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23/10/1980 | FRANCE | N°80-90036

France | France, Cour de cassation, Chambre criminelle, 23 octobre 1980, 80-90036


Vu le mémoire produit ;
Sur le premier moyen de cassation, pris de la violation des articles 609 du Code de procédure pénale, R. 212-5 du Code de l'organisation judiciaire ;
" en ce que la Cour d'appel d'Amiens, statuant comme juridiction de renvoi après cassation, a statué en audience ordinaire composée de trois magistrats appartenant à une seule chambre ;
alors qu'aux termes de l'article 212-5 du Code de l'organisation judiciaire, " les renvois après cassation d'un arrêt sont portés aux audiences solennelles, ces audiences se tiennent devant deux chambres sous la prési

dence du Premier Président " ; que ce texte ne fait aucune distinct...

Vu le mémoire produit ;
Sur le premier moyen de cassation, pris de la violation des articles 609 du Code de procédure pénale, R. 212-5 du Code de l'organisation judiciaire ;
" en ce que la Cour d'appel d'Amiens, statuant comme juridiction de renvoi après cassation, a statué en audience ordinaire composée de trois magistrats appartenant à une seule chambre ;
alors qu'aux termes de l'article 212-5 du Code de l'organisation judiciaire, " les renvois après cassation d'un arrêt sont portés aux audiences solennelles, ces audiences se tiennent devant deux chambres sous la présidence du Premier Président " ; que ce texte ne fait aucune distinction entre les affaires civiles et les affaires pénales ; "
Attendu que la Chambre des appels correctionnels ayant statué après cassation était composée d'un président de chambre et de deux conseillers ;
Attendu que, contrairement à ce qu'allègue le moyen, cette composition était régulière ; qu'en effet, les dispositions, d'ailleurs réglementaires, de l'article R. 212-5 alinéa 1er du Code de l'organisation judiciaire, modifiées par le décret du 14 mai 1979 et aux termes desquelles " en matière civile les renvois après cassation d'un arrêt sont portés aux audiences solennelles " concernent seulement les affaires civiles ; qu'en statuant en audience ordinaire dans la composition prévue par l'article 510 du Code de procédure pénale auquel, notamment, renvoie l'article L. 224-1 du Code de l'organisation judiciaire, la Cour d'appel n'a méconnu aucun texte de loi ;
D'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;
Sur le deuxième moyen de cassation, pris de la violation des articles 2 et 56 de l'ordonnance n° 45-1484 du 30 juin 1945, de l'article 40 de la loi n° 73-1193 du 27 décembre 1973, 485, 593 du Code de procédure pénale ;
" en ce que la décision attaquée a déclaré le demandeur coupable d'infraction aux articles 40 et 42 de la loi du 27 décembre 1973 assimilée à une pratique de prix illicite ; que pour entrer en condamnation, la Cour, après avoir énoncé que la société Cora avait mis en place un système de transport gratuit de clientèle à destination de son magasin l'hypermarché Cora à Wattignies, système qui n'aurait été lié à aucune obligation véritable d'achat dans l'établissement de la société, rappelle que l'article 56 de l'ordonnance du 30 juin 1945 relative à la constatation, la poursuite et la répression des infractions à la législation économique (applicable à la matière, puisqu'il s'agit d'infractions à l'article 40 de la loi du 27 décembre 1973) est assimilée à la pratique d'un prix illicite rend pénalement responsables tous ceux qui, chargés à un titre quelconque de la direction ou de l'administration de toute entreprise, soit contreviennent par un acte personnel, soit en tant que commettant laissent contrevenir par toute personne relevant de leur autorité aux dispositions de ladite ordonnance a décidé qu'il découlait de cette disposition que X..., président-directeur général de la société Cora, ne peut s'exonérer de sa responsabilité pénale en invoquant la délégation de pouvoir qu'il a donnée le 3 avril au directeur du magasin de Wattignies ; que, quelle que soit l'étendue des pouvoirs de gestion des directeurs de chacun des 21 hypermarchés dépendant du groupe et l'importance des tâches incombant au président-directeur général, le prévenu n'apparaît pas comme ayant été mis dans l'impossibilité de connaître les agissements incriminés, d'autant qu'il est invraisemblable que le responsable du magasin de Wattignies n'ait pas rendu compte d'une initiative ayant des incidences budgétaires et qui avait valu à la société Cora d'être assignée en référé par le Cidunati en mars 1975 ;
alors que les délits prévus et réprimés par l'ordonnance du 30 juin 1945 ne sont constitués à la charge de ceux qui sont chargés de la direction ou de l'administration d'une entreprise ou d'une société qui n'ont pas contrevenu par un acte personnel que s'ils ont, en tant que commettant, laissé contrevenir par toute personne aux dispositions réprimées par le texte, qu'il en résulte que le prévenu doit avoir eu connaissance de l'infraction et ne pas s'être opposé à sa commission, mais que les motifs de l'arrêt n'établissent pas que le demandeur ait eu effectivement connaissance des faits incriminés et les ait laissé commettre ; "
Attendu qu'il appert de l'arrêt attaqué et du jugement qu'il confirme que la société " Cora ", qui gère plusieurs " hypermarchés " et dont X... est le président-directeur général, a fait fonctionner, d'octobre 1974 à juin 1976, un système de transport gratuit de la clientèle qui comportait neuf lignes d'autobus à destination de l'un de ses magasins situé à Wattignies ;
Attendu que la Cour d'appel énonce, d'une part, pour établir qu'une infraction à l'article 40 de la loi du 27 décembre 1972, sur l'orientation du commerce et de l'artisanat, était juridiquement constituée, qu'aucune obligation véritable d'achat au magasin " Cora " n'était imposée aux passagers des véhicules et qu'il n'était pas ainsi permis de service liée à une vente au sens de l'article 40 de la loi susvisée ;
Attendu, d'autre part, que pour rejeter le moyen de défense de X... qui soutenait s'être exonéré de toute responsabilité pénale par la délégation de pouvoirs qu'il avait donnée, dès le 3 avril 1971, au directeur du magasin de Wattignies, la Cour d'appel relève que, quelle que soit l'étendue des pouvoirs de gestion des directeurs de chacun des " hypermarchés " dépendant de la société " Cora ", X... n'apparaît pas comme ayant été mis dans l'impossibilité de connaître les agissements incriminés, d'autant qu'il est invraisemblable que le responsable du magasin de Wattignies n'ait pas rendu compte d'une initiative ayant des incidences budgétaires et qui a valu à la société " Cora " d'être assignée en référé l'année précédente par l'une des parties civiles ;
Attendu que sur le fondement de ces constatations et appréciations de fait souverainement déduites des éléments de la cause et desquelles il résulte que le prévenu n'était pas dans l'impossibilité de connaître et par conséquent, d'empêcher les faits incriminés, la Cour d'appel a pu, sans encourir les griefs du moyen, retenir contre le prévenu le délit puni par l'article 56 de l'ordonnance n° 45-1484 du 30 juin 1945, ce texte étant applicable, notamment, à tout chef ou dirigeant d'entreprise ayant, en tant que commettant, laissé contrevenir par des personnes relevant de son autorité aux dispositions de ladite ordonnance ;
D'où il suit que le moyen ne saurait être accueilli ;
Sur le troisième moyen de cassation, pris de la violation de l'article L. 411-11 du Code du travail, des articles 3, 485, 593 du Code de procédure pénale ;
" en ce que la décision attaquée a condamné les demandeurs à payer 1 000 F de dommages-intérêts à la Confédération syndicale de défense et d'union des travailleurs indépendants Cidunati, et au syndicat Cidunati du département du Nord des commerçants et artisans, au motif que la violation des règles de la concurrence par X... aurait causé à ces deux organismes chargés de la défense des intérêts moraux et professionnels de leurs adhérents un préjudice moral certain ;
alors que, si les syndicats professionnels peuvent, devant toutes les juridictions, exercer tous les droits réservés à la partie civile, c'est à la condition que les faits déférés aux juges portent par eux-mêmes un préjudice direct ou indirect à l'intérêt collectif de la profession, et que la Cour d'appel n'a pas précisé quelles étaient exactement les professions représentées par les deux syndicats demandeurs, ni en quoi ces professions avaient pu subir un préjudice, notamment un préjudice moral ; "
Attendu que pour allouer à la Confédération intersyndicale de défense et d'union nationale des travailleurs indépendants (Cidunati) et au syndicat Cidunati du département du Nord des commerçants et artisans des réparations civiles, la Cour d'appel relève que, du fait de la violation constatée, en l'espèce, des règles de la concurrence, de nombreux clients ont été attirés au magasin de la société " Cora " et y ont effectué leurs achats au lieu de le faire chez leurs fournisseurs habituels ; d'où les juges en déduisent qu'un préjudice a été porté aux intérêts moraux et matériels de la profession commerciale représentée par lesdites organisations syndicales ;
Attendu qu'en condamnant le demandeur sur le fondement de ce motif à des réparations civiles, dont elle a souverainement apprécié le montant, la Cour d'appel n'a, en rien, méconnu les textes visés au moyen ; D'où il suit que le moyen ne saurait être accueilli ;
Et attendu que l'arrêt est régulier en la forme ;
REJETTE LE POURVOI.


Synthèse
Formation : Chambre criminelle
Numéro d'arrêt : 80-90036
Date de la décision : 23/10/1980
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Criminelle

Analyses

CASSATION - Juridiction de renvoi - Composition - Cour d'appel - Chambre des appels correctionnels - Audience solennelle (non).

Les prescriptions réglementaires de l'article L. 212-5 alinéa 1er du Code de l'organisation judiciaire, modifiées par le décret du 14 mai 1979, et aux termes desquelles les renvois après cassation sont portés aux audiences solennelles, concernent seulement les affaires civiles. En matière pénale, les dispositions de l'article 510 du Code de procédure pénale, fixant la composition de la chambre des appels correctionnels, et auxquelles renvoie l'article L. 224-1 du Code de l'organisation judiciaire, sont applicables (1).


Références :

Code de l'organisation judiciaire L212-5 AL. 1
Code de l'organisation judiciaire L224-1
Code de procédure pénale 510
Décret du 14 mai 1979

Décision attaquée : Cour d'appel Amiens (Chambre correctionnelle ), 23 novembre 1979

(1) CF. Cour de Cassation (Chambre criminelle) 1946-06-06 Bulletin Criminel 1946 N. 130 p.191 (REJET). (1) CF. Cour de Cassation (Chambre criminelle) 1960-06-15 Bulletin Criminel 1960 N. 323 p.651 (CASSATION).


Publications
Proposition de citation : Cass. Crim., 23 oct. 1980, pourvoi n°80-90036, Bull. crim. N. 269
Publié au bulletin des arrêts de la chambre criminelle N. 269

Composition du Tribunal
Président : Pdt M. Mongin
Avocat général : Av.Gén. M. Dullin
Rapporteur ?: Rpr M. Ledoux
Avocat(s) : Av. Demandeur : M. Ryziger

Origine de la décision
Date de l'import : 14/10/2011
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:1980:80.90036
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