RELEVE QUE LA PARTIE CIVILE JUSTIFIAIT QUE LA VICTIME, CELIBATAIRE, AVAIT PRESENTE UNE CANDIDATURE QUI AVAIT ETE AGREEE PAR L'ORGANISME PRECITE, LEQUEL S'ENGAGEAIT, A L'ISSUE D'UN STAGE PREVOYANT UNE FORMATION ACCELEREE, A LUI PROCURER DANS LES CONDITIONS SUS-INDIQUEES UN EMPLOI PLUS REMUNERATEUR, A REFUSE CEPENDANT DE TENIR COMPTE DE LA PERTE D'UNE CHANCE QUI ETAIT AINSI INVOQUEE AU MOTIF NOTAMMENT QUE L'EVENTUALITE ENVISAGEE ENTRAIT DANS LE DOMAINE DES " SIMPLES PROBABILITES " ET QUE, COMPTE TENU DU NIVEAU SCOLAIRE DE X... FLORENCE, IL CONVENAIT DE NE RETENIR POUR BASE D'EVALUATION DU PREJUDICE QUE LE MONTANT DU SALAIRE EFFECTIVEMENT PERCU AU MOMENT DE L'ACCIDENT ;
ATTENDU QUE CE MOTIF N'APPORTE PAS UNE REPONSE SATISFAISANTE AU CHEF DE DEMANDE DE LA PARTIE CIVILE DEMANDERESSE ; QU'EN EFFET, L'ELEMENT DE PREJUDICE CONSTITUE PAR LA PERTE D'UNE CHANCE PEUT PRESENTER EN LUI-MEME UN CARACTERE CERTAIN ET DIRECT CHAQUE FOIS QU'EST CONSTATEE LA DISPARITION, PAR L'EFFET DU DELIT, DE LA PROBABILITE D'UN EVENEMENT FAVORABLE, ENCORE QUE, PAR DEFINITION, LA REALISATION D'UNE CHANCE NE SOIT JAMAIS CERTAINE ;
QU'EN STATUANT COMME ELLE L'A FAIT ET EN S'ABSTENANT DE S'EXPLIQUER, AU VU DES PIECES PRODUITES ET DES CONCLUSIONS DEPOSEES, SUR LE POINT DE SAVOIR SI, EN RAISON DU DEGRE DE PROBABILITE DE L'EVENEMENT ESPERE, IL Y AVAIT OU NON EN L'OCCURRENCE UNE CHANCE SERIEUSE D'AMELIORATION DES RESSOURCES PROFESSIONNELLES DE LA VICTIME, LA COUR D'APPEL N'A PAS JUSTIFIE SA DECISION AU REGARD DES TEXTES VISES AU MOYEN ;
PAR CES MOTIFS ;
CASSE ET ANNULE L'ARRET SUSVISE DE LA COUR D'APPEL DE BORDEAUX, EN DATE DU 30 OCTOBRE 1978 MAIS SEULEMENT EN SES DISPOSITIONS CONCERNANT LE DEMANDEUR DANS SES RAPPORTS AVEC LE PREVENU Y... JACQUES ; ET POUR QU'IL SOIT A NOUVEAU STATUE CONFORMEMENT A LA LOI, DANS LES LIMITES DE LA CASSATION AINSI PRONONCEE, RENVOIE LA CAUSE ET LES PARTIES DEVANT LA COUR D'APPEL DE POITIERS, A CE DESIGNEE PAR DELIBERATION SPECIALE PRISE EN CHAMBRE DU CONSEIL.